C'est en effet la tâche d'un gouvernement éclairé et prévoyant de déterminer la quantité optimale de monnaie.
Dans l'esprit de Law, il doit, pour cela, généraliser l'usage de la monnaie de papier comme moyen de paiement car elle est d'une utilisation beaucoup plus souple que le métal : "Il [le papier] est beaucoup plus facile à délivrer […] plus facile à transporter […]. Il peut se diviser sans perte" 493 .
Grâce à l'existence de cette monnaie de papier, le gouvernement est en mesure d'émettre la quantité globale de moyens de paiement qu'il juge le plus souhaitable et de contrôler leur circulation : "La quantité étant toujours égale à la demande, la monnaie conservera sa valeur et achètera toujours dans cinquante ans la même quantité de marchandises qu'aujourd'hui" 494 .
Plus tard, les saint-simoniens poursuivent le même objectif d'un réglage monétaire de l'économie grâce à l'utilisation d'une monnaie de papier gérée. Nous trouvons bien chez Law tous les ingrédients "[d']un véritable gouvernement industriel" 495 que les saint-simoniens voudront instituer à travers le contrôle monétaire du crédit.
La substitution de la monnaie de papier à la monnaie métallique est significative, pour eux, de "la transformation d'un crédit individuel en un crédit social" 496 . Grâce à l'utilisation contrôlée de cette monnaie de papier, l'organisation industrielle des travailleurs pourra être instaurée de manière naturelle et progressive, sans passage obligé par une révolution politique au coût humain exorbitant.
Réaliser une grande mutation sociale grâce au développement généralisé d'une monnaie de papier est un rêve commun à Law et aux saint-simoniens, qui de la même manière, se sont impliqués très profondément, avec une grande conviction idéologique, dans ce projet de transformation pacifique de la société.
J. Law, Considérations…, cité par P. Harsin, op. cit., p. 149.
Idem
I. Pereire, "Industrie", Le Globe, 9 septembre 1831.
Idem.