CHAPITRE 4 : Scène ou séquence ? À la recherche de l’unité dramaturgique
ou le préjugé vaincu ?

La pièce en un acte ne peut s’appuyer sur les ruptures et délimitations préétablies et manifestes que constituent les actes, ni sur les pauses et les respirations qui les séparent. Le rythme général naît donc d’autres effets et d’autres choix dramaturgiques. On peut aborder les pièces en un acte à partir de deux hypothèses contradictoires. Soit l’on fait l’hypothèse qu’elles sont bâties sur un mouvement unique dont elles constituent en quelque sorte la ligne mélodique régulière. Soit l’on suppose qu’elles sécrètent leurs propres ruptures et leurs propres silences. Il nous faut alors poser comme préalable que Marivaux, loin de considérer la scène comme une unité absolue  493 , l’intègre dans des séquences repérables, qui obéissent à des logiques de construction particulières. La scène, définie par le nombre de personnages qui s’y trouvent présents (monologues, dilogues, trilogues, polylogues), se conçoit alors comme un accord dans la partition, architecture complexe qui laisse la place ultime à la séquence de fin.

Notes
493.

H. Coulet (1992) précise un point intéressant : “La répartition en scènes n’est pas la même selon les éditions, pour La Double Inconstance, Le Prince travesti, La Fausse Suivante : Marivaux répugne à un découpage trop poussé ; le fait que, dans la copie autographe d’Annibal, certaines scènes s’achèvent sur une virgule (comme de nombreuses répliques à l’intérieur des scènes), confirme ce goût pour la continuité et l’enchaînement du dialogue…” (p. 260).