2. L’heure du trépas.

A la naissance et à la vie, succède la mort, cette « compagne » dramatiquement familière aux hommes de l'époque moderne, comme le confirment toutes les enquêtes démographiques. Les chiffres avancés sont édifiants : un Lyonnais sur deux n'atteint pas sa vingtième année et deux tiers de ceux qui sont parvenus à l'âge adulte s'éteignent avant 60 ans. Dans la paroisse Saint-Nizier, 31% des ouvriers en soie, 38% des chapeliers et 49% des ouvriers du bâtiment disparaissent entre 20 et 39 ans( 685 ). On meurt donc beaucoup et souvent à Lyon dans les dernières décennies de l'Ancien Régime. La mort s'impose de manière violente et prélève régulièrement son lourd tribut d'êtres humains. Non pas que l'état de vieillesse soit inconnu ni même exceptionnel : en l'an IV, 13,6% des habitants domiciliés rue Juiverie ont dépassé 60 ans ( 686 ). De son côté, l'abbé Lacroix relève le nom de 47 personnes ayant vécu entre 99 et 112 ans et 75 entre 95 et 99 ans( 687 ). On ne saurait s'y tromper toutefois. Dans un temps où l'espérance de vie des hommes plafonne à 48 ans et celles des femmes à 53 ans, parvenir à de grands âges reste une chose rare. Beaucoup plus qu'aujourd'hui, survivre est un combat et le spectacle de la mort demeure d'une cruelle banalité : mort des nourrissons en raison des conditions de l'accouchement; mort des hommes et des femmes victimes d'une épidémie ou d'une infection mal maîtrisée; mort violente au cabaret, à l'atelier ou sur un chantier; mort accidentelle à l'image du fils de Jacques Lebrat, écrasé par une charrette de foin ( 688 ); mort spectaculaire des exécutions publiques. L'omniprésence de la mort est une réalité bien attestée et suffisamment connue pour qu’elle donne lieu à de longs développements.

Comment les populations pouvaient-elles bien réagir face à ce fléau ? Quels sentiments éprouvaient-elles à l'égard des personnes disparues ? Pareilles questions ont suscité de nombreux travaux aux conclusions, parfois, contradictoires ( 689 ). Si une telle enquête dépasse largement le cadre de cette étude, il n'est pas inutile d’exposer les quelques impressions dominantes qu'éveille la lecture des archives judiciaires. Incontestablement, le décès d'un voisin, d’un proche ou d'un membre de la famille provoque le chagrin et l'amertume des survivants. Avec, bien entendu, toutes les nuances possibles liées à ce type d'affects. De tous les décès, semble-t-il, celui du conjoint est le plus mal ressenti ( 690 ). Que l'on soit un homme ou une femme, on redoute la disparition de son compagnon, par crainte de devoir assumer seul l'existence, sans doute, mais aussi en raison d'un attachement sincère. Comment qualifier autrement le sentiment qui unit, par exemple, cet homme de 48 ans, Jean Perrin, qui apprend « la maladie dangereuse de sa femme alors qu’il….(est) à Paris ». Il revient précipitamment à Lyon et croise à son arrivée un homme qui colporte des rumeurs désobligeantes sur un dénommé Dumontet. Mais, « la douleur ne lui a pas permis de (le) remarquer….Le même particulier revint chez lui le lendemain dans un moment où sa femme était très mal….il n’y fit aucune attention étant entièrement occupé à (lui) donner des secours » ( 691 ). La mort d’un voisin émeut souvent aussi la maisonnée et nombreux sont ceux qui ressentent, à l’instar de Jean Grollet un chagrin profond ( 692 ). Quant à la mort des enfants, si elle est ressentie avec une fatalité certaine, elle ne semble pas être accueillie avec l'insensibilité et l'indifférence que s'est plu, parfois, à décrire la littérature féministe. S. de Beauvoir, E. Badinter et de nombreux historiens tels que P. Ariès, F. Lebrun ou E. Shorter dénient, on le sait, tout sentiment de l'enfance et tout amour maternel dans les sociétés occidentales avant le XVIIIème siècle. Jusqu'à l'avènement de J.-J. Rousseau et la parution de son Emile - véritable monument à la gloire de la maternité - l'affection pour les plus petits leur paraît relever de l'exceptionnel. Celle-ci, estiment-ils, parvient à s'imposer dans la seconde moitié du XVIIIème siècle chez les plus riches avant de se diffuser lentement en direction des catégories populaires. Des documents existent pourtant qui montrent que l'attachement maternel et parental a toujours existé. Emmanuel Le Roy Ladurie raconte la douleur des femmes de Montaillou quand elles perdent leur enfant ( 693 ). La marquise de Sévigné évoque le chagrin d'une amie pour la mort d'un nouveau-né ( 694 ). Les quelques témoignages contenus dans les procédures judiciaires vont dans le même sens. Comme parler d'indifférence dans le cas des époux Lambert, par exemple, de modestes artisans, tout à leur douleur après la disparition de leur bambin ( 695 ) ? Pourquoi douter de l’affection des voisins pour les enfants du quartier ou de leur peine quand ces derniers souffrent ou meurent ? N'a-t-on pas, simplement, confondu trop longtemps l'apparence sociale de l'amour et l'amour lui-même ( 696 ) ? Quoi qu'il en soit, s'il faut toujours se garder des généralisations sociologiques, il faut reconnaître aux écrivains féministes un grand mérite : celui d'avoir mis en doute l'existence d'un instinct maternel et, ce faisant, d'avoir soustrait les femmes de l'espèce purement animale.

