6. les mots de la fin

Dans un chapitre intitulé “L’Accentuation de la fin”, G. Larroux (1995) s’intéresse à ce qu’il nomme les mots de la fin :

‘“Il y a une accentuation ‘naturelle’ du mot de la fin qui tient au fait qu’il est le dernier et qu’il occupe de ce fait une position stratégique, d’ultime contact et de rupture avec le lecteur” (p. 85).’

On peut penser en effet que le lecteur entrevoit le blanc de page final en même temps qu’il lit les dernières phrases et qu’il accorde de fait aux derniers mots de l’œuvre une attention toute spéciale.

Qu’en est-il au théâtre ? Le problème essentiel de transposition du modèle romanesque, sur lequel a réfléchi G. Larroux, au genre dramatique réside dans la délimitation du matériau textuel. Comment circonscrire les mots de la fin d’une pièce de théâtre ? Lorsqu’on a affaire à une tirade, c’est sans doute la dernière phrase qui attire plus particulièrement l’attention. C’est l’aboutissement du discours, la montée paroxystique vers le silence, qui suppose l’investisse­ment du personnage et, évidemment, celui de l’auteur. Lorsqu’il y a réplique courte, est-ce la dernière phrase ou la réplique entière qu’il faut considérer comme le corpus des mots de la fin  768  ? La question est ardue car elle rappelle qu’au théâtre un énoncé n’existe pas en tant que tel. Il est rattaché très fortement à son système d’énonciation. Il y a certes des traits qui le rapprochent de la dernière phrase de roman, mais il doit spécifiquement conserver une efficacité dramatique. En outre, il est proféré par un personnage précis et, tout en se disant, il dit encore quelque chose de ce locuteur ultime.

Notes
768.

La délimitation en séquences rend les choses encore plus complexes. Les mots de la fin peuvent appartenir à plusieurs micro-séquences ; ils peuvent se rattacher à la conclusion, à l’achèvement. Ils peuvent même représenter le dénouement. Ils relèvent donc plutôt de l’espace textuel, même si, du fait de leur place, ils ont un fonctionnement particulier.