Le taux d’escompte peut se définir comme le taux d'intérêt que les marchands versent aux banques lorsqu’ils ont besoin de fonds à court terme pour faire face à leurs difficultés de caisse. Les opérations d’escompte sont ainsi nécessaires à la marche régulière des affaires quand elles commencent à se développer sur une assez grande échelle : lorsqu'en effet la production s'accroît et que les échanges se multiplient, elles permettent aux marchands de boucler un grand nombre de transactions ; le taux d’escompte acquiert une grande importance dans l’économie, puisque de son niveau dépend la réalisation d’un grand nombre d’échanges et par conséquent la production d'une quantité importante de biens.
On peut estimer que ces opérations d’escompte se développent en Europe dès la fin du Moyen Âge avec l’intensification des échanges liés à l’apparition de grandes foires commerciales. Pourtant, c'est seulement en 1776 que la première caisse d'escompte 843 est créée en France, ce qui prouve que le besoin d'une telle caisse spécialisée dans ce type d'opérations était nettement ressenti par les commerçants.
Malgré ce succès le développement de ces caisses est assez lent et l'organisation de l'escompte est encore embryonnaire dans la première moitié du XIXe siècle. La généralisation de l'escompte pourtant est d'autant plus indispensable que les différents pays européens sont confrontés aux problèmes du décollage économique et que les entreprises éprouvent de graves difficultés pour se procurer de trop rares capitaux pendant cette phase de démarrage. Les saint-simoniens sont parmi les premiers à regretter cette situation et ils accusent la Banque de France d'être responsable de ce blocage.
La Banque de France, en effet, détient un pouvoir financier très important : en fixant le niveau du taux de réescompte elle rend possible ou elle empêche le refinancement d’un grand nombre d’entreprises industrielles : elle décrète ainsi leur survie ou au contraire signe leur arrêt de mort. Face à ce qu’ils considèrent comme un enjeu essentiel les saint-simoniens adressent des critiques virulentes à la Banque de France : elle n’assumerait pas ses responsabilités en fixant le taux d’escompte de manière immuable à 4% ; elle mènerait une politique très timorée qui ne lui permettrait pas d’exploiter les possibilités de l’escompte et son action, sur ce point encore serait très néfaste pour le développement de l’industrie.
Ils déploient alors de grands efforts pour convaincre les dirigeants de cette institution qu'ils doivent modifier leur politique de l'escompte dans l'intérêt de l'industrie du pays. Pour parvenir à leurs fins, ils tentent de démontrer que le taux d'escompte exerce une influence déterminante dans l'organisation du crédit d'une économie industrielle (§ 1) et ils montrent ensuite qu'un taux de réescomptable variable doit jouer un rôle directeur dans la politique monétaire d'un pays (§ 2).
Les statuts de cette caisse d'escompte furent rédigés conjointement par Panchaud, un banquier genevois, et par Turgot. Le capital initial s’élevait à 15 millions de livres dont 5 furent affectés à des opérations d’escompte et 10 placés en bon du trésor remboursables sur 10 ans. Les membres fondateurs préfèrent adopter le nom de caisse plutôt que celui de banque pour éviter d’éveiller les mauvais souvenirs laissés par la banque de Law . Cette caisse cesse son activité en 1798, interdite par le gouvernement révolutionnaire qui n’accepte pas qu’on puisse faire circuler une autre monnaie que les assignats. Sur l’origine et le fonctionnement de cette caisse, on peut consulter A. Courtois, op. cit., p. 94-95).