P. Ariès, P. Chaunu, F. Lebrun, M. Vovelle - pour ne citer que des historiens français - ont consacré à la mort des pages décisives ( 697 ). Ils ont clairement montré que le cérémonial qui l'entoure s'était transformé, dessinant un modèle à plusieurs temps. Progressivement, on est passé de la mort acceptée et largement socialisée à une mort repliée au for familial et privé. Entre ces deux termes, une période dite « baroque » a éclos, marquée par une théâtralisation extrême du trépas que l'Eglise a pris grand soin d'encadrer. Ce qui caractérise le XVIIIème siècle, c'est qu’il constitue une époque charnière où s'affrontent deux conceptions de la mort et du deuil. La première, coutumière, conçoit l'acte de mourir comme un moment public, à vivre collectivement. La seconde, plus « moderne », rejette tout cérémonial spectaculaire et s'efforce de restreindre le public au seul cercle des proches. Si la société lyonnaise n'échappe évidemment pas à ces mouvements contraires, le dépouillement des archives judiciaires, cependant, donne de l'agonie du mourant et de ses funérailles une image plutôt traditionnelle. La mort n'est pas encore devenue secrète et les rituels publics continuent à souligner l'importance du passage vers l'Au-delà. Fréquemment les Lyonnais croisent dans la rue un curé qui porte le Saint Sacrement à un agonisant. Une petite procession se forme alors qui voit le prêtre et ses clercs agiter une clochette et porter des cierges tandis que les passants s'agenouillent à leur passage ou les escortent ( 698 ). D'autre part, à moins d'un décès brutal, la maladie d'un tiers est rapidement connue et commentée par le voisinage. On vient s'enquérir de la santé du souffrant tout en lui prodiguant des paroles de réconfort. Ainsi procède Benoit Rabut qui s'attache à prendre des nouvelles du sieur Giraud « en qualité de voisin  jusqu'à son décès » ( 699 ). C'est que visiter un mourant, se mettre en règle avec lui, l'apaiser, participent de ces devoirs dits de « bon voisinage ». Une belle mort, à l'époque moderne, ne se déroule-t-elle pas dans une ambiance sereine, au milieu de ses proches et de ses voisins ( 700 ) ? Quant l'état du malade devient critique et que la mort menace, l'usage veut que l'on asperge le moribond d'eau bénite avec le buis des Rameaux et qu'on allume un cierge ( 701 ). Un voisin ou un parent s'empresse d'aller chercher un chirurgien et le vicaire de la paroisse de façon à parer à toute éventualité. C'est ainsi qu'opèrent les proches locataires du sieur de la Rue, un célibataire, décédé brutalement après avoir été assassiné en pleine nuit par un étranger de passage. Aussitôt alerté, le chirurgien « resta auprès de cet homme mourant, lui donna à boire et....quelques secours de son art pour le soulager....jusqu'au moment de sa mort » . Quant au prêtre vicaire « il lui fit faire une bonne confession et l'excita à demander pardon à Dieu et à ne vouloir aucun mal aux malheureux qui l'avaient assassiné » ( 702 ). D'ordinaire cependant, la venue du prêtre se déroule dans un tout autre climat. Après la confession du mourant - essentielle parce qu'à l'orée du «grand voyage » elle peut racheter toute une vie de péché - et sa communion en viatique, l'homme d'église bénit le malade. Ce dernier récite alors quelques prières, en commun, parfois avec l'assistance. Désormais, en règle avec sa conscience et les commandements de son Eglise, le moribond peut s'endormir dans la « paix de Dieu » et rejoindre l'Au-delà.

