2. dénouement et espace textuel

G. Conesa (1991) n’évoque pas de séquence de dénouement. À un niveau inférieur, celui de la scène, l’expression “scène de dénouement”, qui pourrait servir de pendant à “scène d’exposition”, n’est, elle non plus, pratiquement pas attestée chez les théâtro­logues. Le modèle d’organisation, décrit ci-dessus p. 139, paraît inadapté pour rendre compte de la structuration de l’espace de fin.

Qu’est-ce qui dénoue ? Les réponse sont multiples et portent en général sur le contenu : c’est un événement, un changement d’avis du personnage, une reconnaissance… De telles réponses, intéressantes, évacuent le problème principal. Puisque nous sommes au théâtre, le dénouement doit forcément s’inscrire dans une didascalie ou dans une réplique de person­nage  290 .

Ce constat nous amène donc à adopter une méthode d’analyse particulière. Pour décrire la dynamique théâtrale, nous avions adopté le postulat qu’il était possible de partir de l’espace prédéterminé par l’écrivain pour repérer, dans le rapport entre les scènes, dans la composi­tion de ces dernières en séquences, un fonctionnement. L’espace de fin nous conduit à inverser les choses, c’est-à-dire à partir du fonctionnement pour aboutir à l’espace textuel.

Le dénouement, inscrit dans une ou plusieurs répliques, constitue ce que l’on peut appeler une micro-séquence de dénouement. Il est évident que cette micro-séquence est rattachée à d’autres micro-séquences qui la précèdent et/ou la suivent. Si le lien existe entre les micro-séquences, lien de cause à effet, lien chronologique, il y a là constitution d’une séquence. À l’intérieur de cette séquence, que nous nommerons “séquence de dénouement”, on peut noter une organisation, une direction, un sens.

On peut imaginer que la micro-séquence de dénouement occupe une place particulière dans la séquence, qu’elle en constitue la conclusion ou bien une acmé avant par exemple un bilan  291 .

Cependant, dans tous les cas, ce mode de fragmentation, dont l’origine est un fonctionne­ment recomposé, reconstitué, entre en tension avec un découpage de l’espace textuel prédéter­miné, celui de la scène. La séquence de dénouement est-elle superposable à la scène  292  ?

Deux situations se produisent. Soit la séquence est superposable à une scène : il est possible alors de parler de scène de dénouement. La frontière de la séquence est alors aisée à repérer puisqu’elle est liée au changement de scène. Soit ce n’est pas le cas : nous nous trouvons alors dans une configuration de scène hétérogène où il s’agit de chercher, à l’intérieur de la scène, la séquence de dénouement. La scène ne peut pas être proprement appelée scène de dénouement.

Il est possible d’imaginer que la séquence de dénouement soit précédée à l’intérieur de la scène d’une portion de séquence ou d’une séquence qui montre l’élimination des obstacles ou la crise (méprise, quiproquo, exacerbation du conflit…).

Dans tous les cas, la question posée est celle de l’appartenance à une macro-séquence de fin dont il est possible de présenter un modèle théorique.

Notes
290.

La situation où le dénouement est repérable dans une réplique est certainement plus fréquente que celle où il se trouve dans une didascalie.

291.

D’autres modèles théoriques sont envisageables. Seul le contact avec les œuvres rend compte de la variété et du nombre de potentialités.

292.

C’est ainsi que la séquence d’exposition peut tendre à recouvrir la scène d’exposition. C’est l’exemple parfait de l’adéquation entre un espace textuel prédéterminé et un espace fonctionnel reconstituable.