- TROISIEME PARTIE -
L'ACTION PEDAGOGIQUE
ET SES CONTRADICTIONS CONSTITUTIVES

Le développement de la science s'accompagne d'une mise en cause de la conception classique de la métaphysique. Theoria donne en français théorie qui désigne ‘«’ ‘ dès le XVIIème siècle, avec Descartes et Pascal, à la fois une construction intellectuelle faite selon les règles d'une méthode rigoureuse et le résultat de cette construction comme ensemble de concepts abstraits liés en un système ayant la prétention de contenir, du moins en partie et dans un domaine particulier, une connaissance vraie ’ ‘«’ ‘’ ‘ 266 ’ ‘.’ Théorie, qui désigne la connaissance fondée sur l'observation des faits, n'a plus grand chose à voir avec theoria, qui supposait de se détourner de la réalité sensible. Praxis rejoint la poièsis en donnant l'adjectif pratique : utile, d'application et d'utilisation faciles, efficace, et le substantif pratique : expérience, activité concrète par opposition à théorie. C'est Kant qui, dans ce contexte, va redonner à la pratique le sens moral qu'elle a perdu.

En faisant de l'espace et du temps, non des entités réelles mais des formes a priori de la sensibilité, en faisant des catégories, non des entités réelles mais la forme a priori de l'entendement, Kant fait de l'objet scientifique un phénomène, c'est-à-dire une construction de l'esprit. Nous ne pouvons connaître que des phénomènes, pas les objets réels ni les choses en soi. Ainsi se ferme la voie de la connaissance de l'Etre en soi, de la theoria. Si les Idées ne sont que des représentations vides, pouvons-nous encore prétendre en faire le guide nécessaire de la pratique pédagogique ?

Notes
266.

Jean Ferrari, Theoria et praxis, Encyclopédie philosophique universelle, volume I, L'univers philosophique, Paris, P.U.F, première édition, 1989, p. 117.