Sitôt le décès constaté, il est interdit à quiconque de faire du bruit dans la chambre du défunt et aux alentours. On sermonne sévèrement les enfants ou les adultes qui crient, sifflent ou chantent. La vie active doit être comme suspendue aussi longtemps que les funérailles n'ont pas eu lieu. Un stade de « marge temporaire » commence pendant lequel le trépassé, ni vraiment vivant ni tout à fait mort, oscille entre le monde d'ici-bas et le monde céleste ( 703 ). La famille, aidée des voisins et surtout des voisines, arrange la chambre du défunt en la drapant, parfois, d'étoffes sombres. Dans la pièce ainsi décorée, se tient la veillée mortuaire à laquelle sont conviés les parents, les amis et les habitants de la maisonnée. A la mort de Pierre Liotard, par exemple, Sébastien Giraud et Jean-Baptiste Bonnet, ses deux « pré-voisins » veillent le trépassé à tour de rôle « depuis six heures du matin….jusqu’au moment où il a été inhumé ». Ils coudoient les membres de la famille et le cercle des proches ( 704 ). La nécessité de monter la garde auprès du mort est une vieille coutume qui renouvelle le pacte de solidarité entre les survivants. Il semble cependant qu'elle soit parfois ressentie comme une « corvée » et confiée à des personnes tout spécialement embauchées. Tel est le cas de Françoise Duchêne, une garde malade de 40 ans, qui passe la nuit auprès du cadavre du sieur Monggy, décédé en début de soirée( 705 ). Une autre coutume veut qu'en cas de décès, les voisins offrent à la famille en deuil leur concours pour revêtir le mort et procéder à sa toilette. « Le jour de la mort de Geneviève Rousset, témoigne une de ses voisines, elle a aidé....à changer de linge à la défunte qui venait de mourir et était encore sans raidissement » ( 706 ). C'est là la disposition la plus fréquente. La toilette du mort reste du ressort des amies ou des voisines du disparu, exceptionnellement celui des parents proches, mais jamais celui des hommes. Les femmes qui donnent la vie se voient de la sorte investies d'un droit à disposer des morts. Il n'est donc pas surprenant que des ensevelisseuses de métier, qui se désignent elles-mêmes comme garde-malades, soient souvent signalées auprès des dépouilles mortuaires : ce sont elles aussi, on le sait, qui aident à accoucher les femmes enceintes ( 707 ).

