2. Se reconnaître

Connu, le voisin est également aisément reconnu. Et d'abord par la voix. Lorsque la nuit plonge la rue ou l'immeuble dans l'obscurité et dissimule les silhouettes, ou encore quand on ne parvient pas à repérer un individu de visu, il est bien rare, quand un voisin parle ou appelle, qu'il ne soit pas aussitôt identifié. C'est que le timbre, souvent, suffit pour distinguer son homme et l'authentifier comme membre du voisinage. Cette réceptivité à la voix va de pair avec la primauté accordée à l'ouïe et à la parole dans une société où, malgré l'influence grandissante du livre et de l'imprimé, l'information reste avant tout auditive. Lucien Febvre et Robert Mandrou ont écrit de belles pages à ce sujet ( 392 ). Sébastien Mercier, lui aussi, relève cette finesse de l'ouïe populaire parisienne et l'oppose à celle des classes priviliégiées, nettement plus médiocre( 393 ). Reconnaître un habitant de la maisonnée au seul son de sa voix est banal même si l'on occupe un immeuble surpeuplé, abritant derrière ses murs des ateliers où s'activent, la journée entière, de nombreux travailleurs, étrangers à la maison. Les archives judiciaires regorgent d'indications allant dans ce sens. Un marchand tailleur, François Glaize, dépose, par exemple, qu'il « ....entendit des cris qu'il reconnut partis de la voix du sieur Bouvard son voisin; il entendit plus tard la voix de la femme du plaignant criant est-il possible d'être assassiné de cette façon? » ( 394 ). Magdeleine Couchoud, femme d'un maître boulanger expose que «  ....demeurant vis à vis du domicile de la plaignante, elle a eu l'occasion d'entendre dans la nuit du premier au deux de ce mois que cette dernière criait au secours; elle déposante reconnut parfaitement la voix de la plaignante mais ignore tous les autres faits » ( 395 ). Malheur cependant aux occupants de la maison qui ne parviennent pas à se faire identifier par les voisins car, alors, en cas d'agression, la solidarité de voisinage ne joue plus et la victime se retrouve seule face à l'assaillant. La femme d'un avocat au Parlement explique ainsi qu'elle « ...était chez le sieur Bornin avec la dame son épouse, elle entendit crier au volleur, à l'assassin; que ne connaissant pas la voix, l'on laissa crier; que le bruit et les cris ayant continué et augmenté pendant près d'un demi quart d'heure, l'on y accourut enfin » ( 396 ). Plus révélatrices encore, et tout aussi fréquentes, sont les dépositions qui attestent qu'entre voisins on se reconnaît aisément à la voix bien que l'on demeure à plusieurs rues de distance. Louis Thevenin, cafetier, habite quai de la Feuillée. Il raconte : « ....passant Place des Carmes devant le domicile du sieur Pair, il ouit crier la plaignante qu'il reconnut à sa voix; on lui dit que c'était le sieur Pair qui maltraitait sa femme » ( 397 ). L'oreille est suffisamment sûre pour pouvoir départager les torts et distribuer les mauvais points à chacune des parties adverses. Anne Adam, femme d'un maître fabricant en bas de soie, déclare « qu'elle se trouvait dans la boutique du sieur My, marchand de tabac....ils entendirent crier au secours à l'assassin et ont reconnu la voix d'Anne Bertholy qu'un voisin était en train de frapper à coups de pieds.... ils accoururent et la trouvèrent à la porte du domicile du sieur Rey (un voisin effectivement) qui venait de la maltraiter » ( 398 ). Les autorités, d'ailleurs, ne s'y trompent pas et considèrent que le témoignage auditif est aussi probant et recevable que le constat visuel. En attestent les conclusions de cet interrogatoire au cours duquel un accusé, le nommé Roche, compagnon cordier, nie toute participation à une agression contre un autre compagnon faiseur de cordes. Le tribunal lui signifie qu'il est vain de vouloir nier puisqu'il «  a été reconnu à la voix, donc il peut difficilement se disculper de l'accusation » ( 399 ).

