1.1 Le marché

Le terme marché vient du latin mercatus, de merx, mercis : ‘«’ ‘ marchandise’ ». Ce mot prend de nombreux sens, s’employant pour désigner différents types de confrontations entre une offre et une demande, entre un marchand et un client. Ainsi, marché peut désigner, comme c’est le cas ici, le lieu public de vente de produits, qu’il s’agisse d’une place, d’une rue, qu’il soit à l’air libre ou dans une halle. Il peut également prendre la forme d’une ‘«’ ‘ convention portant sur la fourniture de marchandises, de services et de valeurs’ » 39 donnant les expressions ‘«’ ‘ conclure un marché »,’ ‘«’ ‘ par-dessus le marché’ » (signifiant alors ‘«’ ‘ au-delà de ce qui a été convenu »’), ‘«’ ‘ bon marché’ », etc... Dans le domaine économique, il concerne ‘«’ ‘ l’ensemble des offres et des demandes concernant une catégorie (ou un ensemble) de biens, de services ou de capitaux »’ ‘ 40 ’ ‘.’ On parle ainsi de marché du bois, de l’informatique, du travail... Aujourd’hui on parle aussi de Marché commun pour évoquer l’Union douanière et économique créée par l’Europe. Dans l’expression ‘«’ ‘ mettre le produit X sur le marché’ », marché désigne l’ensemble des consommateurs. Il est ainsi convenu d’appeler les places marchandes ‘«’ ‘ marchés physiques »,’ par opposition aux ‘«’ ‘ marchés abstraits’ » de l’économie globale.

G. Wackermann distingue des catégories :

‘« En France même, quatre types de marchés physiques se répartissent les échanges d’orientation plus traditionnelle : les marchés de détail et les foires polyvalentes ; les foires spécialisées ; les marchés de concentration du gros et du demi-gros (marché-gare, Marché d’intérêt national) ; les marchés de production-expédition au cadran. » 41

Les deux dernières catégories ne sont pas prises en compte dans notre étude car elles sont trop éloignées, par la forme et la fonction, des marchés et des foires étudiés qui correspondent aux deux premières catégories. Ces quatre réseaux de commercialisation peuvent être comparés sur un plan économique, mais notre étude, qui vise à cerner des pratiques particulières, ne peut les intégrer. Notons en effet que la majorité des marchés et des foires retenus ici est destinée à la vente aux particuliers. Il en va différemment pour les marchés aux bovins ou les concours où la commercialisation se réalise entre professionnels, mais dont la forme est celle des places marchandes traditionnelles, et sur lesquels le grand public porte un intérêt grandissant. Pour notre étude, nous distinguons deux types de marchés à caractère traditionnel selon le public auquel ils s’adressent : les marchés ‘«’ ‘ tout public’ » et les marchés destinés aux professionnels.

Dans notre cas, marché désigne la manifestation publique d’échange commerçant. Il qualifie également souvent le lieu où il se tient (= ‘«’ ‘ place du marché’ ») ainsi que l’action qui s’y passe (= ‘«’ ‘ faire son marché’ »). J.-M. Sorba reprend la définition de I. Chiva : les foires et marchés sont des ‘»’ ‘ rassemblements périodiques, voués aux commerces et aux échanges de toutes sortes, qui se tiennent selon des calendriers variables, généralement périodiques, en des lieux connus de tous et souvent adaptés ou construits à cette fin. »’ ‘ 42

Le marché semble avoir ‘«’ ‘ une vocation alimentaire marquée’ » 43 . Jusqu’à la deuxième moitié du XXe siècle, c’était principalement les agriculteurs des alentours qui venaient vendre le surplus de leurs cultures et de leur petit élevage (légumes, fruits, volailles, oeufs, beurre...). Les hommes apportaient les bestiaux tandis que les femmes allaient vendre les animaux de la basse-cour, les œufs, le beurre… Sur les marchés plus importants, des artisans apportaient étoffes, articles de vannerie... Généralement, le marché commercialisait des produits à usage courant. Il permettait aux ruraux d’écouler leurs surplus et d’approvisionner les gens de la ville. La phase de commercialisation faisait partie du travail quotidien du paysan. Avec la mécanisation, dans les années 50, les négociants (volaillers et marchands de bestiaux) ont effectué des ‘«’ ‘ tournées’ » dans les fermes, faisant ainsi gagner du temps et de l’argent aux agriculteurs. D’autres moyens de commercialisation se sont développés, séparant encore plus le travail de production de celui de la commercialisation. Malgré la quasi-disparition des étals des producteurs dans ces années-là, les marchés se sont maintenus, grâce à leur capacité d’adaptation. Les producteurs se font plus nombreux et des marchés ‘«’ ‘ de producteurs’ » se créent. A ces manifestations hebdomadaires destinées à l’écoulement des produits courants, s’en ajoutent d’autres, à fréquence plus espacée et proposant des produits plus exceptionnels : les foires.

Notes
39.

Le Nouveau Petit Robert, 1985, p. 1351.

40.

ibid., p. 1351.

41.

G. Wackermann : « Les places marchandes agricoles » in Etudes rurales, n°78-80, 1980, p.36.

42.

J.-M. Sorba : « Descriptions et dynamique des foires », in Rôles et impacts des foires et marchés ruraux sur les activités agricoles et artisanales de Corse, 2001, p.8.

43.

M. Bachelard : Foires et marchés en Touraine, 1981, p.101.