Après la mort d'un individu, il est d'usage d’accomplir certains rites de purification. La paillasse du défunt est brûlée ou dispersée, comme celle de Geneviève Rousset « vidée au milieu de la rue » ( 708 ). Le linge courant est nettoyé ou, mieux, distribué aux domestiques ou aux ensevelisseuses, à l'exemple de cette femme, Claudine Pitiot, une garde-malade qui a « aidé à ensevelir la défunte....et a reçu une chemise et un jupon....ainsi qu'il est d'usage» ( 709 ). Parfois, la chambre est astiquée ou désinfectée comme si les survivants cherchaient à se protéger d'une contagion, naturelle ou surnaturelle. Puis vient le temps de l'exposition du mort pour les derniers adieux. En principe, il n'excède pas trois jours mais varie selon l'appartenance sociale du disparu. Dans les classes privilégiées, le corps est étendu sur un lit de parade, richement orné. Dans les catégories artisanales ou populaires, il repose simplement sur le lit ordinaire qu'on a dressé au milieu de la pièce. Des faire-part sont envoyés quand il s'agit d'individus occupant une position reconnue et des affiches placardées à la porte des églises. Mais le bouche à oreille reste le procédé publicitaire le plus répandu. Chacun vient rendre une ultime visite au défunt et cherche à consoler la famille affligée. Une fois la cérémonie des adieux achevée, un menuisier ou un charpentier est appelé qui prend les mesures de la dépouille et confectionne un cercueil. Ainsi opère Jean-Michel Zacharie à l'annonce du décès de Pierre Liotard ( 710 ). Quand la construction du cerceuil a pris fin, le mort y est enfermé avec, éventuellement, quelques uns de ses objets de piété. Commencent alors les funérailles proprement dites.

Le départ de la maison marque la séparation du mort d'avec son milieu social journalier. Le glas appelle la communauté de voisinage à participer activement à la cérémonie. Le cerceuil, recouvert d'une étoffe sombre, ouvre la marche, suivi d'un cortège dans lequel les participants ont revêtu une tenue de deuil ou, tout au moins, une pièce ou un insigne approprié. L'ordre le plus couramment adopté voit, derrière le corps, les proches parents du trépassé auxquels succèdent les voisins, les amis, les collègues et les relations de la famille. Le cercueil, d'ordinaire, est transporté à bras, posé sur les épaules de quatre porteurs parmi lesquels se trouvent inmanquablement quelques habitants du quartier ou encore des camarades de travail. Entre le domicile du défunt et l'église, le cortège emprunte un trajet que le décédé a suivi bien des fois au cours de son existence. Traversant une dernière fois son quartier familier, le mort prend congé de ce qui composa son univers quotidien et de ses habitants. Cette promenade ultime, à forte résonnance symbolique, s'achève quand la dépouille franchit le seuil de l'église où l'attend le service funèbre réglé selon le rite romain. Une messe est dite, suivie d'une distribution de pain béni. L'inhumation, alors, peut avoir lieu. Selon l'ordonnance de 1776, elle doit se dérouler dans le cimetière de la paroisse où vivait le disparu comme le rappelle le procureur du roi après le décès de Catherine Riom ( 711 ). Près de 40% des testateurs, pourtant, désirent se faire enterrer sous les dalles d'une église ( 712 ). Vieille coutume aux relents archaïques et condamnée désormais par les hygiènistes ( 713 ). Une fois le cadavre enseveli, la séparation d'avec le mort est définitive : l'individu qui appartenait au monde des vivants s'en est allé pour toujours rejoindre l'Autre Monde.

A la sortie du cimetière se pressent quelques pauvres auxquels, traditionnellement, on distribue des aumônes. Puis les personnes qui ont assisté aux funérailles - en priorité les voisins et les proches - participent au repas funéraire à la mémoire du défunt. Le repas funéraire symbolise, au même titre que le repas du baptême, les liens d'amitié qui unissent les membres de la famille et le voisinage. Ils renforcent la solidarité du groupe, éprouvé par la disparition d'un des siens et soude la communauté des survivants. Rien d'étonnant, en ce cas, qu'il ne soit triste qu'au début et qu'il finisse par la gaieté voire, même, par l'ébriété des participants ( 714 ). La joie qui règne au cours du repas funéraire s'explique fort bien même si elle choque certains observateurs. Non seulement, en effet, l'épreuve douloureuse de l'enterrement est achevée, mais le sort du défunt est assuré. Les survivants ont scrupuleusement observé les rites et rempli leurs devoirs de Chrétiens. Toute douleur, toute crainte est donc infondée.

