3ème Partie : Le mélodrame et la critique : une histoire passionnée

Chapitre 1. Réception du mélodrame dans la critique contemporaine des films: le point de vue de leurs artisans

Les films soumis à notre analyse apparaissent conformes à la tradition mélodramatique classique dont ils apparaissent comme les dignes héritiers, non seulement sur le plan esthétique, mais aussi en ce qui concerne la réception dont ils sont l’objet. Une forme de critique négative visant à discréditer le mélodrame a longtemps prévalu, opérante dans le cas des films étudiés. Dès son apparition sur les scènes théâtrales, le mélodrame a été jugé de façon négative. Julia Przybos synthétise sur ce point les réflexions avancées dans notre première partie : ‘«’ ‘ Sur ce point, les critiques sont tranchants : le mélodrame est un genre bâtard, un genre qui se moque du goût et du bon sens. On lui reproche de pratiquer le mélange des genres, considéré comme blâmable, sinon vicieux’ 480 . »

Ce point de vue trouve son prolongement dans le domaine cinématographique, puisque dans ce contexte, la critique ne s’est pas montrée plus favorable. Selon Silvia Oroz, le mélodrame cinématographique a été interprété en fonction de catégories d’analyse directement héritées du XIXe siècle, ce qui contribue à expliquer pourquoi la critique cinématographique s’est montrée sans pitié dans ses jugements envers le mélodrame :

‘La interpretación del género melodramático fue caracterizada por un análisis valorativo con los patrones estéticos del siglo XIX, sin considerar su relación con el público ni la revolución que significó el surgimiento del folletín. La exclusión de dichos elementos fue la determinante del rechazo y del prejuicio con que fue visto el género a lo largo de todas sus mutaciones históricas. El melodrama cinematográfico latinoamericano no escapó a esa visión 481 .’

L’utilisation du terme de ‘«’ ‘ préjugé ’» souligne à quel point la critique cinématographique a peiné avant de se débarrasser de traditions anciennes dans sa façon d’aborder le mélodrame. Afin de montrer comment s’est manifestée cette vision négative du genre, nous nous pencherons sur la façon dont les films étaient perçus par la critique contemporaine de leur sortie : si celle-ci ne recourait pas à des critères esthétiques ou spécifiquement cinématographiques pour juger les œuvres, la façon dont elle les abordait semble caractéristique du peu de sérieux qui leur était accordé. Par ailleurs, le fait de se pencher sur la façon dont les films étaient jugés par leurs contemporains permet de mettre au jour des stratégies commerciales plus profondes entre les deux pays, orientant fortement la manière de considérer les productions.

Notes
480.

Julia Przybos, op. cit., p. 19.

481.

Silvia Oroz, op. cit., p. 21.