4.1.2. Notes concernant le français dans les corpus

Le codage étant effectué il nous permet de sélectionner pour notre étude les lignes messages qui nous intéressent, c'est-à-dire celles qui sont en français, sans occulter complètement les autres lignes et en autorisant le cas échéant la mise en relation de lignes de types différents du point de vue du code.

Depuis le début de ce chapitre, nous parlons du français comme s'il s'agissait d'une évidence théorique. Le français que nous trouvons dans nos corpus est particulier à plusieurs points de vue.

D'après le SIL 78 , 77 millions de personnes parlent le français comme langue maternelle à travers le monde, dont 51 millions en France où une douzaine de parlers régionaux sont dénombrés 79 , les quelques 26 millions de locuteurs restants étant répartis dans 53 autres pays. Des représentants de ces communautés distantes peuvent bien entendu probablement se trouver parmi les participants de nos corpus puisque Internet ne connaît pas de véritables frontières géographiques. Les barrières 80 que connaît Internet sont économiques, culturelles ou techniques. Nous avons vu au chapitre premier les difficultés que représente l'évaluation du paysage linguistique sur Internet. La répartition des locuteurs francophones (de langue maternelle) sur Internet d'après les chiffres de Global Reach 81 se fait comme suit.

Figure (4-2) – Nombre d'internautes francophones
Figure (4-2) – Nombre d'internautes francophones

La répartition est, dans les grandes lignes, similaire à la celle des locuteurs francophones par pays que donne le SIL International 82  :

Figure (4-3) – Nombre de locuteurs francophones
Figure (4-3) – Nombre de locuteurs francophones

Les buts exprimés des canaux étudiés sont de rassembler des personnes francophones physiquement en France cependant, la relative faible part de canaux IRC francophones laisse supposer que des locuteurs francophones hors de France, voire des locuteurs d'une langue peu parlée dans le monde ayant le français en langue seconde utilisent ces canaux.

On peut aussi supposer que les locuteurs présents dans les IRC, d'une part sont sélectionnés parmi la population selon des critères socioéconomiques et socioculturels et d'autre part ont un certain intérêt pour la chose informatique et une certaine culture en ce domaine, il reste qu'ils appartiennent nécessairement aussi à des communautés linguistiques géographiquement définies. Nous nous attendons donc à trouver dans nos corpus des indices de variations diatopiques, diastratiques et diaphasiques 83 . Les variables sociales 84 traditionnellement prises en compte dans les études de la variation ne peuvent être établies. Les locuteurs donnent, certes, des indications à propos d'eux-mêmes au cours des conversations, qui peuvent être source de diversité. On doit évidemment se garder d'accorder trop de crédit à ces dernières, et ce, en raison de la spécificité de la communication IRC mentionnée au début de cette section. Néanmoins l'âge avoué des locuteurs oscille entre 16 et 39 ans, quelques-uns seulement se déclarant âgés de plus de 30 ans. Et ceci est corroboré par le fait que les conversations font assez souvent référence à des situations scolaires (examens, devoirs, cours…). La position géographique semble être pour la majorité la France Métropolitaine, quelques locuteurs se déclarant être des Québécois en France. La situation inverse est aussi affirmée ou peut-être inférée de la conversation. Certains encore se déclarent français hors de France Métropolitaine, étant enfants d'expatriés ou en stage à l'étranger. Enfin, un certain nombre de locuteurs peuvent être identifiés comme Québécois au Québec. Les autres situations sont très rarement revendiquées par les locuteurs.

Les éventuels facteurs de variations esquissés ici pour nos corpus sont sans doute affaiblis par le medium, qui d'autre part engendre un certain nombre de difficultés de traitement, ainsi que nous le montrons dans la section suivante.

Notes
78.

Ethnologue : The languages of the world http://www.ethnologue.com/web.asp

79.

Carton, Rossi, Ausseterre & Léon (1983).

80.

On parle aujourd'hui de fracture numérique.

81.

Global Reach http://www.glreach.com/globstats/

82.

Ethnologue : The languages of the world http://www.ethnologue.com/web.asp

83.

Variations régionales, sociales, ou en fonction de situations discursives.

84.

Milroy (1987)