c - La situation des travailleurs est aussi la plus favorable dans les pays où les banques sont les plus actives et où le recours à l'intérêt est le plus développé.

De la même manière que le niveau du taux d'intérêt explique les écarts de développement et les inégalités de revenu entre les différents secteurs d'activité, il les explique aussi entre les différents pays. En Angleterre le système de crédit est plus développé qu'en France et le taux d'intérêt y est plus bas : les capitaux disponibles, par conséquent, sont mieux utilisés par l'industrie, les travailleurs anglais bénéficient à maints égards d'une situation plus favorable que les travailleurs français et ils disposent ainsi de revenus plus satisfaisants.

Ainsi, en règle générale, plus le système de crédit est développé, plus le taux d'intérêt est bas. Plus le taux d'intérêt est bas, plus le coût du capital payé par les travailleurs est faible et moins grandes seront les difficultés rencontrées par ces derniers pour mettre en œuvre un processus productif.

A partir de cette chaîne de causalité, les saint-simoniens dégagent une loi générale reliant le degré de développement industriel au niveau du taux d'intérêt : "Or de toutes les charges qui pèsent aujourd'hui sur l'industrie, la plus onéreuse sans contredit, et la plus oppressive, c'est la redevance imposée aux travailleurs sous le nom de fermages , loyers , intérêts " 199 .

Dans la logique saint-simonienne, le taux d'intérêt est une variable explicative fondamentale du développement économique. Il est, de la même manière un critère essentiel du développement moral d'une population et un indicateur privilégié de son type de classification sociale : plus le taux d'intérêt est bas et plus l'industrie est développée ; plus la part du produit global détenue par les travailleurs est grande, et plus la répartition des revenus est équitable.

Notes
199.

"France", Le Globe, 26 octobre 1831.