VII - Plan de l’ouvrage.

Les saint-simonien établissent le constat que le système bancaire est mal organisé et que la circulation monétaire est défaillante : ils se fixent alors pour objectif d’organiser la banque et de développer la circulation monétaire. Leur but ultime est de réduire le niveau du taux d’intérêt : il constitue à leurs yeux un enjeu primordial.

Le taux d’intérêt est en effet le concept central de la réflexion économique des saint-simoniens : d'après eux, il influence le fonctionnement de toute l’économie et il est influencé en retour par les conditions même de ce fonctionnement.

  1. Il se trouve en premier lieu, nous le verrons, au cœur de la répartition des revenus. Comme le taux d'intérêt correspond aux revenus versés par les travailleurs aux rentiers oisifs, son niveau mesure le degré d’exploitation des premiers par les seconds : plus le taux d’intérêt est élevé, plus la répartition des revenus est inéquitable.
  2. De la même manière, le taux d'intérêt est l’élément fondamental de la circulation pour les saint-simoniens qui mettent en évidence une causalité réciproque entre le niveau du taux d’intérêt et l’abondance de la circulation : la baisse du taux d’intérêt favorise la circulation des richesses et cette circulation en retour stimule la baisse du taux d’intérêt.
  3. La circulation est appelée à se développer au fur et à mesure que l’industrie progresse : une circulation abondante est pour les saint-simoniens conforme à la logique d’une économie industrielle et l’émergence d’une économie industrielle doit aller de pair avec la baisse du taux d’intérêt. Il ne fait pas de doute à leurs yeux que le conflit entre les travailleurs et les oisifs doit se terminer par la victoire des travailleurs. Mais cette échéance est continuellement retardée par l’apparition de crises cycliques à travers lesquelles les oisifs tentent de renforcer leur position sociale. Le taux d’intérêt est la première cause de l’apparition d’une crise et il en subit les premiers effets : un taux d’intérêt trop élevé handicape la circulation des richesses et il provoque le déclenchement d’une crise ; en retour la crise qui aggrave les perturbations économiques entraîne une nouvelle augmentation du taux d’intérêt. D'après les saint-simoniens le taux d’intérêt permet d’expliquer le fonctionnement cyclique de l’économie capitaliste : la crise est interprétée comme le résultat de la stratégie des rentiers qui, en grande partie, s’opposent à la baisse du taux d’intérêt dans le but de bloquer la circulation des richesses et d’influencer la répartition des revenus à leur avantage.
  4. C’est pourquoi il est très important pour eux de retarder le déclenchement d’une crise et de limiter son ampleur. Pour cela ils veulent mener une politique contracyclique active. Comme le taux d’intérêt est la principale cause d’une crise et son enjeu principal, il doit aussi être le premier instrument de la politique conjoncturelle. Dans la configuration saint-simonienne la plus fréquente et la plus typique, cette politique doit s’appuyer sur une baisse du taux d’intérêt. Mais dans certaines situations, il peut être souhaitable, à leur avis, que les autorités monétaires fixent comme objectif intermédiaire, une augmentation momentanée de ce taux : c’est là un aspect assez original et inattendu de leur analyse.