b. dénouement et dynamique

Comment rendre compte de l’essence du dénouement ? Comment comprendre sa relation à l’intrigue et au nœud ? Comment concevoir le dénouement à la fois comme un processus et comme la fin d’un processus ?

V. Sternberg (1999), p. 67, définit deux types de dénouement :

‘“<le dénouement externe> vient de l’extérieur, d’une sphère et d’une logique qui n’appartiennent pas à l’intrigue. (…) Un événement vient donc annuler certaines données de l’intrigue qui, si elles restaient valides, empêcheraient la résolution du conflit. Si Valère était jusqu’à la fin de la pièce un jeune homme désargenté, rien ne laisserait espérer un mariage avec Élise ; or cette donnée, qui était au cœur du nœud de l’intrigue, est annulée par l’arrivée d’Anselme, qui reconnaît le jeune homme comme son fils. <Le dénouement interne vient de l’>évolution de l’état d’esprit d’un personnage, ce changement d’humeur ou d’avis permettant de ‘dissoudre’ un nœud d’opposition”.’

Or cette proposition, qui définit des modalités de dénouement (événement contre changement d’opinion) pose clairement la question du rapport entre dénouement et obstacle, dénouement et nœud d’opposition, question centrale et complexe.

Dans le premier cas, celui du dénouement externe, on sent bien qu’il y a une difficulté fondamentale : le fait qu’Anselme reconnaisse Valère pour son fils est-il le dénouement ? Ce n’est pas si simple. Ce cas, très fréquent dans la comédie classique, renvoie à un modèle d’obstacle qui se schématise ainsi :

Mais les deux obstacles ne sont pas sur le même plan : l’obstacle n° 2 est la cause de l’obstacle n° 1. Peut-être aussi peut-on voir entre les deux obstacles un rapport d’inclusion : l’obstacle objectif (le manque d’argent) est inclus dans un obstacle-personnage (le père avare). Deux situations se produisent alors : soit l’accord du père est donné au préalable, et le problème financier est simplement une condition de réalisation ; dans ce cas, le fait pour le jeune homme de devenir riche (son changement de fortune au sens littéral!) équivaut à un dénouement ; soit l’accord conditionnel n’a pas été donné, et la résolution du problème financier est nécessaire sans être suffisante : elle n’offre que la possibilité d’un dénouement qui reste à accomplir, qui consiste à obtenir de surcroît l’autorisation du père récalcitrant. D’un point de vue théorique, les deux situations peuvent se schématiser ainsi :

Dans les comédies qui fonctionnent par système d’obstacles, il faut veiller à déterminer ce que chaque obstacle recèle de potentialité de dénouement. De fait, tout obstacle a deux dimensions possibles : l’une, séquentielle, correspond à une chaîne d’actions et de réactions ; l’autre, structurelle, renvoie à la dynamique globale.

Dans les comédies qui présentent un ensemble ininterrompu de séquences de type action / réaction, ou qui sont menacées par l’aboutissement du projet d’un personnage-négatif, le dénouement s’apparente à une interruption. Nous retrouvons alors la même situation que pour l’obstacle : soit l’interruption est une étape antérieure au dénouement, soit elle constitue le dénouement. Cela dépend de son impact par rapport au niveau global. Le dénouement est ce qui permet de répondre à la question centrale, selon le modèle proposé par A. Viala (cf. supra p. 126). Il a une double fonction dynamique : il agit sur ce qui précède et il fait émerger ce qui suit, c’est-à-dire la situation finale.