Le modèle des funérailles, tel qu'il vient d'être proposé, correspond au schéma le plus courant, celui dont se font l'écho les archives judiciaires. Il ne tient pas compte des cas « extrêmes », ceux qui concernent les classes aisées, les indigents ou les exclus. Et pour cause. Les documents manquent. Chez les plus riches, l’enterrement revêt parfois une forme très dépouillée qui manifeste une désaffection profonde pour les « vanités » de ce monde. Quelquefois au contraire, il s'étale à la hauteur de la position sociale. Les maisons sont tendues de noir, à l'extérieur comme à l'intérieur, et le convoi funéraire, environné de torches et de cierges, regroupe - outre la famille - le clergé de la paroisse, les religieux des couvents, les enfants des hôpitaux et les notables de la cité. Rien de tel bien sûr chez les déclassés, prestement portés en terre. Comme le neveu de Rameau, ils sont « cousus dans une serpillière» ou enveloppés dans un simple drap de toile, portés sur un brancard puis jetés dans une fosse ( 715 ). Quant aux exclus - les protestants principalement, peu nombreux à Lyon - leur culte, officiellement, est interdit depuis la révocation de l'Edit de Nantes. Leur mise en terre se fait de nuit, à l’Hôtel-Dieu de façon confidentielle et quasi clandestine.

Ainsi, si l’on met de côté les nécessiteux et les minorités religieuses, la mort lyonnaise reste un phénomène fortement socialisé. Non seulement amis et voisins se pressent autour du lit du mourant, une fois le décès survenu, mais encore ils participent activement à la veillée mortuaire, à la toilette du mort, à sa mise en bière et à son ensevelissement. Les funérailles ne constituent donc pas seulement une péripétie individuelle et familiale. Elles composent aussi un évènement collectif qui renouvelle la solidarité entre voisins. En dépit d'un changement sensible d'attitude qui se traduit par un rejet progressif des morts hors du monde des vivants, par un reserrement de la famille sur elle-même et par un cérémonial plus austère, mourir demeure encore, à la fin du siècle, une affaire collective. La mort « intimisée » et « escamotée » des siècles suivants n'est pas encore parvenue à s'imposer.

La naissance ou la mort d’un voisin, on l’a souligné, laisse rarement les survivants indifférents. Bien que les archives judiciaires contiennent peu d’indications, les indices concordent et montrent que les habitants du quartier vivent ces instants avec intensité. Reste qu’il existe d’autres formes de solidarité qui renforcent, à leur manière, le sentiment collectif : ce sont les unions entre voisins dont il s’agit à présent d’évaluer l’importance.

Notes
685.

() Garden (M.), op. cit., p. 145.

686.

() Gutton (J.-P.), Naissance du vieillard, op. cit., p. 145.

687.

() Ibid. p. 145

688.

() Arch. dép. Rhône, BP 3533, 18 novembre 1789.

689.

() Au XVIIIème siècle, les témoignages portés sur la mort d’autrui suscitent des commentaires contrastés. Buffon, par exemple, se dit choqué par « l’indifférence » et l’insensibilité de ses contemporains Cf. l’extrait de son Histoire de l’Homme. De la vieillesse et de la mort, cité par Favre (R.), op. cit., p. 24. D’autres auteurs, au contraire, évoquent le drame de la séparation avec émotion. Rousseau, dans ses Confessions, op. cit., pp. 8-9, se souvient du chagrin ressenti par son père à la disparition de son épouse : « Je n’ai pas su comment mon père supporta cette perte, mais je sais qu’il ne s’en consola jamais….Quand il me disait : »Jean-Jacques, parlons de ta mère », je lui disais : « Hé bien ! mon père, nous allons donc pleurer », et ce mot seul lui tirait des larmes. « Ah ! disait-il en gémissant, rends-la moi, console-moi d’elle, remplis le vide qu’elle a laissé dans mon âme. …. Quarante ans après l’avoir perdue, il est mort dans les bras d’une seconde femme, mais le nom de la première à la bouche, et son image au fond du cœur ». Même tristesse chez la mère de Marmontel qui apprend la mort de son époux avec « désespoir », « tendant les bras avec des cris qui percent et déchirent le cœur », Marmontel (J.-F.), Mémoires, Mercure de France, 1999, 585 pages, pp. 62-63.

690.

