2.3.2. Les cas particuliers d’échanges à plus de deux participants

Les interactions enregistrées comportant toutes plus de deux participants, nous aurons affaire à des échanges souvent plus complexes que ceux que nous venons de décrire :

‘« L’organisation structurale de la conversation […] pose, lorsque le nombre des participants est supérieur à deux, des problèmes infiniment plus complexes que ne le laisse supposer le modèles hiérarchique classique. [Et…] la spécificité des “polylogues” du point de vue de leur structuration tient essentiellement au fait qu’une même intervention peut y être conduite par deux locuteurs ou plus. » (Kerbrat-Orecchioni, 1990, 274).’

De multiples formes d’échanges à plus de deux participants s’ajoutent donc à celles déjà illustrées, entre autres :

‘JP t’es pas d’accord avec la réglisse’
P non
JJ bon ben c’est intéressant (JJ & Co n°20, 779).’ ‘J. pas noix de coco non’ attendez
P non non
P. non non
M. non
P. non non (Oingt n°29, 575).’

Ou, sans qu’il y ait désaccord, des réactions orientées dans une même direction (ici, une isotopie catégorielle) :

M. le brou d’noix
D. ah ben voilà j’pense à la noix

C. c’est oui c’est ça voilà c’est la noisette c’est la noisette
P. ah oui j’pensais la noisette moi j’ai pensé (S.A.V. n°13, 398).

‘JP d’façon on est tous d’accord sur la mandarine
M. non ben
J. sauf P
JP ah bon (Oingt n°25, 56).’

D’après ce qui a été décrit comme une tendance rencontrée à l’intérieur des polylogues, une intervention initiative qui n’est pas clairement et directement adressée à un destinataire peut provoquer une instabilité de la structure de l’interaction. Toutefois, contrairement à ce que André-Larochebouvy constate :

‘« un groupe de cinq se scinde en trois et deux, quatre participants en deux groupes de deux, ou en un groupe de trois plus un témoin à peu près muet ” (1984, 41), ’

et que Kerbrat-Orecchioni admet comme un phénomène “attendu” :

‘« au-delà de trois ou quatre participants, le groupe conversationnel [a] tendance à se scinder en sous-groupes, et la conversation à éclater en sous-conversations » (1990, 87),’

la scission durable n’est pas observée dans nos enregistrements (sauf dans les moments intranscriptibles de digression où l’attention des dégustateurs est moins requise - entre la présentation de deux produits par exemple). Le caractère formel du script oblige en effet les participants à respecter la tâche demandée et donc à rester soudés.