5.2.6. Un label, révélateur d’attentes préexistantes

Nous avons annoncé que le label S.R.G. présentait trois types d’intérêt : celui qui découle du sentiment ressenti par l’annonce de la sélection, celui qui émane d’une attente par rapport au label (l’‘»’ ‘ image de marque’ », qui peut également se retrouver dans la troisième catégorie) et celui qui est né de la création d’une vie associative.

L’idée que le label S.R.G. est une reconnaissance de l’intérêt du site est émise par tous les sites à l’exception de Sarlat. Certains sites utilisent le terme de ‘«’ ‘ reconnaissance’ » alors que d’autres parleront de chance ou d’aura pour désigner l’opportunité et la plus-value apportée par le label. A Sarlat cette reconnaissance n’est pas exprimée, soit parce que cela semble logique, évident que Sarlat soit répertorié dans la liste des S.R.G., soit parce que la notoriété de Sarlat est telle qu’elle ne peut voir comme une reconnaissance le fait d’être sélectionnée.

Quel que soit le rapport qu’il souhaite entretenir avec le label S.R.G., chaque site pense de façon unanime que ce label est une affaire de communication. Le label est aussi largement défini comme susceptible de produire ou de renforcer une image positive et attractive du lieu. Cette image s’adresse à un public ‘«’ ‘ extérieur’ », touristique et elle est fondée autour du thème aussi vaste que valorisant de la gastronomie. Encore une fois Sarlat s’exclut de cette catégorie puisque tous ses représentants affirment que son image est déjà bien établie et qu’elle touche un large public. Si l’on s’accorde pour objecter qu’il faut rester dynamique et ne pas proposer une image vieillissante, celle de Sarlat ne semble pas pour autant devoir passer par les S.R.G. qu’elle surpasse en terme de reconnaissance publique et de qualité du contenu.

Espelette, Billom et Saint-Aubin construisent leur identité en liant un produit à leur ville. Les sites de Saint-Christophe-en-Brionnais, Saulieu et Louhans voient le label S.R.G. comme susceptible de produire une image de marque. Les produits de ces derniers jouissent d’une importante reconnaissance. La filière professionnelle est bien constituée, le produit a une forte notoriété et le label qualité ou la race reconnue depuis longtemps par le public, fonctionnent bien et sont efficaces. Par contre ce sont ces villes elles-mêmes qui souffrent de leur image ou qui aimeraient la faire mieux connaître. Cette recherche de notoriété et d’image va passer par un de ses atouts : un produit plus connu que la ville elle-même. Ici, il y a la volonté d’une ouverture touristique à partir d’un produit qui bénéficie d’une reconnaissance publique. A Espelette, Billom et Saint-Aubin, on observe une volonté de promouvoir un produit. L’effort porté localement est de valoriser la production par sa reconnaissance (A.O.C. par exemple) et de s’ouvrir aux consommateurs. Nombre de villes visitées essayent de construire leur identité en valorisant leur production ou leur fête, foire ou marché.

Les dimensions de la motivation et de la création d’un réseau ne sont citées que par les sites qui participent à la vie associative, en particulier en organisant ou en se rendant sur les salons S.R.G.. Ceux qui adhèrent mais qui ne font que se tenir informés de la vie de l’association, en lisant la Lettre des S.R.G. ou même en se rendant occasionnellement aux assemblées, ne donnent pas pour intérêt au label la ‘«’ ‘ motivation’ » et la ‘«’ ‘ création d’un réseau’ ». En effet, ces deux intérêts ne peuvent être envisagés a priori. Ils sont le résultat de l’engagement de personnes ou de groupes et de la rencontre entre des individus. Ces deux intérêts se sont révélés après l’expérience d’une dynamique, mais ils semblent être les plus importants aujourd’hui pour les membres actifs. Cette dynamique participe à réaliser le rôle de communication. En effet, non seulement les sites qui n’adhèrent pas tendent à être exclus par les autre sites, mais en plus l’association grâce aux échanges, aux conseils, à l’émulation qu’elle crée, permet d’optimiser la communication, d’autant que chaque site peut participer à la valorisation des autres sites, (de manière directe en renvoyant les visiteurs vers d’autres sites ou de manière indirecte en servant de faire-valoir).

Pour les moins investis, le label S.R.G. n’est que reconnaissance, récompense d’une qualité 338 . Pour les autres, il est support de communication et d’action. A travers les sites de Saint-Christophe-en-Brionnais, de Louhans, de Saulieu, de Billom, de Saint-Aubin et des Quatre Glorieuses nous allons voir comment le label est approprié. Par appropriation, nous entendons l’acte ou la disposition par laquelle le site met en valeur ce label pour se mettre en valeur lui-même. Le label n’est plus seulement une entité abstraite, globale, nationale, il prend un sens pour une situation locale précise. Il devient support d’une action locale. Le label ayant d’abord une valeur nationale, son appropriation par le local suppose donc une adaptation.

L’intérêt porté au label S.R.G. reprend les caractéristiques principales définissant les labels touristiques. Pourtant, si l’on y associe la manière dont chaque site l’envisage, on s’aperçoit qu’il révèle les attentes propres à chacun. En effet, on observe que les sites définissent les intérêts du label par rapport à ce qu’ils pensent en retirer pour eux-mêmes. Le label leur permet de projeter leurs attentes et il devient un vecteur, un outil pour les réaliser. Les sites qui ont la volonté de communiquer sur leur image ou sur leur produit trouvent donc là un moyen d’exprimer, de réaliser une attente préexistante. La valorisation du label, c’est-à-dire la façon dont les sites vont se servir de lui dépendra donc des souhaits qu’ils veulent voir se réaliser.

Ainsi le label S.R.G., bien que global et généralisant, pourra être adopté localement par des sites qui auront perçu à travers lui, un intérêt qui leur était particulier, qui les concernait personnellement. L’adoption du label devra donc passer par son adaptation au local.

Notes
338.

Nous avons explicité pourquoi Romans, Espelette et Sarlat s’étaient mis en retrait de l’association S.R.G..