S'ajoutant à cette finesse de l'oreille, la mémoire auditive apparaît comme un complément obligé qu'il faudrait inclure dans l'équipement sensoriel des Lyonnais. A cet égard, les habitants de la cité semblent plutôt bien disposés : s'il est ordinaire de pouvoir répéter sans difficulté apparente et mot pour mot des propos formulés inopinément tout en leur attribuant un auteur qu'on n'a pourtant pas vu, la capacité de se souvenir va souvent bien au-delà. François Rey, maître fondeur, expose dans sa plainte les malheurs qui lui sont arrivés ainsi qu’à sa femme : « ....ils ont été assaillis par cinq ou six hommes....(qui) ont parcouru leur boutique et se sont saisis du poêle qu'ils ont emporté. La femme du plaignant voulant s'y opposer a reçu un coup de poing....un particulier s'est mis à jurer alors le plaignant reconnut sa voix pour être celle d'un nommé Rey poelier demeurant rue Raisin qui lui avait vendu l'année dernière le poêle....sans l'avoir revu depuis ce temps là....il a prétendu que le plaignant lui devait vingt Livres » ( 400 ). Cette disposition particulière à pouvoir identifier un être à partir de sa voix et à mémoriser son timbre renvoie peut-être à une certaine méfiance ou à une inquiétude face à la violence de l'environnement. Elle participe en tout cas de l'univers mental des Lyonnais et inscrit l'ouïe au premier rang dans la hiérarchie des sens.

La reconnaissance entre membres du voisinage est, dans une certaine mesure, facilitée par la tenue vestimentaire de chacun. Les travaux de Daniel Roche ont montré combien le vêtement est porteur de signes et révélateur du statut social( 401 ). Même si, à la fin du XVIIIème siècle, de sérieuses nuances compliquent le code des apparences, en raison notamment de l'émergence des classes moyennes mais aussi des critiques moralisatrices qui dénoncent la vanité du paraître, la différence des tenues continue à souligner l'inégalité sociale. Un détour par la fonction et l'aspect de l'habit est, à ce stade de l'étude, utile puisque l'apparence extérieure est au coeur du processus d'identification. Interroger le voisinage dans sa manière de se vêtir, c'est aussi comprendre les façons qu'il a de reconnaître ceux qui lui sont affiliés. A ce titre, un bref examen des usages vestimentaires lyonnais, envisagés comme mode d'authentification réciproque, prend ici toute sa place ( 402 ).

Le vêtement, le plus souvent, est fonctionnel. Il est résistant et simple, destiné à durer et à tenir chaud pendant la saison froide. Les couleurs dominantes sont le noir, le gris ou le brun, du moins dans les classes populaires ou artisanales. Jean François Rayon, marchand épicier, dépose qu'il « ....vit sortir quatre particuliers vêtus de bruns, paraissant être des péroliers de leur profession » ( 403 ). Jacques Grobon, garçon plâtrier, parle d'un marinier travaillant sur la Saône comme d'un « ....homme vêtu en matelot, portant une veste en laine gris et un gilet croisé de même couleur » ( 404 ). L'élégance et la coquetterie sont rarement de mise - pauvreté oblige - et on se contente souvent d'ajouter quelques galons aux habits ordinaires pour leur donner un peu d'éclat. François Lagrange est un écrivain sans ressources. Dans un cabaret, un marchand de vin se moque de lui « ....en disant qu'( il ) n'était pas vêtu proprement, qu'il ne portait pas d'habits galonnés ce qui ne lui attirait pas de considération » ( 405 ). C'est que le vestiaire ordinaire est modeste et peu varié. Les vêtements de base sont les mêmes dans toutes les catégories populaires. Seules varient la quantité et la qualité de l'habillement.

Dans ce paysage vestimentaire un peu monotone, les personnes de qualité costumées dans des vêtements chics, se repèrent facilement. Elles sont d'autant plus reconnaissables que leurs gestes et leur expressivité manifestent une certaine distance vis à vis des gens du commun, distance que chacun considère comme la manifestation d'une insupportable prétention. Pierre Durand, étudiant en droit, raconte qu'il se trouvait dans l'étude d'un notaire lorsqu'un « ....particulier arrogant, vêtu d'un habit de soie verd pomme, d'une veste blanche galonnée, avec des cheveux noirs et une canne à la main s'est présenté....et dit s'appeler le marquis de la Coste » ( 406 ). Rien de tel dans le monde du travail puisque la gamme costumière joue avant tout sur le mode utilitaire et robuste. Ici, les vêtements se réduisent à l'essentiel et consistent en quelques effets sans valeur. Jean Lagrange, compagnon maçon, épouse une dévideuse de soie, Josephe Vivian. Il raconte qu'après les noces « ....il porta chez sa fiancée son drap de Vienne....trois Louis pliés dans un morceau de papier qui étaient ses économies de l'année, un chapeau neuf qui ne lui avait servi que le jour de son mariage....et son linge pour qu'elle le raccommode et le blanchisse » ( 407 ). Ceux que la pauvreté économique oblige à changer sans cesse d'horizon entreposent leur méchante garde-robe dans des coffres qui les accompagnent au gré des déménagements et des embauches éphémères. Gare, alors, au vol car il plongerait aussitôt la victime dans le dénuement le plus complet. Angelot Marchand, un affaneur de 45 ans explique qu'il devait « ....changer de domicile au début de ce mois et loger rue Bellecordière....il a remis un coffre dont il a gardé la clé à Guillaume, cabaretier qui demeure rue Thomassin....dans le coffre, il y avait ses vêtements et quelques papiers dont ses actes baptismaux et plusieurs quittances....mais des malfaiteurs se sont introduits chez le cabaretier et ont pris le coffre » ( 408 ).

