b. le dénouement de Félicie

La révélation, pour Félicie, naît de l’expérience vécue de l’enlèvement  684 . Son appel au secours constitue le dénouage. La Fée n’a plus qu’à procéder à l’annulation du parcours fantôme. La dernière scène commence donc par une formule magique, dont les derniers mots “effacez-vous de son cœur, et disparaissez” rendent compte de cette annulation confirmée par la longue didascalie. La pièce interne s’accomplit dans l’annulation : Lucidor fuit, le danger est écarté.

Le dénouement au sens strict est dans l’injonction magique de la Fée. La micro-séquence d’achèvement permet à la pièce de revenir au point de départ. C’est comme si l’annulation produisait une soudure entre le début et la fin de la pièce, comme si l’aventure de Félicie n’était au fond qu’un cauchemar sans réalité. L’emploi du préfixe re‑ (“je vous retrouve”, “qu’il est bon de me revoir entre vos bras”) insiste sur la reproduction du même. Il ne s’agit pas pour autant d’un retour au point de départ, mais d’une épreuve qui conduit la pièce sur la thématique de l’éducation. La Fée devient une figure maternante, alliant protection et confiance, qui a laissé sa protégée mener une expérience dangereuse sans jamais la laisser totalement livrée à elle-même. Par une sorte d’auto-citation, Marivaux donne l’image paradoxale d’un mariage final (mais sans homme) : la réconciliation générale entre Félicie et les fées passe par des attouchements proches de ceux des amoureux de la fin des pièces à mariage (“embrasse”, “caresse”, “…me revoir entre vos bras”). Grandie par cette épreuve initiatique, désormais pleinement en accord avec les valeurs inculquées, dont la Modestie et Diane sont des représentantes allégoriques majeures, Félicie se trouve dotée des qualités qui la préparent à l’âge adulte. La Fée annule l’ensemble de la pièce interne avec une rapidité et une instantanéité que justifie le recours à la magie. Mais on verra que cette fin éclair est aussi l’apanage des autres pièces, pourtant sans magie.

Notes
684.

C’est cette expérience qui explique le revirement de Félicie. Nous ne pensons donc pas, comme S. Dervaux (1996), que “la décision de Félicie échappe à toute nécessité” (p. 114).