5.1.4.5. Interjections, onomatopées

Notre corpus rassemble un nombre important de formes (1621 au total) que la grammaire traditionnelle nomme des interjections ou des onomatopées. À la suite de Gadet (1989), Bruxelles et Traverso (2001:39) rappellent que "Toute étude de corpus authentiques rencontre bien vite les "petits mots" 156 parce qu'ils prolifèrent dans les productions orales dont ils sont une des caractéristiques les plus saillantes." C'est une propriété de nos corpus que d'utiliser ces unités, nous postulons cependant que cela se fait dans de moindres proportions que dans les polylogues oraux spontanés, dans la mesure où le dispositif ne connaît pas les mêmes contraintes.

Le principe qui semble fonder ce groupe d'unités est qu'en dehors de leur emploi autonymique, elles n'entrent pas dans la construction de syntagmes, elles manifestent en effet une certaine autonomie syntaxique et peuvent former à elles seules un énoncé. Elles semblent donc appartenir à un niveau d'analyse spécifique, toutefois, la littérature leur reconnaît le statut d'unité linguistique.

En partant de l'inventaire des grammaires traditionnelles, dès le premier abord, on est forcé de reconnaître l'hétérogénéité 157 et tenté de proposer rapidement une première distinction 158 entre les unités utilisées pour représenter des bruits, des cris,… et habituellement qualifiées d'onomatopées, de celles utilisées pour indiquer la structuration discursive inter- ou intra-locuteur. Il faut effectivement reconnaître que toutes ces unités ne sont pas de même nature et qu'elles ne servent pas les mêmes fonctions.

Les formes que nous trouvons dans nos corpus ne respectent bien évidemment pas la norme représentée dans les dictionnaires, on s'en convaincra par le seul nombre de formes strictement différentes repérées, soit 451 pour 1632 occurrences. Bien entendu, ces unités sont affectées par les phénomènes détaillés jusqu'ici, après normalisation, on se trouve donc devant un inventaire, plus restreint, de 134 unités.

1493 lignes contiennent au moins une de ces unités (68 lignes en comportent plus d'une). On constate également qu'une part importante de ces lignes (553) ne sont constituées que d'unités de ce type et fonctionnent de façon autonome, ce qui indiquerait qu'elles participent à la régulation de l'activité communicative.

Pour chacune des unités, on ne peut le plus souvent repérer une valeur unique. Ce fait est depuis longtemps accepté dans la littérature, d'autant qu'à l'oral, des intonations différentes produisent des effets différents 159 . On peut se demander comment à l'écrit se retrouvent ces valeurs. Constate-t-on une moindre polyvalence des termes, ou non ; et dans ce cas, existe-t-il des indices sur lesquels le récepteur peut s'appuyer pour effectuer un décodage correct. Nous présentons rapidement les différents emplois de ces unités apparaissant dans nos corpus, avant de proposer une typologie.

Il est évident que les remarques que nous allons faire sont en très grande partie dictées par nos intuitions de locuteur natif, et qu'elles se basent sur une lecture qui cherche la cohérence. Les participants des canaux produisent et interprètent leurs interventions on-line, tandis que notre point de vue est global.

Certaines unités présentent beaucoup plus d'occurrences que d'autres, c'est le cas de bon, ah, bah, ben, haha, héhé. On remarquera aussi que la standardisation opérée en ce domaine pose parfois problème. En effet, les phénomènes mentionnés dans les sections précédentes, gênent parfois la standardisation. Cela intervient essentiellement sur l'opposition que nous avons choisi de conserver entre bah et ben, puisqu'en effet on doit se demander si une unité qui apparaît ba doit être standardisée ben ou bah. Il apparaît dans nos corpus, après observation qu'il n'y a pas dans l'usage des participants une réelle opposition formelle. Dans des cas ou on attendrait ben, bah est effectivement réalisé, en revanche, le contraire ne se produit pas.

Nous examinons assez rapidement ci-après le fonctionnement des unités les plus fréquentes.

ah est produit après la prise de connaissance d'une information nouvelle ou le rappel d'une information connue mais non prise en compte, qui modifie en général le point de vue du locuteur.

‘Extrait du Corpus F3’ ‘*PDL: c'est koi mdr?’ ‘%add: PAL’ ‘(1)’ ‘*PAJ: mort de rire’ ‘%add: PDL’ ‘(1)’ ‘*PCC: mdr merde en abreje’ ‘%add: PDL’ ‘*PDL: ah ok’ ‘%add: PAJ PCC’ ‘Extrait du Corpus P2’ ‘*PAY: puteaux c ds le 91,93,92?’ ‘%add: ALL’ ‘(3)’ ‘*PAG: c'est a la defense’ ‘%add: PAY’ ‘(1)’ ‘*PAG: je sais je m'y suis perdu.’ ‘%add: PAY’ ‘(1)’ ‘*PAY: ah vi exact’ ‘%add: PAG’

Il peut aussi signifier l'état de surprise du locuteur, son admiration, son soulagement ou sa déception.

‘Extrait du Corpus F7’ ‘*PBP: PJQ c la crise :o)’ ‘%add: PJQ’ ‘*PJQ: PBP ah?? où ça?’ ‘%add: PBP’ ‘Extrait du Corpus P3’ ‘*PBX: la migraine est partie spour ca!’ ‘%add: PAS, PAM,’ ‘*PAM: ahh’ ‘%add: PBX’ ‘Extrait du Corpus P9’ ‘*PBH: Ah merde t'es sur lyon... désolé PBO, toutes mes condoléances =\’ ‘%add: PBO’

Les formes ha, rha traduisent en général des protestations. Dans l'exemple ci-dessous, PBW vient d'accorder le statut d'opérateur à PAG, ce qui implique que ce dernier veille au bon déroulement des choses sur le canal.