L'indigence de ces déclassés est telle qu'elle les empêche de se vêtir de neuf. Le plus souvent, ils achètent des vêtements usagés auprès des innombrables petits revendeurs qui parcourent les quartiers de la ville ou qui s'installent avec leur étal le long des rues. Dans les années qui précèdent la Révolution, la vente du vêtement d'occasion, volé ou récupéré de façon plus ou moins régulière, est au coeur d'un trafic important. Les indicateurs, les commissaires ou les huissiers surveillent de près les fripiers et autres marchands de gages qu'ils considèrent comme a priori suspects. Dans un procès-verbal, l'huissier Ducret note : « ....aujourd'hui 11 janvier 1790, dans l'après midi,....faisant notre ronde....et passant rue Mercière....nous y avons fait rencontre du nommé Vieully, revendeur de vieilles hardes qui demeure vers Saint-Paul, lequel portait un sac plein, soupçonnant que ce ne pouvait être que des effets volés, nous nous sommes approchés dudit Vieully....avec interpellation de nous déclarer quels étaient les objets qu'il portait et étaient renfermés dans son sac » ( 409 ). La vérité est qu'un important marché clandestin se déploie dans l'ombre que les autorités ont bien du mal à contrôler. De nombreux réseaux, connus de tous, permettent au voleur d'écouler sa marchandise. Cette économie souterraine s'organise pour l'essentiel autour des revendeurs de nippes qui, faisant feu de tout bois, proposent à des prix dérisoires des effets élimés et rapiécés. Les archives judiciaires laissent parfois transparaître ces circuits de revente illicites - bien connus des habitants du quartier - qui impliquent indistinctement des hommes et des femmes. Ainsi, par exemple, les époux Marie, revendeurs de gages. Accusés de recel, ils reconnaissent qu'ils « ....ont acheté deux articles du sieur Humbert leur voisin » mais ils se défendent en prétextant qu'ils « ...le connaissaient parfaitement ainsi que sa famille sans quoi ils n'auraient pas acheté » ( 410 ). Jeanne Gobon, elle, a volé plusieurs effets dont une paire de bas et une veste à laquelle il manque une manche. Retrouvée et interrogée par les juges de la Sénéchaussée criminelle, « ....elle a avoué avoir vendu les susdits effets....à la nommée Manesson, revendeuse de gages qui demeure....au coin du Pont Neuf....connue de ses voisins pour une femme achetant de toutes mains » ( 411 ). Le petit peuple, semble-t-il, ne dédaigne pas s'approvisionner auprès de vendeurs suspects. Il est vrai que, pour les plus humbles, c'est une des rares manières de pouvoir se vêtir.

