a - Des caractéristiques du crédit formulées par Law…

a1 - Une classification des formes de crédit : crédit exigible et crédit non exigible.

Afin de généraliser l'usage du crédit, Law et ses conseillers se sont livrés à une étude approfondie de cet instrument : ils ont construit une typologie des différentes formes de crédit et ils en ont repéré les caractéristiques communes.

Ils ont ainsi classé deux types de crédit en fonction du degré de liquidité des titres qui en sont représentatifs. Dutot, un proche collaborateur de Law, explique ainsi : "Il y a deux sortes de crédit, l'un qui est exigible de quelqu'un à qui on en a fourni l'avance : c'est un effet exigible à la valeur duquel il faut faire face quand elle sera demandée […] L'autre crédit ne l'est pas" 509 .

La première sorte de crédit correspond à une avance ou à un prêt bancaire à court terme : "c'est, écrit Dutot, une lettre de change payable à vue" 510 . La seconde correspond à un actif financier beaucoup moins liquide : "une action par exemple" 511 .

Chacun des deux a une fonction spécifique : le crédit exigible accroît dans de très fortes proportions la liquidité de l'économie, et par conséquent la circulation des richesses ; le second, le "crédit [qui] ne l'est pas", permet surtout à son détenteur d'obtenir un revenu supplémentaire.

Notes
509.

Dutot, op. cit., t. II, p. 86.

510.

Idem. Les lettres de change étaient au début du XVIIIe siècle d'un usage assez courant. Elles circulaient depuis le début du XIIe siècle dans les pays d'Europe de l'ouest. Elles avaient à l'origine pour fonction d'éviter le transport, incommode et dangereux, de grandes quantités d'or : on peut estimer, à ce titre, qu'elles constituent une véritable monnaie de papier de substitution. Comme cette lettre peut circuler en tant que monnaie et qu'elle donne lieu à un paiement différé dans le temps, elle assure aussi la fonction d'un instrument de crédit. Le fait que Dutot la prenne comme exemple même de crédit exigiblemontre que, pour Law et ses partisans, comme pour les saint-simoniens plus tard, il n'existe pas de ligne de démarcation entre la monnaie et le crédit : on peut, dans une telle optique, parler d'une monnaie de crédit, et la séparation que C. Rist veut établir, plus tard, "entre les instruments de crédit et la monnaie proprement dite" (C.Rist, op. cit., p. 9), n'a, du point de vue de ces économistes pas beaucoup de sens.

511.

Idem.