2. Approches linguistiques des discours sur les odeurs, les goûts et le vin

Nous avons souligné en première partie que l’odeur pouvait être envisagée comme un phénomène physique moléculaire ou comme une sensation perçue par un sujet. En conséquence, l’odeur peut être dénommée soit en termes chimiques (désignant la molécule odorante) soit par l’explicitation de la sensation du sujet. Ce deuxième chapitre fera le bilan des recherches récentes concernant la verbalisation autrement dit le mode d’analyse cognitive et linguistique des odeurs, des goûts et du vin.

D’un point de vue cognitif, nous énumèrerons les étapes successives relatives à la connaissance des odeurs. Puis nous ferons, dans une approche linguistique et plus spécifique de la dégustation des vins, un “historique” des articles parus ces dernières années.

Lorsque Roudnitska (1994) définit l’odeur comme un phénomène de conscience, il présuppose l’idée d’une sensation suivie d’une perception. Si sensation et perception sont parfois assimilées en raison de leur quasi-simultanéité 46 , Roudnitska distingue sensation, perception et jugement :

‘« Percevoir un objet c’est constater qu’il est et juger ce qu’il est. La perception est bien un jugement et c’est pourquoi si tout le monde sent, chacun perçoit plus ou moins bien. Même s’il porte sur des sensations, le jugement n’est pas lui-même une sensation, mais le rapport que nous établissons entre elles. […]. Ce qui explique que deux observateurs puissent éprouver des sensations très analogues et porter cependant sur elles des jugements différents » (1994, 17). ’

Le jugement peut se situer dès le stade préverbal, que l’odeur perçue soit associée ou pas à un nom.

Notes
46.

... et par assimilation de la cause et de l’effet. Ainsi, le Petit Robert (1993) définit sensation à la fois comme un « phénomène psychophysiologique par lequel une stimulation externe ou interne a un effet modificateur spécifique sur l’être vivant et conscient » et comme « état ou changement d’état ainsi provoqué, à prédominance affective (plaisir, douleur) ou représentative (perception) ».

La perception, quant à elle, est la « fonction par laquelle l’esprit se représente les objets », mais aussi l’« acte par lequel s’exerce cette fonction » et « son résultat ». Fonction et acte ont une valeur active qui n’est cependant plus la même dans la définition littérale de la perception de quelque chose : « prise de conscience, sensation, intuition », définition qui est rapprochée du terme impression.