() C’est du moins ce qui ressort de certains témoignages contenus dans les archives criminelles. Un compte rendu daté du 23 janvier 1782 décrit en ces termes le désarroi de la femme de Claude Mondésert, un cabaretier qui vient de mettre fin à ses jours en se précipitant dans le puits de l’immeuble : « nous nous sommes rendus au domicile du sieur Mondésert, rue Ferrandière….au rez-de-chaussée, dans un cabaret….nous y avons trouvé une quantité de personnes assemblées….notamment Elisabeth Rivat, femme dudit Mondésert, laquelle nous a répété en pleurant amèrement….que son mari était attaqué depuis quelques jours d’une maladie qui lui donnait un violent frisson » Arch. dép. Rhône, BP 3477, 23 janvier 1782.

691.

() Arch. dép. Rhône, BP 3469, 16 février 1781.

692.

() Arch. dép. Rhône, BP 3462, 22 avril 1780.

693.

() Le Roy Ladurie (E.), Montaillou, village occitan, op. cit., pp. 311-312

694.

() Sévigné (Marquise de), Correspondances, La Pléiade, 1972, 1429 pages, T.I, pp. 324-326, Lettre du 19 août 1671.

695.

() Arch. dép. Rhône, BP 3487, 3 août 1783.

696.

() Voir, à ce propos, les réflexions d’Arlette Farge in La vie Fragile, op. cit. pp. 59-65.

697.

() Ariès (Ph.), Histoire des populations françaises et de leurs attitudes devant la vie depuis le XVIIIème siècle, Le Seuil, Edit. 1971, 414 pages. Chaunu, (P.), La mort à Paris, XVIème, XVIIème et XVIIIème siècles, op. cit. Lebrun (F.), Les hommes et la mort en Anjou aux XVIIème et XVIIIème siècles. Essai démographique de psychologie historique, Mouton, 1971, 562 pages. Vovelle (M.), Mourir autrefois, Attitudes devant la mort aux XVIIème et XVIIIème siècles, Archives Gallimard/Julliard 1974, 250 pages. Vovelle (M.), Piété baroque et déchristianisation en Provence au XVIIIème siècle d’après les clauses des testaments, Plon, 1973, 701 pages ou encore Vovelle (M.), L’heure du grand passage. Chronique de la mort, Gallimard, 1993, 160 pages.

698.

() Poidebard (W.), op. cit., Lettre du 15 avril 1719.

699.

() Arch. dép. Rhône, BP 3515, 28 octobre 1787.

700.

() Chaunu (P.), La civilisation de l’Europe des Lumières, Flammarion, 1982, 424 pages, p. 130.

701.

() Van Gennep (A.), op. cit., p. 571.

702.

() Arch. dép. Rhône, 11G 301, 23 novembre 1776.

703.

() Van Gennep (A.), op. cit. p. 574.

704.

() Arch. dép. Rhône, BP 3537, 30 novembre 1790.

705.

() Arch. dép. Rhône, BP 3462, 23 février 1780.

706.

() Arch. dép. Rhône, BP 3471, 3 avril 1781.

707.

() Cf p. 293.

708.

() Arch. dép. Rhône, BP 3471, 3 avril 1781.

709.

() Arch. dép. Rhône, BP 3471, 6 avril 1781

710.

() Arch. dép. Rhône, BP 30, novembre 1790.

711.

() Arch. dép. Rhône, BP 3523, 29 juin 1788.

712.

() Slimani (S.), Vivre et mourir à Lyon et en Beaujolais d’après les testaments du XVIIIème siècle, mémoire de maîtrise sous la direction de F. Bayard, 1996, 165 pages, Centre Pierre Léon, p. 86.

713.

() Ibid., p. 95 et suivantes.

714.

() Au décès de sa femme, le sieur Salmon organise un repas. Un fois ce dernier achevé, « les convives sortirent….et, en descendant l’escalier, ….ils vomissent ce qu’ils ont mangé, tant ils sont ivres, les murs sont encore teints de leurs ordures » Arch. dép. Rhône, B.P. 3503, 12 novembre 1785.

715.

() Diderot (D.), Le neveu de Rameau, Flammarion, 1983, 249 pages, p. 63