- La spécialisation des chefs de rubrique.

C’est la division du travail qui règne au sein des rédactions de FHM, M Magazine et Men’s Health. En créant des pôles thématiques dirigés par des chefs de rubriques ou des chefs d’enquêtes, les rédactions ont segmenté la production, en confiant les divers domaines du magazine à des spécialistes. Avec un pôle de 5 journalistes-chefs d’enquête chez FHM, 3 chefs de rubrique chez M Magazine gérant les sujets société-mode et consommation pour le premier, sport et voyage pour le second et santé-forme pour le troisième et seulement deux responsables de rubrique chez Men’s Health ( santé d’une part et mode d’autre part), les rédactions de la nouvelle presse masculine possèdent une organisation très structurée, où chaque membre est confiné dans son domaine ( ce qui engendre des protestations quand un des journalistes doit collaborer à une rubrique qui n’appartient pas à celles qui lui sont rattachées), et où les journalistes paraissent parfois peu informés des décisions prises par le pôle décisionnel.

Le nombre de chefs de rubrique oscille en fonction du mode de production choisi par les rédactions : si FHM en compte 5, c’est parce qu’ils doivent produire 80 % du magazine. En revanche, Men’s Health ne produisant sur le sol français (pour le numéro étudié) que 40 % des pages dont la mode et les pages santé, ce sont ces deux seules rubriques qui comptent un chef de rubrique à Paris et sont aidées d’un chef de rubrique qui intervient dans tous les domaines du magazine 710 . C’est donc, pour ces deux magazines internationaux, le mode de production qui influe sur l’organisation en personnel des rédactions. Le taux de pages produites au sein des rédactions françaises impose des équipes étoffées quand le taux est élevé et plus restreinte quand il est bas, le travail de reprise nécessitant moins de personnel que la production : ainsi FHM est la rédaction au personnel le plus nombreux avec 17 membres permanents contre 11 chez Men’s Health France.

Or, si le taux de production est un des facteurs à l’origine du nombre de personnel dans les rédactions d’origine étrangère, il n’en est pas de même pour les rédactions françaises. En effet, tout en produisant la quasi-totalité du contenu, dont la totalité des textes, M Magazine et Le Magazine de l’Optimum sont les rédactions les moins étoffées. Alors que l’équipe de M Magazine doit produire toutes ses pages, elle n’est composée que de 11 membres, quand Men’s Health compte 11 membres pour moins de la moitié des pages. Quant au Magazine de L’Optimum, il ne compte aucun chef de rubrique, et seulement 6 membres permanents pour produire tout le numéro. Si M Magazine présente un personnel moins nombreux, c’est suite à une restriction budgétaire imposée par le changement de groupe : “ Avant l’équipe était beaucoup plus étoffée. Quand j’ai pris mes fonctions, j’étais rédacteur en chef adjoint. Le rédacteur en chef avait un adjoint, ce qui est quand même très utile. Il y avait une correctrice, deux secrétaires de rédaction à plein temps et deux personnes à plein temps à la maquette quand même. C’était peut-être trop, je dirai, vu le standing de la maison qui, à l’époque, était Edipress, quand on travaillait exclusivement avec les Suisses. Ils voyaient large. Et quand nous avons été accueillis par Excelsior, ils ont diminué le budget d’à peu près 40 %, donc voilà, ils ont commencé à dégraisser l’équipe. Et c’est toujours difficile de faire bien mieux avec bien moins  711 . C’est donc une équipe qui a continué à produire le magazine avec moins de personnel et de moyens, quand L’Optimum est un magazine qui fut produit, au départ, par trois personnes et dont l’équipe s’est agrandie avec le temps. Il en demeure néanmoins qu’entre les rédactions étoffées et les rédactions plus restreintes, c’est l’opposition entre la spécialisation des journalistes dans leur rubrique dans les grandes rédactions et leur polyvalence dans les plus petites qui engendre une hiérarchie rigide chez les premiers et plus souple chez les seconds et dont l’origine se situe dans les budgets mis à la disposition des rédactions pour produire les magazines.

Notes
710.

Enfin, la rédaction s’était attachée les services d’un coordinateur du magazine pendant quelques mois, poste qui fut créé pour l’ancien chef de rubrique en partance vers d’autres aventures médiatiques (la télévision notamment)

711.

Propos tenus par le rédacteur en chef de M Magazine lors de l’entretien du 31 mai 2001.