c) Des magazines conseillers et donneurs d’opinion.

Si la simple demande d’informations est la première forme de sollicitation auprès des publications, les épistoliers requièrent dans 34.2 % de leurs lettres une implication directe des magazines dans la réponse formulée, sous la forme de conseils ou d’avis. En effet, 17.6% des lettres sont porteuses d’une demande de conseil et 16.6% le sont d’une demande d’avis. Ce sont donc les magazines comme conseillers qui sont sollicités par les épistoliers. Ces conseils portent sur tous les domaines de compétence des magazines et impliquent le locuteur directement. Ces questions débutent par «dois-je…», «est-ce que je dois…», mais sont aussi porteuses de la demande explicite de ce conseil «conseillez-moi», «donnez-moi un conseil», «pouvez-vous me conseiller ?». Elles évoquent la nécessité ressentie par les lecteurs de voir les magazines intervenir en tant que spécialistes des domaines évoqués dans les futures décisions à prendre. Pour cela, les lecteurs appliquent deux demandes, au degré de sollicitation des magazines divers : forte implication quand il s’agit d’une demande de conseil et implication moindre quand il s’agit d’une demande d’avis. En effet, la demande d’avis est une simple demande d’opinion, de point de vue du magazine face à un problème ou à une situation préalablement exposée. C’est ainsi que les lecteurs commencent leurs demandes d’avis par «pensez-vous… ?» ou par«suis-je», énoncant ainsi l’omniprésence du rapport à la norme. Mais les lecteurs restent les maîtres de la prise de décision ; en revanche, en sollicitant un conseil de la part des magazines, les épistoliers veulent se voir énoncer la conduite à tenir face à la situation énoncée. Les épistoliers, en requérant une parole subjective du magazine, laissent voir le besoin d’une aide extérieure pour comprendre, affronter et résoudre leurs problèmes. En demandant l’implication de cette aide extérieure dans la résolution du problème alors que la demande d’information n’intervient pas dans la résolution du problème mais donne certains éléments susceptibles d’y contribuer, les épistoliers ajoutent au rôle d’informateur des magazines, celui de contributeur à l’amélioration de leur situation et ce, via les conseils pratiques donnés. C’est le caractère pratique des magazines que les épistoliers viennent chercher à travers leurs demandes ; mais certains épistoliers y investissent des attentes plus fortes que ces suggestions de conduites à tenir.

En sollicitant une implication plus étroite des magazines dans la résolution du problème sous la forme d’une aide, d’une solution, d’un secours (5.55% du total des demandes), les épistoliers énoncent l’importance du pouvoir conféré aux magazines dans la résolution des problèmes et de degré d’implication recherché des magazines. Si la demande de conseil et d’avis laisse la résolution du problème entre les mains de l’épistolier, la demande de solution la met entre les mains des magazines. Les différents modes d’intervention attendus des magazines révèlent donc soit d’une simple suggestion de résolution, soit d’une prise en charge complète de cette dernière par les publications, certains épistoliers se déchargeant du poids de la résolution entièrement sur les magazines.

C’est donc la recherche de conseils et avis pratiques, pouvant être mis en application facilement que les lecteurs viennent rechercher via l’écriture des lettres, conseils qui doivent être plus personnalisés et mieux correspondre à la situation exposée par chacun, que les conseils pratiques énoncées dans les articles qui eux, correspondent aux problèmes collectifs, les plus fréquents. C’est pourquoi les lecteurs écrivent pour voir affiner en fonction de leur expérience propre énoncée, les conseils offerts au lectorat dans les articles proposés. Outre cette recherche d’informations et de conseils avisés, certains lecteurs, investissant dans le magazine un espoir mais aussi une confiance qu’ils n’accordent plus, comme nous l’avons montré à l’institution médicale, viennent demander aux magazines d’arbitrer des décisions émises par celle-ci, mais aussi de confirmer ou infirmer des informations colportées notamment par les médias ou par la rumeur et que, pour les épistoliers, seuls les magazines détiennent la vérité. Pour de nombreux épistoliers, les magazines de presse spécialisés se révèlent être les détenteurs de la vérité en matière médicale, sexuelle et corporelle.