2.2. Principaux résultats sur les marchés du travail européens

Alors que les conséquences d’un licenciement en termes de pertes salariales ont été fortement examinées sur le marché du travail nord-américain, elles ont été peu étudiées en Europe.

Examinant le marché du travail allemand, Grund (1999) montre que les travailleurs licenciés subissent des baisses de salaire plus transitoires que les salariés américains. Par ailleurs, il montre également qu’il n’existe pas d’effet de signal lié à un licenciement sélectif comme l’ont montré Gibbons et Katz (1991) pour le marché du travail américain. Bender, Dustmann, Margolis et Meghir (2002) étudient le reclassement des employés allemands et français ayant été licenciés à la suite de la fermeture de l’établissement. Ils montrent que le déplacement n’est toutefois pas associé à d’importantes pertes salariales pour les deux pays observés. En France, les salaires moyens journaliers des employés déplacés augmentent à court terme par rapport à ceux des salariés étant toujours employés. La construction des variables de salaires rend la comparaison difficile. En effet, les auteurs considèrent des salaires journaliers alors que la plupart des travaux américains utilisent des salaires annuels ou trimestriels. Bender et al. précisent toutefois que lorsque l’on restreint l’étude aux travailleurs déplacés ayant connu plus d’un an de chômage, les pertes salariales encourues sont plus fortes (+ 25%).

Les spécificités institutionnelles des pays ont un impact sur les pertes de salaires que subissent les travailleurs déplacés. Ainsi pour des pays comme la Belgique, l’Allemagne ou la France dans lesquels les négociations salariales sont plus centralisées (conventions collectives) et les inégalités plus faibles par rapport aux Etats-Unis ou au Canada, on observe un plus faible impact de l’ancienneté sur les salaires (Kuhn et Eberts, 2002 30 ).

Lefranc (2000) compare les pertes salariales encourues par les salariés déplacés en France et aux Etats-Unis et s’intéresse plus particulièrement au rôle de l’ancienneté. Bien que l’ordre de grandeur des pertes est comparable dans les deux pays (de 10 à 15%), les sources de l’ajustement salarial diffèrent. En France, la baisse des salaires en cas de retour à l’emploi est principalement due à une perte en capital humain spécifique à la firme, alors que pour les travailleurs américains en moyenne moins anciens, elle résulte principalement de la perte de rentes. Les salariés français semblent avoir moins d’opportunités d’obtenir au cours de leur carrière de telles rentes. Ce résultat permet de mettre en évidence les spécificités nationales des systèmes de formation de salaires. Mais ce résultat peut également refléter le fait que les travailleurs français ont des durées de chômage plus élevées que les salariés américains et subissent alors une plus forte dégradation de leur capital humain.

La comparaison internationale des parcours professionnels des travailleurs déplacés permet de mettre en évidence des spécificités liées au fonctionnement des marchés telles que le poids de l’ancienneté sur les salaires ou l’importance du capital humain spécifique.

Notes
30.

Voir chapitre 1.