Les modes de rencontre

Les entretiens

J’appelle ‘«’ ‘ entretien’ » les échanges que j’ai pu avoir avec les interlocuteurs de manière formelle, par opposition aux rencontres effectuées sur le lieu de la manifestation. Ces entretiens, formalisés par le calendrier (un rendez-vous préalable était fixé) et par le lieu (généralement le bureau de l’interlocuteur, parfois son domicile, un bar), duraient de une à trois heures et étaient enregistrés, avec l’accord des personnes. Ils ont été réalisés auprès d’organisateurs de fête ou de foire, de producteurs, d’élus locaux (maires ou adjoints). Les questions étaient les mêmes pour chaque catégorie et cherchaient à dégager les enjeux de la labellisation des fêtes, des foires et des marchés pour chacune d’elle. Je leur demandais comment se déroulaient l’organisation et les préparatifs de la manifestation, son origine (surtout lorsqu’elle était récente). Je leur posais des questions sur la place de la manifestation dans la ville ou dans l’activité économique, c’est-à-dire sur l’intérêt qu’elle a, selon eux. Je les interrogeais sur leurs attentes, leurs objectifs et sur leurs souhaits en termes de communication.

Les rencontres de marché

Elles ont été beaucoup plus nombreuses (une centaine) mais aussi beaucoup plus courtes, mises à part quelques-unes prolongées autour d’un verre ou par une visite ‘«’ ‘ commentée’ » de la manifestation, comme à Saulieu. Les rencontres de marché se sont faites auprès des chalands, des commerçants non-sédentaires et sédentaires, des éleveurs ou producteurs, d’organisateurs, de vétérinaires, de techniciens agricoles… 38 Si je retrouvais ‘«’ ‘ par hasard’ » quelque organisateur ou producteur avec qui j’avais eu un entretien, la plupart des personnes rencontrées m’étaient inconnues et, par là-même, elles ne me connaissaient pas, ce qui éveillait surtout un effet de méfiance à mon endroit. Le contexte de la manifestation n’est pas évident pour aborder les gens. En effet, le plus souvent ils viennent en petits groupes avec de la famille, des amis, des enfants à surveiller… Ils sont venus flâner, se promener, discuter entre eux, et ne sont pas toujours disposés à laisser interrompre ce moment.

Ayant rapidement compris que je ne pouvais les interrompre trop longtemps, j’avais décidé de ne poser que quelques questions. Celles-ci visaient à connaître leur lieu de résidence, la raison de leur venue, leurs pratiques du marché (avec qui sont-ils venus ? Ont-ils fait des achats ?…), la fréquence de leur venue (si c’était la première fois, je leur demandais comment ils l’avaient connu, s’ils connaissaient le produit et s’ils connaissaient le label S.R.G. Si les personnes se montraient disposées à me répondre, j’ajoutais quelques questions plus précises. Il est très intéressant de saisir ‘«’ ‘ sur le vif’ » les impressions exprimées par les chalands comme par les organisateurs et les exposants. La rencontre avec différentes personnes appartenant à un même groupe (producteur ou organisateur surtout) permet de confronter les avis, mettant ainsi en évidence le sens que chacun donne à la manifestation selon ses propres intérêts, les connivences ou les dissensions qui existent entre individus ou groupements.

Le déroulement des rencontres

A Saint-Christophe-en-Brionnais, j’ai rencontré des employés municipaux, et un vétérinaire présent à la réunion des cotations à laquelle j’assistais. Lors de la fête du pot-au-feu, j’ai discuté avec le président du Comice – contacté par téléphone à plusieurs reprises au sujet des S.R.G. et retrouvé lors d’une assemblée des S.R.G. – et la présidente du Comice des fêtes.

A Espelette, j’ai interviewé la présidente du syndicat des piments d’Espelette et le Grand Maître de la Confrérie du piment d’Espelette. J’ai eu plusieurs longs entretiens téléphoniques avec Monsieur le Maire, restaurateur et frère du Grand Maître.

A Saulieu, j’ai rencontré un technicien détaché de la Chambre d’agriculture pour gérer le secrétariat du Comice. Il prit rendez-vous pour moi chez un éleveur qui me reçut le lendemain et m’expliqua, tout l’après-midi, l’élevage des culards en me faisant faire le tour des différents prés. J’ai interrogé le président de l’Union commerciale, la présidente des métiers de bouche et une personne chargée de l’animation sédélocienne.

D’autres n’ont été interviewés que rapidement durant la manifestation : membres de jury (Quatre Glorieuses, Billom, Saulieu), président de la fédération nationale… (Saulieu), maires (Billom), représentants de Chambre d’agriculture… Lorsque je me suis rendue sur les manifestations (Sarlat, Saint-Christophe-en-Brionnais, Louhans, les Quatre Glorieuses, Billom, Saulieu, Romans), une large part a été accordée à l’observation de la manifestation en elle-même mais aussi des pratiques. La parole a été laissée aux producteurs-exposants et organisateurs aux commerçants (sédentaires ou non) et aux visiteurs.

D’un site à l’autre, j’essayais de rencontrer le même type d’interlocuteurs mais la diversité du site et de l’organisation de l’événement a demandé une certaine flexibilité pour s’adapter à la situation propre à chaque site. En effet, si, sur un lieu, des acteurs sont partie prenante du déroulement de la fête et de sa mise en valeur, ce sont d’autres catégories d’acteurs qui en sont chargées sur un autre site. Certains sites se sont montrés plus cernables, comme à Saint-Aubin, petit village, où l’enjeu de la fête et des S.R.G. apparaît simplement. Alors que d’autres, comme Saulieu, soulèvent un réseau complexe d’enjeux qui révèle une démarche dynamique qui prend la forme d’actions de communication. Ainsi si la diversité des terrains peut paraître comme une faiblesse, elle provient essentiellement de la complexité propre à chacun et du nombre d’acteurs mobilisés (individus, associations…). Je n’ai pas hésité à recontacter des personnes par téléphone, voire à retourner sur le site – comme ce fut le cas pour Saulieu et Billom. Néanmoins, pour chaque site, les objectifs fixés restaient les mêmes : connaître l’événement, son histoire, son implication locale, la place du produit, la communication, l’intérêt porté au label S.R.G. et les actions de valorisation.

Notes
38.

Les phrases de mon texte inscrites en italique, entre guillemets, sont issues de ces rencontres ou de ces entretiens.