2.5.2. Le champ hédonique

Ce champ pourrait regrouper certains des termes appartenant à ce que Peynaud appelle l’imagerie gustative et dont l’expression du plaisir constitue le trait commun. Ce sont en majorité des adjectifs affectifs ? qui, tout en exprimant une propriété de l’objet,

‘« déterminent une réaction émotionnelle du sujet parlant en face de cet objet » (Kerbrat-Orecchioni, 1980, 84),’

et qui sont pour Peynaud et Bouin,

‘« des termes imprécis, mais conventionnels » pour « mettre au point l’image floue [de certaines] sensations plus fines », cherchant par exemple « à définir un équilibre des saveurs ou à décrire en détail un goût ou une odeur, ou donner un jugement » (1996, 192). ’

La définition de ces mots est souvent floue et les frontières du champ auquel ils appartiennent, aussi. L’on y trouve indubitablement les adjectifs “moins conformes” à une description du réel 145 ou plus marginaux puisque certains, par leur caractère fortement subjectif, ne sont pas unanimement cautionnés par les dégustateurs professionnels. Nous ajouterons une fonction distinctive à ces termes en remarquant qu’ils sont attestés à différentes phases de dégustation. Ils ont une “étendue qualifiante” plus large, contrairement à d’autres qualificatifs :

‘acide, amer, âpre, aromatique, astringent, boisé… ’

qui, eux, réfèrent à des phases spécifiques.

Appartiennent à ce champ hédonique,

‘c’est un vin très agréable mais il est beaucoup plus discret après (JJ & Co n°23, 1336) ;’ ‘agressif, magnifique, prometteur, somptueux, superbe…
c’est magnifique ce nez hein y’a une complexité dans ce nez c’est superbe (Vivier 97 n°10, 629) ;’

ou, selon le vin dégusté ou le constituant évalué, ceux comme :

Notes
145.

Kerbrat-Orecchioni évoque l’absence d’« autonomie référentielle » (1980, 149), concept qu’elle emprunte à Milner et qui, pour elle, caractérise l’ensemble des unités subjectives. Malgré la notion elle-même très large de la subjectivité - car « toute unité lexicale est en un sens subjective » (id. 70) - nous dirons seulement pour l’instant que ces unités ne se définissent pas par rapport à un référent stable, mais possèdent une signification qui dépend soit de la situation de l’énonciation, soit, comme ici dans le cas des termes affectifs, du locuteur qui les utilise.