a. le locuteur des mots de la fin

La dernière réplique est prononcée par un valet ou par un personnage principal, catégorie englobante qu’il conviendra d’affiner.

(i). un valet

Dans sept pièces sur vingt-et-une, c’est le valet qui a le dernier mot. Dans Le Père prudent et équitable, il a appartenu à Démocrite de dénouer ; mais c’est à Crispin qu’est dévolue la conclusion. La structure globale de la pièce, révélée par son titre et son sous-titre, est donc mise en abyme.

Dans les autres pièces, la partition des rôles est beaucoup moins motivée. Globalement, les valets sont à l’honneur. Lépine conclut Le Legs, Pasquin la Joie imprévue, Frontin Les Sincères, Lépine Le Préjugé vaincu, Colas La Femme fidèle. Dans La Méprise, c’est une réplique de Lisette qui clôt la pièce. Dans tous ces cas, on a le sentiment qu’il y a respect d’un code en dehors de toute justification structurelle. La parole donnée aux valets crée une cadence mineure après la cadence majeure jouée par les maîtres.

C’est sans doute aussi un moyen de rappeler à la toute fin le genre de la comédie, défini entre autres choses par la présence de valets qui en sont les représentants habituels.

Les répliques des valets ramènent le bilan et les projets au niveau de langage de person­nage secondaire. Et parfois, dans une très grande labilité, le bilan réfère à ce qui vient juste de se passer, comme si pour les valets la pièce était encore en mouvement. Ainsi Frontin déclare à Lisette :

‘“Voilà mon transport passé” (Les Sincères), ’

alors que deux répliques plus tôt, il établissait un autre bilan :

‘“Enfin nous voilà débarrassés l’un de l’autre. J’ai envie de t’embrasser de joie”.’

Quand les valets envisagent le futur, celui-ci concerne des activités susceptibles de les intéresser. Parmi elles, on trouve le mariage (Le Père prudent et équitable, La Méprise, Le Legs, Le Préjugé vaincu) ou le vin (La Femme fidèle, La Joie imprévue), qui renvoie à un autre trait caractéristique du valet marivaudien. C’est donc un recentrage qui s’opère autour des personnages censés définir en eux-mêmes la qualification générique de la comédie.

Le personnage secondaire n’est pas détenteur d’une force performative. Il n’est pas non plus en charge de la responsabilité de la structure. En revanche, sa réplique peut comporter des termes qui font référence indirectement à cette structure. Ainsi s’affirme l’allusion à un début : “Commençons” (La Femme fidèle), “dire des nouvelles” (La Joie imprévue), “des nouvelles” (La Méprise). Mais, étrangment, les valets sont en revanche exclus, malgré la place finale qui est laissée à leur discours, du fonctionnement de la fin. L’exception réside une fois encore dans Les Sincères, puisque le salut de Frontin à Lisette rappelle le salut final de toute la troupe au public.