5.3.1.2. Savoir trouver une solution adaptée à ses besoins

Choisie dès la sélection initiale, Louhans réfléchit à des projets de développement local et touristique. La désignation S.R.G. est considérée comme un atout pour valoriser une image de marque. Néanmoins, la démarche est hésitante et Louhans ne sait comment s’approprier ce label. Aujourd’hui, une solution d’ampleur est envisagée avec la création d’une action culturelle.

Depuis quelques années, la municipalité souhaite encourager le tourisme à Louhans et redynamiser la vie sociale et économique locale. Le tourisme est pensé comme participant au développement économique local. Ce dont souffre Louhans, c’est de ne pas être placé sur de grands axes de circulation et de ne voir qu’un tourisme de passage – sans nuitée. Véhiculant une image vieillotte d’une région ‘«’ ‘ arriérée’ » et voyant sa population vieillir, Louhans tend à modifier cette image. Un axe ‘«’ ‘ développement local’ » est privilégié par l’encouragement aux implantations industrielles et diverses animations se développent 344 . Elles s’adressent tant à la population locale qu’aux visiteurs. Le marché, qui est le représentant de Louhans, son ‘«’ ‘ marqueur »,’ a une spécificité qui peut lui permettre de prétendre participer tant à un développement local qu’à un développement touristique. En effet, il sert d’image, de faire valoir et d’attrait touristique et il est un élément essentiel de la vie sociale et économique locale. Pourtant, ce qui fait son intérêt et son originalité, c’est-à-dire le marché aux volailles vivantes, tend à disparaître. Si le marché a encore un intérêt économique pour les locaux, ce qui attire le plus les curieux n’a plus vraiment d’intérêt économique et une crainte est que cette partie disparaisse avec ses plus vieux représentants : les retraités agricoles. Des solutions non satisfaisantes ont été avancées, et on attend les résultats de l’étude FISAC que nous avons présentée plus haut.

Avec la participation de l’office du tourisme, le label est géré par la ville qui est aussi l’organisatrice du marché. Nous avons dit que le label devait son existence à Louhans grâce à la perspicacité de deux adjointes municipales. L’une est commerçante et chargée de l’embellissement de la ville. Elle est largement impliquée dans la demande de l’étude FISAC sur le commerce local et d’une relance des foires et marchés. L’autre, qui a en charge le suivi du dossier S.R.G., est correspondante au journal local. D’origine lyonnaise, venue à Louhans pour suivre son mari, vétérinaire, elle s’est impliquée intensément dans la vie locale afin de pouvoir s’intégrer. De fait, aujourd’hui elle est membre actif au sein de nombreuses associations (sportives ou autres), moins pour briguer un quelconque pouvoir local que pour être présente dans la vie locale. Ce bref exposé pour montrer comment des choix, des orientations dépendent aussi des personnalités qui conduisent les projets. Ici, il est d’autant plus intéressant de souligner que cette personne inscrira Louhans dans l’association des ‘«’ ‘ plus beaux détours de France ’» en 1999. Demandé par les villes et géré par celles-ci, ce label leur paraît plus concret dans ses exigences et ses objectifs. Il vise la création d’un réseau dans un but de communication. Ces villes qui valent ‘«’ ‘ le détour »’ sont au nombre de 32, ce qui est une dimension qui facilite les rencontres et une certaine dynamique. De plus, il est souvent relevé l’aspect ‘«’ ‘ parisien’ » des rencontres au C.N.A.C. et le fait que la dégustation des produits de chaque site occupe une trop grande partie de la rencontre. L’association S.R.G. leur a donc rapidement semblé ne pas correspondre à leurs attentes parce que trop éloignée et physiquement et de leurs préoccupations.

Dans un premier temps, le label S.R.G. n’a pas réussi à être totalement approprié. Par contre on s’est intéressé à un autre label qui relève du même ordre, c’est-à-dire qu’il est à visée touristique. Le choix pour un label ou un autre relève d’une stratégie, de la volonté de multiplier les supports de promotion, de choisir un type d’actions… Mais il dépend aussi de la manière dont chaque membre peut s’y retrouver et s’y reconnaître. Lorsque le C.N.A.C. était encore présent, l’association des S.R.G., bien que réunissant des ‘«’ ‘ provinciaux’ », parmi lesquels beaucoup de producteurs, était désignée de ‘«’ ‘ parisienne’ ». Ce label est cité dans les articles de la presse locale et il est présent sur les dépliants touristiques. Louhans avait essayé d’inviter des sites lors d’une exposition gastronomique, mais peu répondirent à l’invitation et la manifestation ne reçut pas un grand accueil. Cela ne fut pas renouvelé. Par contre, Louhans met en place une association avec Charolles qui est valorisée par leur appartenance commune aux S.R.G.. Aujourd’hui, alors que les sites reprennent en main ‘«’ ‘ leur’ » association, des projets sont en cours de réflexion. T.V., chargé culturel à la mairie de Louhans, après avoir fait des visites de la ville durant quelques années, s’implique dans les S.R.G.. De par ses passions artistiques, il propose d’organiser un festival de théâtre et de cinéma sur le thème du goût, qui pourrait avoir lieu dans le cadre des Quatre Glorieuses. La réalisation de ce festival – qui n’est encore qu’à l’état de projet – associerait de manière forte l’image de la ville à celle de la gastronomie et du goût. Alors que l’événement hebdomadaire perd de son intérêt touristique, on peut supposer que le festival reformulera un lien aux produits du terroir. Par ailleurs, comme a pu l’observer H. Cettolo, les festivals deviennent ‘«’ ‘ des moments de communion, de relation à l’autre et au territoire.’ 345  » En cela, ils peuvent se rapprocher des marchés. Néanmoins les pratiques n’y sont pas les mêmes, et que nous dira ce festival sur l’histoire et la mémoire locale ? Un festival doit en effet tendre vers une certaine universalité pour toucher le plus de monde possible. H. Cettolo observe que ‘«’ ‘ les relations entre l’action culturelle et le territoire s’inscrivent manifestement dans des rapports : celui de ’ ‘«’ ‘ l’ici » et de ’ ‘«’ ‘ l’ailleurs » (qui s’expriment à travers des jeux entre différents espaces) et celui de tradition/modernité’. 346  » Même si le festival montre une image du local, ce ne sera que virtuel ou représentation. Le festival ne pourra remplacer le marché, ne serait-ce que parce que les pratiques et les individus n’y seront pas les mêmes.

Le site des Quatre Glorieuses est à considérer en même temps que celui de Louhans, puisqu’aujourd’hui, c’est T.V. qui est chargé de la communication de ces manifestations. On remarque ainsi que la Glorieuse de Louhans, souvent mise à l’écart des trois autres, s’impose à elles, de manière amicale.

Notes
344.

Des animations telles que les fêtes du Beaujolais ou du 8 décembre se mettent en place depuis quelques années et la compagnie Le Manteau d’Arlequin propose des spectacles de théâtre et de rue tout au long de l’année.

345.

Compte-rendu de la thèse de doctorat « Action culturelle et développement local en milieu rural. Le cas de trois projets culturels en Midi-Pyrénées. », in RURALIA, n°6, 2000.

346.

Ibid.