Les labels qui mettent en valeur des sites et qui émanent des hautes sphères politiques s’inscrivent dans une démarche exemplaire et non exhaustive. Il s’agit en effet surtout de s’attacher à un fait, à une action, à un lieu dans ce qu’ils ont de général, dans ce qu’ils ont de représentatif pour un ensemble afin de signifier et représenter à travers eux cet ensemble. C’est pourquoi il n’est pas rare de trouver une volonté de sélectionner cent sites, le chiffe 100 ayant valeur d’exemplarité et de représentativité 321 . D’après A. Micoud, les hauts-lieux, les lieux exemplaires sont à la fois des symboles représentant une généralité et un modèle digne d’être imité. Ils résultent d’une construction qui les pose comme étant exemplaires. Pour A. Micoud, cette construction survient à un moment troublé par un ‘«’ ‘ problème social, une contradiction (problème qui est dit pouvoir trouver sa solution dans une autre manière d’organiser l’espace social). ’» 322 Le lieu exemplaire apparaît pour pallier un manque, pour participer à la résolution du problème. Dans le cas du label S.R.G., on observe qu’il naît dans les sphères politiques qui portent un regard, donnent une orientation aux domaines du tourisme et de la gastronomie. Il s’agit ici de construire un tourisme gastronomique en valorisant l’association d’une production à une commune. Au niveau national, les instances valorisent les ressources du terroir et la gastronomie française. Nous verrons plus loin que l’appropriation locale du label par les communes traduit le choix d’un devenir.
Le chiffre cent fut fixé par le C.N.A.C. pour choisir des ‘«’ ‘ sites remarquables du goût’ ». La valeur du chiffre n’est pas de dresser une liste exhaustive mais de rendre les sites choisis représentatifs de tous les autres ayant une valeur gastronomique.
Cet objectif du nombre à atteindre se révèlera contraignant et surtout plus symbolique qu’effectif. Tout d’abord, lorsque la demande initiale leur est faite, les membres du C.N.A.C. pensaient qu’ils n’auraient que l’embarras du choix à édifier une liste de cent sites. Or il s’est révélé qu’ils n’ont pas trouvé suffisamment de sites répondant aux critères. C’est pourquoi pour compléter la liste, il fut décidé, au dernier moment, d’inclure des foires et marchés en tant que lieux typiques et traditionnels et présentant des produits régionaux.
Ensuite, nous pouvons signaler que le chiffre 100 est d’autant plus ‘«’ ‘ symbolique’ » qu’il n’y a jamais eu cent sites. En effet on dénombrait cent cinq sites à l’origine et cent vingt sites aujourd’hui, parmi lesquels seuls soixante-dix adhèrent à l’association.
La tendance actuelle n’est plus de tendre vers le chiffre idéal mais de sélectionner des sites actifs, motivés, ce qui diminue le nombre d’adhérents, d’autant plus que pour obtenir l’appellation, les sites-marchés doivent reposer leur candidature.
L.Bérard et Ph.Marchenay in D.Poulot, Patrimoine et modernité, op.cit., p.161.
A. Micoud : « Les lieux exemplaires : des lieux pour faire croire à de nouveaux espaces » in A. Micoud, Des Hauts-lieux, la construction sociale de l’exemplarité, p.54.