2. la micro-séquence de dénouement

En tant que séquence textuelle, le dénouement des pièces en un acte s’intègre à une séquence de fin en général tardive et bien délimitée.

Quelques pièces du corpus échappent à cette règle de quantité. Le Père prudent et équitable et Arlequin poli par l’amour octroient à l’espace de fin une place assez grande par rapport à l’ensemble. On peut émettre l’hypothèse qu’il s’agit là d’un défaut de débutant. Mais c’est une tendance qu’on retrouve ponctuellement, et qu’on peut justifier sur le plan dramaturgique. Ainsi Les Sincères, L’Héritier de village et Le Triomphe de Plutus laissent toute sa place au développement du faux dénouement. Dans Les Sincères, le passage du faux au vrai dénouement demande du temps car la vraisemblance et les convenances exigent qu’on n’abandonne pas un amant pour un autre sans préparation. La Joie imprévue se termine par une cascade de dénouements, car il est régulier que chaque intrigue y ait son dénouement. Les entorses à la règle qui cantonne la micro-séquence de dénouement à la dernière ou à l’avant-dernière scène sont donc motivées par la structure de la pièce ou la vraisemblance du traitement du temps.

Les micro-séquences de dénouement sont très courtes et facilement repérables. À deux exceptions près, elles montrent toutes quelque chose qui s’apparente à la performativité du langage. Le dénouement-déclaration et le dénouement-autorisation renvoient à la posture d’un personnage qui, doté d’une autorité, peut conclure la pièce. Le dénouement-départ traduit la tentation, pour un personnage féminin en l’occurrence, de quitter la scène en laissant derrière lui un champ de bataille où s’est produit quelque chose d’irréparable. La Femme fidèle et La Méprise intègrent le geste dans la micro-séquence : dans La Méprise c’est le fait de se démasquer qui produit le dénouement qu’atteste la réplique d’Ergaste. Le geste produit la reconnaissance et, par là même, le dénouement.

Les choix de Marivaux sont donc relativement limités. Le dénouement est une parole (ou un geste) qui a valeur d’acte. Après cette micro-séquence, il ne reste plus de place que pour l’achèvement et la conclusion. Nous avons montré que l’achèvement était fortement lié au dénouement. Il en représente la conséquence. La conclusion, en revanche, se situe sur un autre plan. Mettant en jeu des personnages différents, elle se place en surplomb par rapport au dénouement. Elle est au niveau de la pièce, non plus de la scène.

La séquence de fin est donc assez bien codifiée dans les pièces courtes. Chaque étape est importante et prend sa place dans l’économie de la pièce.