-Quand la forme de la signature s’apparente à une marque d’anonymat.

Nous avons repéré dans les 1742 lettres dépouillées, les modes de signature les plus couramment utilisés, entre le prénom, la signature graphique, les diminutifs…

  M Magazine Men's Health FHM -sexo FHM -lune
mode de signature        
prénom 63 (14.1%) 93 (22.4%) 134 (32.1%) 166 (35.7%)
nom+prénom 54 (12.1%) 21 (5%) 13 (3.1%) 43 (9.2%)
signature graphique 137 (30.7%) 97 (23.3%) 32 (7.6%) 70 (15%)
diminutif, pseudo 5 (1.1%) 4 (0.9%) 27 (6.4%) 21 (4.5%)
initiales 6 (1.3%) 12 (2.8%) 10 (2.4%) /
nom 53 (11.8%) 8 (1.9%) / /

Un tiers des lettres envoyées à la presse spécialisée est simplement signé graphiquement. Les lecteurs ayant laissé leur adresse et identité en haut de la lettre, une simple signature vient clore l’écriture, même si 14 % des lettres de M Magazine et 22% chez Men’s Health possèdent un prénom en guise de signature et qu’ils utilisent, conformément au mode de signature classique d’une lettre, l’écriture de leur nom de famille comme signature. C’est le prénom ( il fonctionne comme un code entre adolescents) que choisit, comme mode de signature, une grande partie des épistoliers de FHM, associant régulièrement à leur prénom, une locution porteuse du rapport entretenu avec le magazine et qui rappelle le mode de présentation de soi utilisé dès les premières phrases. Ainsi, les lecteurs signent : «X, boss de la physique», «X, le tunisien fou de FHM», «X, le fidèle», «X, une popstar qui deviendra une star tout court vous verrez», «X, le beau gosse»… et donnent soit des indications identitaires, soit le rapport qu’ils possèdent avec le magazine. Ils utilisent aussi des pseudos, souvent symboliques : Roméo, Rocco, «le pseudo Rocco Black des Ïles»… renforçant ainsi, par cette identité empruntée, leur image d’homme performant ou d’homme romantique et amoureux.

L’usage de ces pseudo, associé aux nombreuses lettres qui ne portent aucune trace de signature (les mails sont nombreux à ne pas porter de signature, les lecteurs ne fournissant que leur adresse mail), aux lettres volontairement anonymes, renforce l’idée de la difficulté éprouvée par de nombreux épistoliers à signer leurs courriers. C’est pourquoi, de nombreux lecteurs se présentent sous une locution identitaire qui s’apparente à un anonymat et qui désigne leur statut social au nom duquel ils écrivent : «un retraité qui vous dit merci», «un travailleur de nuit», «un motard de longue date»… Ils signent aussi de leur condition de lecteur : «un lecteur», de leur condition de lecteur attaché au magazine : «un fidèle», «un fan», «un abonné heureux», «un admirateur de FHM», «un de vos plus grands fans», «ton ami de toujours»,» une fidèle lectrice qui vous vénère», «un lecteur assidu de l’édition allemande», «un lecteur conquis»… mais aussi de lecteur déçu par le magazine : «un lecteur déçu qui vient d’économiser 19 francs», «un futur ex, à vous de voir, lecteur régulier de Men’s Health»… C’est donc par une formule porteuse du degré d’attachement éprouvé pour le magazine que les lecteurs choisissent de conclure leur lettre, soit en s’y présentant sous leur prénom et se plaçant ainsi, à nouveau, dans une communication d’ami à ami, soit sous leur identité complète, marque du respect et de la distance entretenus avec l’interlocuteur, soit sous la forme de locutions porteuses du positionnement par rapport au magazine mais aussi au contenu de la lettre.

Les lecteurs utilisent donc l’écriture de leur adresse, au début de la lettre ou à la fin de celle-ci, pour donner au magazine leur identité entière et ne signent les lettres que par leur prénom, leur nom ou des locutions identitaires et statutaires, porteuses du rapport étroit les liant au magazine. C’est donc des fins de lettres qui oscillent entre remerciements et politesse dans la presse spécialisée et effusions, phrases personnelles pour le magazine, encouragements chez FHM. Mais certains épistoliers accompagnent leur lettre de pièces jointes dont ils font part de la présence à la rédaction dans les post-scriptum qui, outre leur statut de lieu d’énonciation du mode de réponse souhaité et du rapport à la publication que nous avons analysé plus tôt dans l’analyse, sont les lieux de formulation d’indications supplémentaires sur l’objet désiré, la maladie subie.