a. les pièces qui s’achèvent par un mariage

(i). blocage avant la déclaration

Le Legs, L’Épreuve et Le Préjugé vaincu ont cette configuration. Les trois œuvres sont tout entières construites sur un palier du parcours amoureux. La rencontre, la naissance de l’amour ont eu lieu hors scène. Il ne reste plus qu’à dire. La question qui se pose est donc : qu’est-ce qui crée la dynamique dramaturgique d’une pièce à la thématique exclusivement centrée sur l’amour et dont le parcours amoureux est immobilisé ?

Dans ces trois pièces, c’est la mise en place d’un parcours amoureux fantôme qui enclenche l’action. Il entretient avec le parcours amoureux réel un jeu contradictoire : il l’oblige à se dévoiler et l’en empêche  546 . Le nouement va être constitué par le développement de ces parcours contradictoires qui jouent leur propre partition. Du coup, dans les trois comédies, la scène-matrice est le duo qui scande le déroulement de la pièce.

Le nouement prend son essor jusqu’au moment où il y a menace d’aboutissement du parcours fantôme et constitution d’un faux dénouement (Le Legs et L’Épreuve). Il aboutit à un nœud dans Le Préjugé vaincu, puisque les parcours y forment un réseau de fils qui bloquent l’action  547 .

La question devient alors double : comment empêcher le faux dénouement de se réaliser ? Comment permettre à l’étape de la déclaration de se développer enfin ?

En outre, le rapport entre faux et vrai dénouement est posé. Le faux dénouement doit-il être préalablement annulé ? Ou le vrai dénouement annule-t-il ipso facto le faux dénouement  548  ?

Notes
546.

J. K. Sanaker (1987) appelle cette dynamique particulière “un jeu dont les mouvements se présentent comme ceux d’un ballet ou d’une partie d’escrime” (p. 20).

547.

On peut reprendre à J. K. Sanaker (1987) les expressions de “projet propulseur” et de “projet retardateur” (p. 19).

548.

Cette question est notamment posée par J. Jouanna (2002) à propos de la fin du Philoctète de Sophocle.