Conclusion

Hugues fut un homme doté d’une énorme capacité de travail, à en croire l’immensité de son œuvre, qui allait de pair avec une vocation pour la vita apostolica et une capacité d’organisation que l’Eglise a su bien utiliser. Ses nombreux devoirs ecclésiastiques ne l’ont pas empêché d’être un ‘litteratus’ et d’accomplir ou de diriger, en tant qu’exégète, des travaux de grande importance. Certains d’entre eux sont des instruments de travail indispensables aux hommes de l’Eglise de l’époque - comme les correctoires, les concordances ou les commentaires bibliques. Ces derniers, rédigés sous la direction de Hugues, eurent un impact retentissant à l'époque ainsi qu'une audience durable, aussi avons-nous consacré plus de temps et espace à l'étude des Postilles.

De plus, Hugues a proposé un certain nombre d’idées nouvelles en matière de théologie, dont seule une partie a survécu les longs débats du XIIIe siècle. Sa réflexion et ses recherches se déroulent sur un fond traditionnel, ses méthodes utilisées relèvent de la philosophie augustinienne et témoignent souvent d'un conservatisme à l'égard de la philosophie aristotélicienne, attitude que certains chercheurs lui ont reproché. Si d'aucuns constatent l'absence d'idées originales chez Hugues en matière de théologie, d'autres en revanche louent sa logique rigoureuse dans la présentation des thèses existantes. En effet, Hugues a pris position dans nombreuses questions théologiques, telles la nature du libre arbitre, la simplicité de l'âme, l'opposition des péchés et des vertus ou le trésor des mérites. En outre, il a adopté pour tous les sacrements le principe de la composition hylémorphique. Ses positions au sujet de la Sainte Trinité et de la double nature du Christ seront examinées plus loin, en comparaison avec les doctrines dans les sermons. Certaines questions posées concernent souvent les débats d’actualité. Ainsi, le pape fit recours à son savoir théologique: Hugues fut chargé d'examiner du point de vue doctrinale des oeuvres, dont le « Traité des périls des temps nouveaux » de Guillaume de Saint-Amour. De même, il donna son avis dans le débat sur la pluralité des bénéfices ecclésiastiques.

Homme de son temps, Hugues était dans le mouvement le plus actuel de la pensée théologique. La rançon de ces recherches innovantes est - logiquement - l’insuccès relatif de certaines de ses idées. Fruits de tentatives hésitantes, certaines idées n’ont pas eu d’heureux lendemains : Comme le constate le Père Torrell, « les solutions des futurs grands de la scolastique s’essayent plus au moins maladroitement sans toujours parvenir à la réussite «. 252 Mais même si les premiers pas de Hugues en matière des questions doctrinales sont tâtonnants, « il demeure à son honneur d’avoir préfiguré pour une bonne part les solutions à venir. » 253

Notes
252.

J.-P. Torrell, Théorie de la prophétie, op. cit. p. 283.

253.

Op. cit. p. 284.