D'autres signes encore informent sur la situation qu'occupe le voisin dans la hiérarchie sociale. Quelques métiers arborent un insigne qui les distingue. C'est le cas, par exemple des voituriers, des affaneurs ou des porteurs de charbon qui, selon le règlement, doivent porter « une plaque de cuivre ou de fer, attachée au devant de leur habit ou veste sur laquelle le numéro doit être gravé de même que le port qui leur aura été désigné pour travailler » ( 412 ). Les autres métiers ne se confondent pas non plus : on connaît l'habit noir du médecin, de l'avocat, de l'homme de loi, de l'homme d'Eglise, la pourpre cardinalice, le rouge épiscopal, la robe sombre des réguliers et la robe violette revêtue par les membres du Consulat pour les grandes occasions ( 413 ). De nombreux témoignages montrent qu'on se trompe rarement sur l'identité sociale d'un homme car son vêtement est là pour informer de sa condition. Claude Patel est brodeuse. Elle raconte qu'elle a vu « ....trente personnes présumées ouvriers à leurs habillements....et qu'elle ouit dire être ferblantiers » ( 414 ). Un compagnon teinturier, Etienne David, a aperçu « ....un homme avec une veste à fleurs rouge sur fond blanc, un chapeau blanc....d'une grosse corpulence qui lui paru être un garçon meunier ou amidonier....âgé d'environ 36 ans » ( 415 ). Ennemond Corand, domestique ambulant, dépose qu'il remarqua dans un cabaret « ....plusieurs particuliers boire avec le nommé Poulet ainsi qu'un homme en habit de perruquier » ( 416 ). Jeanne Marie Desjardins témoigne qu'elle observa « ....deux particuliers inconnus, l'un desquels en veste et en chapeau rond avait l'apparence d'un boucher » ( 417 ). Chez les femmes aussi, le vêtement reflète la condition et l'appartenance sociale. Jeanne Meaudre, marchande de modes, explique qu'elle a eu comme cliente »....une fille d'environ 24 ans, ni laide ni jolie, ayant une coiffure moyenne, brune, et dans l'accoutrement d'une femme de chambre » ( 418 ). Une découpeuse de gaze a rencontré dans la rue « ....une inconnue présumée blanchisseuse.... » ( 419 ). Les exemples sont nombreux et vont tous dans le même sens : le vêtement est un costume qui informe aussitôt sur le statut de celui qui le porte. Les autorités le savent bien qui savent reconnaître facilement les suspects qu'elles interpellent. Elles se laissent d'ailleurs rarement tromper. Jacques Louis Laurenzy est arrêté par un soldat de la Compagnie des Arquebusiers lors de l'exécution publique d'un filou, place des Terreaux. Accusé d'avoir volé un mouchoir, il est transporté au corps de garde puis interrogé quelques jours plus tard. Il déclare alors qu'il s'occupe sur les ports « ....à la décharge du bois et des pierres.... », ce que le tribunal refuse de croire. En effet, lui oppose-t-il, « ....l'habit dont il est vêtu n'annonce....pas un crocheteur ni un homme s'occupant à des travaux pénibles » ( 420 ).

Le vêtement permet d'identifier facilement celui qui le porte. Il sépare riches et pauvres. Il renseigne aussi sur la provenance géographique du voisin grâce à une multitude d'indices visibles et compréhensibles par tous. Joseph Perrind, marchand toilier, est convoqué par le tribunal de la Sénéchaussée criminelle. Il doit témoigner à propos d'une rixe survenue entre deux femmes qui sont ses voisines. Il déclare qu'il « ....était dans son magasin à parler à un provençal.... » lorsque la bagarre a éclaté( 421 ). Un maître tailleur, Jacques Oyet, poursuivi pour injures et calomnies, raconte au cours de son interrogatoire qu'il « ....a entendu des filles habillées en paysannes qui demeurent dans la maison mais dont il ignore le nom....(tenir) des propos injurieux à son égard.... » ( 422 ). Pierre Mermet, traiteur, explique qu'il buvait dans un cabaret et « ....vit un homme déjeuner en mangeant du hareng ce qui fixa son attention....(il) avait un habillement et des guètres à la manière dauphinoise » ( 423 ). En variant d'un «  pays » à un autre, les paraîtres régionaux, encore très vivaces à la fin du XVIIIème siècle, indiquent l'appartenance géographique. Ils participent à cette « culture des apparences » puisqu'ils confèrent à son propriétaire une identité à la fois régionale et sociale que chacun sait reconnaître et déceler au premier coup d'œil ( 424 ).

