3 - De 1825 à 1832, grandeur et décadence de l'école saint-simonienne.

Grâce à la jeunesse de ses membres, à la pertinence de leurs analyses, dans le domaine économique en particulier comme nous l’étudierons, ce groupe a exercé pendant sept ans une très grande influence sur la société française. Entre 1825 et 1831 en effet, les fondateurs de l’école saint-simonienne sont omniprésents dans le débat d'idées : leurs missions en province connaissent souvent un grand succès : elles sont suivies par un auditoire nombreux et la pensée de Saint-Simon connaît un grand rayonnement.

Mais vers la fin de cette année 1831, les pères de l’Eglise semblent de plus en plus déconnectés de la réalité sociale. Leur raisonnement ne part plus de l’analyse de la réalité : on a l’impression au contraire que leur approche est de plus en plus dogmatique et qu’ils essayent de plier la réalité à leurs idées préconçues. Cette dérive méthodologique est très patente lors des événements de Lyon en novembre 1831. Alors que cette ville traverse une situation insurrectionnelle et se trouve en état de guerre civile, les pères de l’Eglise restés à Paris, continuent de lancer des appels à la modération et refusent, au nom de l’union indivisible de tous les travailleurs et de la communauté de leur intérêt, de prendre parti entre les deux camps, celui des ouvriers et celui des fabricants.

Leurs mots d’ordre "pacifistes" entraînent une grande incompréhension de la part des fidèles de l’Eglise qui se battent sur le terrain au côté des ouvriers révoltés et partagent leur misère, leur frustration et leurs espoirs. Les événements de Lyon sont très symptomatiques à cet égard de la rupture entre la "base" et le sommet de la hiérarchie religieuse du saint-simonisme qui est à l’origine d’un grand nombre de défection dans les rangs du mouvement.

En peu de temps, on assiste ainsi à l'essoufflement d'un courant de pensée qui avait exercé une influence si importante dans des domaines aussi divers et essentiels que l’émergence du mouvement socialiste, la constitution du système bancaire, l’organisation de la politique financière.