SECTION III - LE TAUX D'ESCOMPTE AU SERVICE D'UNE POLITIQUE MONETAIRE CONTRACYCLIQUE.

Pour les saint-simoniens l'objectif essentiel est de parvenir à baisser le taux d'intérêt. Cette baisse revêt une dimension symbolique très forte puisque grâce à elle c'est l'exploitation des travailleurs par les oisifs qui diminue aussi.

C'est un but absolument prioritaire, mais il s'agit d'un objectif de long terme. En même temps les saint-simoniens sont conscients qu'il faut neutraliser les fluctuations dont ils ont mis en évidence les conséquences très préjudiciables pour les travailleurs : il s'agit alors d'atteindre un optimum économique et social immédiat qui constitue un objectif de court terme. Ainsi d'après les saint-simoniens le taux d'intérêt doit être variable et révisable : ils doit si possible être orienté à la baisse mais il doit aussi être en mesure d'augmenter si les circonstances l'exigent.

Souvent objectif de long terme et objectif de court terme coïncident : les périodes de crises cycliques manifestent en effet la tendance profonde de l'économie capitaliste à la régression sociale. A ce moment, la baisse du taux d'intérêt est une solution pour remédier aux déséquilibres de la conjoncture : elle correspond à la fois à un objectif de court terme de sortie de crise et à un objectif de long terme de redistribution plus équitable des richesses. C'est le cas de figure qui s'impose, en particulier, aux yeux des saint-simoniens, lors des événements de Lyon (§1). Mais il se peut aussi qu'il soit opportun d'augmenter le taux d'intérêt pour contrer une tendance cyclique et parvenir à l'optimum économique et social. La hausse du taux d'intérêt constitue alors un objectif intermédiaire dans le cadre d'une politique monétaire contracyclique : dans ce cas objectif de court terme et objectif de long terme peuvent sembler à première vue contradictoires et la relation entre ces deux types d'objectifs suit une logique plus complexe ; il s'agit ici d'une dimension assez peu connue et originale de l'analyse saint-simonienne (§2).