III. Les pièces à substitution (Type III : Le Dénouement imprévu, Les Sincères, La Femme fidèle)

Les pièces à substitution sont celles qui proposent un modèle en quelque sorte inversé par rapport aux pièces à blocage. Nous avons vu en effet que ces dernières pouvaient se schématiser ainsi :

Or les trois pièces de cette série, dite type III, reposent sur la structure suivante :

La situation initiale, à savoir le mariage prévu au départ, n’aboutit pas, mais c’est une autre situation présentée ultérieurement qui va à son terme. Le premier projet, certes, porte en lui-même les germes de son échec car il n’est pas fondé sur un amour réel et réciproque. Dans Le Dénouement imprévu, Mademoiselle Argante est lasse de Dorante qu’elle connaît depuis quatre ans. La Marquise, la femme fidèle de la pièce homonyme, a accepté d’épouser Dorante, qui l’aime, par recon­nais­sance pour sa sollicitude et pour complaire à sa mère. Quant à la Marquise des Sincères, son amour pour Ergaste ne survivra pas aux outrages que la sincérité fait subir à sa coquetterie.

Un événement, une rencontre, un retour de flamme balaient ce projet de mariage mal bâti et (ré)instaurent une autre histoire d’amour. On ne s’étonnera donc pas de retrouver des dénouements par déclaration, comme dans le type I, mais aussi par reconnaissance, puisque les amoureux de La Femme fidèle et du Dénouement imprévu se sont déguisés pour éprouver la solidité du projet initial. À ces formes déjà connues de dénouements, s’ajoute la gestion de leurs conséquences directes, à savoir l’annulation du projet 1.

Si ces modèles de construction et de dénouement sont facilement repérables, ils ne nuisent pas à l’originalité de chacune de ces pièces, qui sont à chaque fois des explorations thématiques et structurelles. Le fait que l’amoureux, dans La Femme fidèle, soit marié et ait vécu des aventures romanesques renouvelle bien sûr sensiblement la scène de dénouement. L’extrême concentration de la scène de dénouement du Dénouement imprévu condense en une seule scène finale l’intégralité du parcours amoureux : rencontre, surprise de l’amour, déclara­tion, demande en mariage. Dans Les Sincères, la conciliation entre langage amoureux et impératif de sincérité conduit à un renouvellement comique de la scène de déclaration. En outre, cette pièce, qui met en jeu le seul quatuor du corpus, se doit de proposer un double dénouement en forme de double inconstance.

Il nous faut donc observer comment La Femme fidèle et Le Dénouement imprévu se trouvent dans une sorte d’entre-deux entre le type I et le type II analysés ci-dessus, c’est-à-dire comment ils utilisent à la fois un dénouement par révélation (type II) et par déclaration (type I). Puis nous envisagerons la façon dont le thème de la sincérité influe sur une déclaration d’un type particulier dans Les Sincères.