E - Le Crédit.

Le Crédit est fondé par Duveyrier et Amail après la disparition du Spectateur républicain. Il paraît du 1ernovembre 1848 au 31 août 1850. Enfantin rejoint très vite ce journal en même temps d'ailleurs que Jourdan et Guéroult. Le Crédit est sans doute le titre le plus important et le plus significatif dans l'histoire de la presse saint-simonienne en 1848 car il a l'ambition, avec Enfantin, de passer pour le porte-parole officiel du courant saint-simonien.

Ce quotidien a une orientation financière très marquée, comme son titre du reste le laisse présumer. Enfantin signe au cours du mois de mars 1849 une série de six articles sur La Banque de France dont les trois derniers sont consacrés aux relations entre La Banque de France et le Crédit foncier 1048 . Deux autres séries d'articles sont consacrés à la constitution du Crédit foncier 1049 .

Enfantin s'implique beaucoup dans la parution de ce journal car il compte sur lui pour reprendre l'ascendant sur le groupe des anciens disciples : il ambitionne pour Le Crédit le même rôle fédérateur que Le Globe en 1830. Mais le succès n'est pas au rendez-vous : le tirage est assez faible et le journal ne subsiste que grâce à la générosité de ses donateurs au premier rang desquels Arlès-Dufour qui, malgré son mécénat, est loin d'être convaincu de l'utilité de ce titre 1050 . Ainsi le journal est très controversé au sein même du groupe saint-simonien par les mécènes qui expriment leur lassitude face au déficit chronique et au manque de lecteurs. Dans des conditions aussi aléatoires, Le Crédit cesse de paraître le 31 août 1850.

Notes
1048.

Le Crédit, 11, 12, 13, 15, 19, 20 mars 1849.

1049.

Le Crédit, 25, 26, 30 décembre 1849 ainsi que 10, 14, 23, 29 janvier 1850.

1050.

Sur les sentiments d'Arlès-Dufour à l'égard du Crédit, on peut consulter S. Charléty, op. cit., p. 297-301. Il écrit à Enfantin : "Les bourgeois trouvent Le Crédit socialiste et républicain ; les ouvriers le trouvent trop bourgeois, trop flasque, trop eau-de-rose. On ne l'ouvre même pas au Cercle : on ne peut le faire lire aux ouvriers en le leur donnant" (rapporté par S. Charlety, op. cit., p. 298). Il semble qu'Enfantin n'ait pas tiré la leçon de l'échec du mouvement saint-simonien et de son rejet général lors des événements de 1831 à Lyon et qu'il persiste dans son erreur de stratégie : en refusant d'exprimer un choix politique clair, il se coupe des deux partis en présence.