L'importance que revêt l'aspect extérieur engendre des règles sévères qu'il faut bien entendu respecter. La plus importante de toutes est celle qui consiste à rester à sa place en portant des habits conformes à son état ( 425 ). Se vêtir autrement, c'est se glisser dans la peau d'un autre. Rétif de la Bretonne ne dit rien d'autre lorsqu'il écrit : «  C'est un mauvais proverbe que celui, l'habit ne fait pas le moine! il le fait certes! il le fait au moral comme au physique, au simple comme au figuré. Qu'un homme prenne une robe de procureur, d'avocat, de greffier, de magistrat, aussitôt il a l'esprit de corps....un capuchon monocalise celui qui le met fut-ce en badinant, fut-ce en masque.... » ( 426 ). Porter un costume qui ne convient pas à son état choque ou stupéfie ( 427 ). Pierrette Cochet est domestique chez le sieur Sauzey. Elle rencontre un après-midi « ....près de la Place des Carmes le nommé Berthon ci-devant domestique du sieur Dusaussoy....il était vêtu d'un grand habit de couleur ...ce qu'elle trouva extraordinaire parce qu'il portait ordinairement une veste courte....ledit Berthon avait une physionnomie égarée... » ( 428 ). Puisque l'habit désigne celui qui l'endosse, il est facile de brouiller les pistes. Les filous ne s'en privent et se travestissent fréquemment pour détourner les soupçons et ne pas être reconnus du public. Jacques Métra, un fabricant en étoffes de soie a été agressé. Il raconte qu' « ....à l'entrée de la rue Petit Soulier, il fut attaqué par quatre particuliers qu'il a appris se nommer depuis Dumolard, Guillot, Poix et Rey, ce dernier soldat au régiment de la Couronne était travesti en bourgeois » ( 429 ). En rédigeant le procès-verbal d'arrestation d'un homme suspecté de vol, le Procureur du Roi précise qu'il s'agit « ....d'Antoine Ducret, compagnon chapelier....(qui était) travesti d'un habit militaire à revert rouge....il était en possession, semble-t-il, d'un drap de ménage qu'il venait de voler dans une chambre....(il) a été arrêté par le commis du sieur Dubois avec l'aide des voisins » ( 430 ). Jouer avec son apparence est mal accepté par l'opinion commune car c'est encourager le désordre et la confusion sociale. Le manque de lisibilité vestimentaire est une offense à la collectivité qui l'assimile à un mensonge. Les femmes trop coquettes l'expérimentent à leurs dépens et les railleries du voisinage sont là pour rappeler à ces audacieuses leur juste place dans la société lyonnaise. Nicolas Gervais Richard, peintre, est un mari violent. Accusé par sa femme de mauvais traitements, il se défend en déclarant qu'il « ....a tiré une seule fois le ruban d'une coiffe de sa femme parce qu'elle avait une coiffe scandaleuse qui faisait rire tout le voisinage » ( 431 ). On ne s'expose pas impunément dans un accoutrement qui n'est pas le sien. Telle est la règle d'or de l'apparence qu'impose quotidiennement le regard vigilant des autres.

Notes
392.

() Febvre (L.), Le problème de l'incroyance au 16ème siècle, Albin Michel 1988, 511 pages, pp. 393-403. Mandrou (R.), op. cit., pp. 70-85.

393.

() Mercier (S.), op.cit., p.183 : «  Les servantes ont l'oreille beaucoup plus exercée que l'académicien : elles descendent l'escalier pour le dîner de l'académicien parce qu'elles savent distinguer du quatrième étage, et d'un bout de la rue à l'autre, si l'on crie des maquereaux ou des harengs frais, des laitues ou des betteraves ».

394.

() Arch. dép. Rhône, BP 3510, 3 août 1786.

395.

() Arch. dép. Rhône, BP 3477, 3 janvier 1782.

396.

() Arch. dép. Rhône, 11G 301, 7 septembre 1776.

397.

() Arch. dép. Rhône, BP 3472, 31 juillet 1781.

398.

() Arch. dép. Rhône, BP 3455, 17 avril 1779.

399.

() Arch. dép. Rhône, BP 3519, 13 novembre 1787.

400.

() Arch. dép. Rhône, BP 3511, 7 décembre 1786.

401.

() Roche (D.), La culture des apparences. Une histoire du vêtement. XVIIème-XVIIIème siècles , Fayard, 1989, 549 pages.

402.

() Sur la question du vêtement, consulter Pilloix (A. P.), La garde robe des Lyonnais de 1680 à 1782 d’après les inventaires après décès, mémoire de maîtrise sous la directiuon de Françoise Bayard, 2000, 159 pages et annexes, Centre Pierre Léon.

403.

() Arch. dép. Rhône, BP 3511, 7 décembre 1786.

404.

() Arch. dép. Rhône; BP 3459, 6 novembre 1779.

405.

() Arch. dép. Rhône, BP, 3459, 23 octobre 1779.

406.

