3. Originalité du travail
Les trois principales exigences que nous donnons à la nature de notre corpus (concomitance du stimulus et de la parole, choix du mode oral et interactions pluri-locuteurs) le distinguent des corpus des travaux cités précédemment et qui étaient :
- détachés du référent : Coutier, David travaillent sur des corpus dans lesquels ne sont mis en scène ni le vin ni les odeurs ;
- majoritairement écrits : Coutier, David et Lehrer demandent avant tout à leurs sujets une production individuelle et écrite ;
- pas ou peu interactifs, dans la mesure où le consensus n’est pas réalisé par les participants eux-mêmes, mais recherché a posteriori par collation des écrits ou bien obtenu seulement dans un deuxième temps (Lehrer).
Dans l’approche interactionnelle qui sera la nôtre, le choix d’un corpus oral est prépondérant car :
- comme le précise Kerbrat-Orecchioni,
‘« c’est d’abord sous forme orale que se réalise le langage verbal » (1990, 38),’
et que c’est sur l’observation de faits et d’énoncés oraux attestés que pourra être décrit un type de discours spécifique ;
- la constitution d’un modèle d’interaction n’est envisageable qu’à partir de l’analyse d’un tel corpus, sachant que :
‘« la règle d’or est toujours, dans la perspective qui nous occupe ici, de préférer les faits à la théorie », (id. 47).’
De la lecture des événements enregistrés lors des interactions de dégustation, trois axes de recherche se succèderont :
- une analyse descriptive et pragmatique à partir des particularités observables que Gumperz appelle les indices de contextualisation et qu’il définit de la manière suivante :
‘« [l’indice de contextualisation est] une caractéristique de forme linguistique qui intervient dans le signalement des présupposés contextuels » (1989, 29).’
Ces données contextuelles
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actualisées et interprétées à l’intérieur d’une même communauté linguistique (culturelle et sociale)
‘« à partir de la définition de ce qui se passe au moment de l’interaction » (id., 27),’
nous permettront d’articuler les étapes successives de chaque séquence.
- un repérage des éléments jugés pertinents pour leur régularité : récurrences de termes, d’actes de langage et d’échanges qui régissent les interactions de discrimination d’arômes et les interactions de dégustation de vins ;
- un essai de formalisation susceptible de définir un modèle d’interaction propre à la dégustation du vin.
Notes
86.
Les données contextuelles sont analysables parce qu’elles s’actualisent dans l’interaction, à la différence des données extra-contextuelles posées au départ et qui sont plus ou moins mobilisées et pertinentes pour l’analyse (ex. sexe, âge des participants, diplômes, niveau de connaissances et d’entraînement des participants).