1.4. La vraie naissance de la discipline archéologique : le XVIIIè siècle.

Néanmoins c’est au XVIIIè siècle que la plupart des archéologues et des historiens font remonter les débuts de l’archéologie. Ce siècle constitue un tournant important dans le développement de cette discipline. Si on en croit Pesez (Pesez, 1997, p. 38), le fondateur de l’archéologie serait l’allemand J. J. Winckelmann (1717-1768). Dans son Histoire de l’art dans l’Antiquité (1764), Winckelmann présente le “premier essai d’une histoire systématique de l’art antique qui tente de replacer les œuvres dans leur contexte, la première tentative d’explication esthétique des qualités intrinsèques de ces œuvres” (Demoule et alii, 2002, p. 19). Cependant il ne faut pas oublier le Père Bernard de Montfaucon (1655-1741) et le comte de Caylus (1692-1765) qui, plus préoccupés de rassembler et de publier des documents, vont tout de même dans leurs préfaces et introductions mettre en avant “les éléments essentiels qui permettent de caractériser l’esprit nouveau de l’archéologie” (Laming-Emperaire, 1964, p. 77). Tout au long de leurs œuvres, on peut constater leur prise de conscience que l’objet peut aussi être un sujet d’étude à part entière et non plus simple complément de l’étude des textes.

Dans son Recueil d’antiquité, le comte de Caylus raconte “Les monuments présentés sous ce point de vûe [point de vue selon lequel il existe des différences certaines entre deux monuments construits dans des pays différents de telle manière que si l’on découvre un monument ne répondant pas aux critères du pays, celui-ci a été construit par un artiste étranger] se distribuent d’eux-mêmes en quelques classes générales relatives aux pays qui les ont produits ; et dans chaque classe, ils se rangent dans un ordre relatif au tems qui les a vû naître. Cette marche développe une portion intéressante de l’esprit humain, je veux dire l’histoire des Arts.” (Laming-Emperaire, 1964, p. 83) Le comte de Caylus est tout simplement en train de mettre en place l’idée de l’existence d’une classification typologique.

La notion de typologie commence donc à faire son apparition. Chaque objet est défini par des attributs qui peuvent être liés à un lieu et à une période caractérisés. Les objets sont maintenant considérés comme des témoins fiables de la vie dans l’Antiquité. Jusqu’à présent la description de l’objet ne se faisait que sur ce qu’il représentait, c’est-à-dire sur sa fonction, son utilisation déduite. Maintenant elle se fait sur l’objet lui-même, matériau, technique de réalisation …, ce qui permet d’établir des séries et de préciser des relations spatiales et temporelles. Pour pouvoir étudier ces grands sites, la communauté savante s’est très vite rendue compte qu’il fallait faire de l’archéologie de façon méthodique. Cette réflexion sur l’objet et la mise en évidence de son importance dans la compréhension des faits anciens se poursuit au siècle suivant.