b) Des magazines informateurs.

37.5% des lettres adressées aux publications demandent une information. Les épistoliers viennent questionner les publications sur le déroulement des rapports sexuels, sur les techniques à employer, sur les modes de transmission des maladies sexuellement transmissibles : «comment attrape-t-on le SIDA ?», «Qu’est-ce que le point G ?», «est-ce que ma petite amie peut tomber enceinte pendant ses règles ?» Ce sont des informations relatives à l’éducation sexuelle et sentimentale que les épistoliers recherchent auprès des magazines. Ce sont aussi des informations plus précises, notamment concernant les médicaments et les modes de traitements médicaux qu’attendent les lecteurs des publications, leur accordant ainsi un statut d’expert en questions médicales : «quelles sont les origines et les solutions d’une épididunite ou de la présence de variocèles ?» ; en se présentant, nous l’avons vu, comme des spécialistes et connaisseurs du mal dont ils sont atteints, les épistoliers renvoient aux magazines une image d’experts attendant une réponse d’experts encore plus renseignés qu’eux-mêmes. C’est ainsi que les épistoliers n’hésitent pas à adresser aux magazines des demandes d’informations sur des sujets qui n’appartiennent pas aux domaines de compétence du magazine ou des questions qui certes rentrent dans le cadre des thèmes traités par les magazines mais dont ceux-ci ne sont pas forcément connaisseurs : un lecteur de Men’s Health a écrit au magazine afin de savoir si le banc de musculation présenté en page 1243 de La Redoute est un banc de musculation digne de ceux présentés dans le magazine. De même, ce lecteur qui écrit à M Magazine afin que ce dernier puisse l’informer de l’identité de l’oiseau entrevu dans son jardin et qu’il décrit dans sa lettre.

Les épistoliers écrivent donc aux magazines pour obtenir des informations aussi bien sur leurs domaines de prédilection, leur conférant ainsi un statut d’experts en ces domaines, que sur des domaines qui leur sont étrangers et sur lesquels ils ne sont en rien spécialisés. Pour l’épistolier, les publications doivent être en mesure de leur fournir les informations les plus diverses, les plus simples comme les plus élaborées et ce, dans les plus courts délais possibles. Ils accordent donc aux publications une connaissance illimitée et investissent ainsi des espoirs dans ces magazines auxquels ces derniers ne peuvent, faute de connaissances sur tous les sujets abordés, répondre. Comment en magazine spécialisé dans la santé-forme peut-il répondre d’une question ornithologique ?

Outre les demandes d’informations pluridisciplinaires et parfois hors du champ de compétence des magazines, ce sont principalement des demandes d’informations, relevant de l’éducation sentimentale et sexuelle (c’est particulièrement le cas chez FHM-sexo dont les scripteurs sont adolescents) et renvoient aux questions posées, au début des années 90 à l’émission de radio Loving Fun. En posant des questions simples et directes, les épistoliers cherchent à obtenir des détails supplémentaires sur un sujet précis, détails qu’ils n’ont pas trouvés dans les articles du magazine, leurs questions étant souvent techniques. Les magazines de la nouvelle presse masculine sont donc informatifs et pratiques, et leur écrire, c’est aussi obtenir d’eux un complément aux informations données dans les pages, mais pour lesquelles les épistoliers recherchent soit une vulgarisation des propos, soit un complément via une question personnelle, d’où les questions telles que «vous avez parlé de médicaments vendus dans les salles de sport pour prendre de la masse musculaire. Est-ce que ces médicaments sont dangereux pour les sportifs de haut niveau, pour les tests anti-dopage ?».

En demandant une information, les épistoliers s’adressent au magazine comme à un spécialiste objectif de la question posée, ils ne leur demandent alors ni leur avis, ni un conseil, seulement une réponse précise à une question qui l’est aussi. En revanche, en utilisant le mode de la confidence pour énoncer leurs questions, tissant ainsi un lien privilégié avec leur interlocuteur qui est fondé sur la confiance et sur l’attachement, les épistoliers demandent aussi aux publications de s’investir dans les réponses ; en requérant les conseils, les avis, l’aide ou le secours du magazine, les lecteurs donnent un poids supplémentaire à la parole de ce dernier en lui demandant d’intervenir directement dans leurs choix, leurs actes et ainsi influer directement sur le cours de leur vie ; c’est donc une marque de confiance supplémentaire que les épistoliers adressent aux publications en leur adressant des demandes d’implications dans la réponse formulée.