() Arch. dép. Rhône, BP 3457, 7 juillet 1779.

407.

() Arch. dép. Rhône, BP 3471, 23 mai 1781.

408.

() Arch. dép. Rhône, BP 3454, 17 février 1779.

409.

() Arch. dép. Rhône, BP 3534, 28 janvier 1790.

410.

() Arch. dép. Rhône, BP 3537, 5 janvier 1791.

411.

() Arch. dép. Rhône, BP 3526, 16 octobre 1788.

412.

() Arch. comm. Lyon, BB 316, Ordonnance consulaire du 23 février 1749.

413.

() Lettre du Président Dugas adressée à M. de Saints-Fonds : «  Monsieur l'Intendant est parti ce matin pour....aller attendre (la princesse de Conty) à Tarare. Si elle veut recevoir les honneurs qui lui sont dus, le corps consulaire ira en robes violettes la haranguer à la porte de Vaise » in Poidebard (W.), op. cit., T. II, p.19, Lettre du 26 avril 1730. Sur les costumes consulaires, consulter Vial (E.), « les costumes consulaires », Revue d’histoire de Lyon, 1904, T. III, 504 pages, pp. 127-145 et 228-305.

414.

() Arch. dép. Rhône, BP 3538, 21 septembre 1789.

415.

() Arch. dép. Rhône, BP 3516, 10 juin 1787.

416.

() Arch. dép. Rhône, BP 3455, 8 mai 1779.

417.

() Arch. dép. Rhône, BP 3520, 23 février 1788.

418.

() Arch. dép. Rhône, BP 3459, 5 octobre 1779.

419.

() Arch. dép. Rhône, BP 3520, 23 mai 1788.

420.

() Arch. dép. Rhône, BP 3458, 22 septembre 1779.

421.

() Arch. dép. Rhône, BP 3469, 3 février 1781.

422.

() Arch. dép. Rhône, BP 3481, 1er août 1782.

423.

() Arch. dép. Rhône, BP 3534, 15 janvier 1790.

424.

() A la fin du XVIIIème siècle, de nombreux voyageurs parcourent les provinces françaises et décrivent la grande diversité régionale des costumes. Pierre-Jean-Baptiste Legrand d'Aussy, après un voyage effectué en Auvergne, livre de nombreux détails sur les particularismes vestimentaires de cette région. Ainsi, par exemple : « Les vignerons de l'élection de Brioude ont la tête couverte d'un sac de grosse toile pliée en forme de capuchon » ou encore « l'habillement du paysan....est fait d'un drap grossier....pour la Basse-Auvergne ce draps est gris; et pour la Haute, brun marron. Dans une grande partie de cette dernière, les femmes portent un petit chapeau rond, noir sans fond. Pour les temps de pluie, les deux sexes, surtout aux environs des Monts Dôme et des Monts Dore, ont....une sorte de manteau, nommé coubertie, dont la forme est celle d'un jupon etc... » Legrand d'Aussy (P.J.B.), cité in Pellegrin (N.), Les vêtements de la liberté, Abécédaire des pratiques vestimentaires françaises de 1780 à 1800, Alinéa, 1989, 207 pages, p. 24. Toujours pour l'Auvergne, voir aussi p. 60 les reproductions d'aquarelles de Gault de Saint-Germain, datées de la fin du XVIIIème siècle. La région de Lyon dispose, elle aussi, d’un costume local mais les indications le concernant sont souvent floues ce qui rend difficile une description précise, cf. Bayard (F.), Vivre à Lyon sous l’Ancien Régime, op. cit., p. 256.

425.

() Cf Farge (A.), Vivre dans la rue à Paris au XVIIIème siècle, Archives Gallimard/Julliard, 1979, 249 pages, pp. 94-96.

426.

() Rétif de la Bretonne, Les nuits de Paris, Bouquins, 1990, 1372 pages, p. 754.

427.

() Sur le travestissemnt consulter Dekker (R.) et Van de Pol (L.), The Tradition of Female Transvestium in Early Modern Erurope, Londres, 1989, 465 pages ou encore Steinberg (S.), Fayard, 2001, 409 pages.

428.

() Arch. dép. Rhône, BP 3535, 2 mai 1790.

429.

() Arch. dép. Rhône, BP 3454, 29 mars 1779.

430.

() Arch. dép. Rhône, BP 3466, 23 juillet 1780.

431.

() Arch. dép. Rhône, BP 3521, 1er avril 1788.