-Les assistantes de rédaction : un luxe des grands groupes.

Nous avons montré que la polyvalence au sein de la rédaction de L’Optimum impose à la secrétaire de rédaction de s ‘occuper de tâches diverses quand celles des rédactions de M Magazine, FHM et Men’s Health ne s’occupent que de corrections et relecture. FHM est la seule rédaction à compter en son sein deux secrétaires de rédaction à plein temps (là encore avec une hiérarchie entre la secrétaire générale de la rédaction et la secrétaire de rédaction, même si, le travail effectué nous a semblé être le même) tandis que les autres rédactions ne disposent que d’une secrétaire de rédaction qui, comme nous le verrons dans la partie consacrée à la composition sexuée des rédactions, est de sexe féminin.

Mais c’est au niveau du secrétariat général des rédactions que se situent l’opposition entre les groupes aux moyens financiers importants et les petits groupes. Chez L’Optimum, ce sont le rédacteur en chef, la rédactrice en chef adjoint et la secrétaire de rédaction qui tiennent le secrétariat de la rédaction, gèrent les tâches administratives, la logistique interne au magazine, alors que les trois autres rédactions possèdent une assistante de rédaction dont le rôle est de tenir le secrétariat général de la rédaction, gérer le courrier, les fax, la logistique interne (les factures...). Ces assistantes, qui dans certaines rédactions aident à la production du magazine (chez FHM, l’assistante est aussi assistante à la photographie), facilitent la vie quotidienne de la rédaction, celle des journalistes en recherchant par exemple certaines documentations pour eux, alors que chez L’Optimum, ce sont des tâches supplémentaires pour les membres permanents 720 , dont ils feraient volontiers l’économie.

Il apparaît au regard des organigrammes et en liaison avec la dimension du budget de chaque rédaction et du nombre de ses membres permanents, que ce sont les rédactions issues des grands groupes de presse qui, conformément aux lois économiques, disposent de meilleures conditions de travail, contrairement à celles des petits groupes qui, face à des budgets serrés autant en moyens de production qu’en moyens humains, doivent mettre en place une rédaction polyvalente dont le travail s’apparente à de l’artisanat. Les grosses rédactions, en revanche, tissent une organisation rigide et étoffée où chacun tient un rôle qui lui est propre et dispose de moyens techniques de production (un service de documentation, une base de données photographiques, un secrétariat... ) qui facilitent grandement le travail s’apparentant, pour sa part, à une grosse production. Un troisième facteur vient différencier les organisations internes des rédactions : l’internationalisation du magazine influe sur l’organisation interne de la rédaction dans le pays d’édition et ce, diversement en fonction du taux de reprise des versions étrangères. En effet, quand FHM produit 80 % du magazine en France, son organisation interne ( du moins dans la partie rédactionnelle) se veut proche d’une rédaction telle que M Magazine en instaurant des chefs de rubrique pour créer les articles français. En revanche, l’organisation interne de Men’s Health dont la moitié des pages viennent des versions étrangères, de même que la couverture, nécessite uniquement des chefs de rubrique pour les pages rédigées en France, et peu de membres à la rédaction.

Ce sont donc deux logiques économiques qui s’opposent au sein du marché de la presse masculine française et dans laquelle l’origine du groupe et les budgets mis à la disposition des rédactions influent d’une part sur les contenus et leur mode de production et d’autre part sur toute l’organisation des rédactions. En effet, les moyens techniques mis en place pour le travail des rédactions, et à commencer par l’espace lui-même de production, à savoir les murs des rédactions, qui pour nous, ont été les premiers lieux d’observation des différences entre les magazines, sont des indices précieux concernant les diverses organisations internes en matière de travail, mais aussi de pouvoir.

Notes
720.

Pour le rédacteur en chef, il semble que le premier poste à créer serait plutôt celui de chef de service dont le rôle serait de suivre la fabrication et l’évolution des articles, de relancer en cas de stagnation, ce qui pour l’instant est à la charge des quelques membres permanents