2.4. L’intervention

L’intervention, move en anglais, est considérée comme la plus grande unité monologale « émise (en principe) par un seul locuteur » (Kerbrat-Orecchioni, 1990, 225). Elle correspond à « chaque contribution d’un locuteur à un échange » (Maingueneau, 1996, 52).

2.4.1. Tour de parole et réplique

Le tour de parole et la réplique sont deux notions conceptuellement proches, mais dont l’angle de vue par rapport à l’interaction n’est pas le même. L’intervention ne peut formellement se confondre avec le tour de parole parce qu’« elle ne se définit que par rapport à l’échange » (Kerbrat-Orecchioni, 1990, 225) dans lequel elle s’inscrit : une intervention réactive ne prend son sens que par rapport à l’intervention initiative. Pour André-Larochebouvy, les tours de parole sont :

‘« des épisodes analysables en fonction des participants et dont chacun correspond à l’ensemble des éléments verbaux et gestuels produits par un seul participant sans interruption, du moins sans interruption telle qu’elle aboutirait à la prise de parole par un autre participant » (1984, 64). ’

Elle oppose le tour de parole à la réplique qui, elle, représente :

‘« l’ensemble des éléments verbaux qui constituent un tour de parole » (id.). ’

La réplique semble ainsi fonctionner de façon autonome : une même réplique peut donc apparaître sur plusieurs interventions successives, comme celle de M. :

‘M. c'est-à-dire qu’à l’odeur il est
D. ah bon
M. il est toujours euh
D. le bouquet est pas extra
M. non -fin moi j’trouve hein (S.A.V. n° 16, 1292).’

Elle peut constituer un « élément Janus » (Kerbrat-Orecchioni, 1990, 241 et 253), c’est-à-dire se voir dotée de deux orientations pragmatiques dans le même temps : celui par exemple de réaction à l’intervention précédente et de nouvelle intervention initiative, comme celle de M. qui est à la fois réaction à l’intervention de D. et question (demande de confirmation) à laquelle réagit D. :

‘D. maintenant qu’vous l’avez prononcé moi j’crois qu’c’est la framboise

M. framboise ça’
D. mm (S.A.V. n°12, 274).’

Elle peut, autre forme exemple d’élément Janus, servir à la fois d’évaluation et de nouvelle question lorsque l’observateur invite les participants à s’exprimer après que tous ont senti l’échantillon en énonçant :

‘alors, (S.A.V. n°12, 246).’

Deux répliques pourront être incluses dans une même intervention, comme fréquemment un signifiant (fût de chêne, vanille…) et sa reformulation :

‘fût d’chêne quoi derrière on sent qu’y’a c’qui c’qui est extrait du chêne (S.A.V. n°11, 130),
vanille vanille tu sais les bâtons d’ vanille qu’on met dans les gâteaux d’riz (JJ & Co n°20, 535).’