b) Datation

Notonsdès à présent qu'il est pratiquement impossible de dater précisément chacune de ces œuvres. Ainsi, toute tentative de déterminer le temps de la rédaction du Commentaire de l'Histoire scolastique est vouée à l'échec, tandis que pour les autres œuvres il faut souvent se contenter de dates relatives. Cette réserve faite, nous tenterons dans les pages qui suivent de recenser les connaissances actuelles concernant la datation des œuvres du cardinal :

  • Le Commentaire des Sentences peut être daté des années 1229-1232. En général, on situe la date de la composition de ce Commentaire après celle de la Glossa d’Alexandre de Halès, car Hugues utilise parfois ce dernier pour la compilation de son œuvre. 78
  • Les Postilles auraient été rédigées entre 1231 et 1236. La date de 1231 est un terminus post quem selon Beryl Smalley qui, par ailleurs, a proposé 1236. 79
  • Les Questiones variae pourraient être datées de 1235, en tout cas après la rédaction du commentaire des Sentences. 80
  • Le Correctoire Biblique est difficile à dater. Néanmoins, un indice nous est donné par le Chapitre général de 1236 qui a soutenu les travaux de correction en cours. 81
  • La Concordance verbale peut être datée vers des années 1238-40 : la rédaction de cette concordance dite «de Saint-Jacques» fut achevée vers 1240. 82
  • Les sermons sont les plus difficiles à dater. En l’absence de prologue, d’allusions précises à des événements datés, ainsi que de manuscrits datés, nous sommes à de simples conjectures…

Notes
78.

Voir : Van den Eynde, The Theory of the Compositon of the Sacraments in Early Scholasticism (1125-1240), In. Franciscan Studies XII (1952), p. 12. Selon Van den Eynde ce commentaire fut composé « vers 1230 ». O. Lottin est d’avis que la composition eut lieu « v. 1232 » (O. Lottin, Psychologie et morale aux XIIe et XIIIe siècles, Louvain-Gembloux, 1942-60, t. IV, p. 848), en tout cas avant le commentaire de Roland de Crémone (Idem, Roland de Crémone et Hugues de Saint-Cher, In. Psychologie et morale, op. cit. t. VI. p. 171-180). K. Lynch met la date « avant 1234 » (K. Lynch, Some Fontes of the Commentary of Hugh de Saint Chair : William of Auxerre, Guy d’Orchelles, Alexander of Hales, In. Francisan Studies XIII (1953), p. 146). Le même auteur écrit dans un article que le commentaire de Hugues fut composé « après 1230 » (K. Lynch, The Summa de Sacramentis of Escorial C. IV. 2, In. Franciscan Studies, XVII (1957), p. 63). F. Stegmüller, après avoir trouvé une version abrégée du commentaire de Hugues dans les marges d’un manuscrit de Stockhom, (Kungliga Biblioteket A 150), estime avoir trouvé la rédaction et la forme originales du Commentaire des Sentences. Selon Stegmüller, cette version était une reportatio des lectures de Hugues sur les Sentences pendant les années 1229-30. (Voir : Die älteste Redaktion des Sentenzenkommentars Hugos von St. Cher in einer Handschrift der Königlichen Bibliothek zu Stockholm, In. Nordisk Tidskrift för Bok-och Biblioteksväsen, Uppsala, XXXV (1948), p. 69-79.). En revanche, W. H. Principe a démontré que cette version courte est un abrégé du texte standard de Hugues plutôt qu’une importante présentation préliminaire. (W. Principe, Hugh of Sait-Cher’s Stockholm ‘Gloss on the Sentences’ : An Abridgment rather than a First Redaction, In. Mediaeval Studies XXV (1963) p. 372-76 ; voir aussi : J. Gründel, Hugo von St.Cher und die älteste Fassung seines Sentenzenkommentars, In. Scholastik XXXIX (1964) p. 391-401).

79.

Voir: B. Smalley, The Gospels in the Schools, London, 1985, p. 119. Dans un article, Beryl Smalley affirme que les Postilles sur Job, sur les livres sapientiaux, ainsi que sur les prophètes appartiennent très probablement à la période d’enseignement de Hugues : les années 1230-35 (B. Smalley, Some Thirteenth-Century Commentaries on the Sapiential Books, In. Dominican Studies II. (1949), p. 340). En réalité, elle date l’ensemble des postilles sur la Bible à cette période (Idem, Study of the Bible in the Middle Ages, op. cit. p. 272-273). La probabilité de ces dates est confirmée - pour les postilles vétéro-testamentaires et pour celles des Evangiles - par des manuscrits qui furent copiés à Fleury en 1239 et dans les années qui suivirent (Voir : F. Stegmüller, Repertorium Biblicum Medii Aevi, VII. vols., Madrid, 1950-61, vol. III. p. 114 et 155). Néanmoins, notons qu’il est très difficile de déterminer la date exacte de la composition des Postilles, car, d’une part, les différents livres étaient probablement rédigés à des moments différents, d’autre part, on ne peut désigner un ‘auteur’ au sens tradidtionnel du terme : comme nous le verrons plus loin, les postilles furent le résultat d’un travail d’équipe.

80.

Selon Odon Lottin, les questions de Hugues seraient postérieures à son Commentaire des Sentences, car le manuscrit de Douai 434 conserve nombre de questions de maîtres de Paris des années 1231-35 (O. Lottin, Un petit traité sur l’âme de Hugues de Saint-Cher, In. Revue néo-scolastique de Philosophie, XXXIV (1932), p. 468-475.)

81.

On peut lire dans les Actes du Chapitre général de 1236 : « Volumus et mandamus ut secundum correctionem quam faciunt fratres quibus hic injungitur in provincia biblie alie ordinis corringantur et punctentur. »  Acta Capit. op. cit. t. I. p. 9. art. 38.

82.

Mary et Richard Rouse affirme qu'il «semble peu probable que la première concordance ait pu être achevée dès 1230; cependant le projet devait être entamé dès 1235, date à laquelle a pris fin le lien officiel de Hugues avec Saint-Jacques. Deux des copies de cette concordane peuvent être datées avec certitude de 1240 au plus tard.» (M. A. et R. H. Rouse, La concordance verbale des Ecritures, In. P. Riché et G. Lobrichon (dir.), Le Moyen Age et la Bible, Paris, 1984, p. 115-122, p. 116)