‘Extrait du Corpus F1’ ‘*PBW: y'a pas d'raison que je sois seule à bosser ;)’ ‘%add: PAG’ ‘*PAG: rha’ ‘%add: PBW’

grr manifeste l'agacement, le mécontentement du locuteur :

‘Extrait du Corpus F7’ ‘*PCK: BobLeCingle ma PARLE PAS DE MA VOITURE AUJOURD'HUI STP!!!!’ ‘%add: PDS’ ‘(1)’ ‘*PCK: grrrrrrrrrrrrrrrrrr’ ‘%add: PDS’

oh marque tantôt la réprobation, le mécontentement du locuteur émetteur, son état de surprise ou de choc, par rapport à un énoncé ou à un événement (extrait suivant),

‘Extrait du Corpus F7’ ‘*PJQ: oh le vilain power abuse...’ ‘%add: ALL’

tantôt son admiration, son contentement :

‘Extrait du Corpus P3’ ‘(PBR vient d'accorder le statut d'opérateur à PCA)’ ‘*PCA: ohhhhh merci mon tit PBR :o)’ ‘%add: PBR’

houla, houlala surviennent après des dires ou des événements inattendus ressentis comme négatifs, ils semblent manifester la surprise et éventuellement une certaine méfiance.

‘Extrait du Corpus P6’ ‘*PD9: oula un intello dans le chan help ’ ‘%add: ALL’

tiens manifeste un état de surprise du locuteur sans qualifier l'événement inattendu. Il apparaît éventuellement redoublé : tiens tiens.

‘Extrait du Corpus F5’ ‘*PAL: salut PAV’ ‘%add: PAV’ ‘(1)’ ‘*PAV: tiens lu pit’ ‘%add: PAL’

Il précède le plus souvent l'expression de ce qui suscite la surprise.

‘Extrait du Corpus P8’ ‘*PBB: tien Lambic a une amie :P’ ‘%add: ALL, (PAW),’

Il convient aussi pour modifier la thématique conversationnelle. L'extrait ci-dessous est tiré d'un passage qui réfère aux cinémas de New York.

‘Extrait du Corpus F7’ ‘*PJQ: tiens j'irais bien me faire un week en dà NYC’ ‘%add: PBP’

tiens sert rarement à marquer que le dire est une conséquence du comportement de l'allocutaire, ce qui le rapproche de la sémantique de sa source.

‘Extrait du Corpus F5’ ‘*PAY: savoir aimer c'est ne pas aimer et aimer c'est ne pas savoir!! et en plus Si tu veux le p'tit dej' au lit, dort dans la cuisine!.. Tiens!!!’ ‘Extrait du Corpus P7’ ‘*PAC: héhé doucement PBH :))’ ‘%add: PBH’ ‘(1)’ ‘*PBH: bin la PAC, je vais me gener tiens lol’ ‘%add: PAC’

Cette unité peut être combinée avec ben.

Les travaux sur bon sont assez peu nombreux. Caron-Pargue et Auriac (1997) regroupent les divers aspects de la signification de bon selon trois composantes : positionnement d'une frontière 160 , franchissement d'une frontière et mode de franchissement de la frontière. La première composante réfère aux fonctions d'ouverture ou de clôture d'unités discursives. La deuxième spécifie la fonction de mise en relation d'unités s'intégrant alors dans une unité plus vaste, ce qui révèlerait un aspect anaphorique de ce marqueur. La troisième composante spécifie enfin la façon dont les unités sont intégrées. Ces composantes permettent aux auteurs de dégager deux aspects distincts de la signification de bon, comme organisateur de contenu conceptuel, ou marqueur des étapes de construction du terrain commun entre les interlocuteurs. On peut alors établir deux dimensions de cette unité, fonctionnant comme connecteur pragmatique (réflexif, expressif ou phatique) ou marquant la structure conversationnelle (conclusif, explicatif, opposition argumentative).

bon, dans nos corpus est le plus souvent utilisé pour marquer une rupture de thématique conversationnelle, ainsi que l'illustre l'extrait présenté ci-dessous.

‘Extrait du Corpus P3’ ‘*PAG: PAS tu parles toujours aussi bien quebecois a ce que je vois’ ‘%add: PAS’ ‘*PAS: yep’ ‘%add: PAG’ ‘*PAG: ;)’ ‘%add: PAG’ ‘*PAG: c l'effet bianca’ ‘%add: PAS’ ‘*PAG: lol’ ‘%add: PAS’ ‘*PAS: j'edite un dico franco-quebecois ;p’ ‘%add: PAG’ ‘*PAS: oui’ ‘%add: PAG’ ‘*PAS: bianca-nana’ ‘%add: PAG’ ‘*PAS: ;p’ ‘%add: PAG’ ‘*PAS: bon je vais debrancher un truc’ ‘%add: PAG’ ‘*PAS: ca va peut etre me faire planter’ ‘%add: PAG’

Il est ainsi souvent à l'initiale des amorces de séquences de clôture.

‘Extrait du Corpus F3’ ‘*PDL: bon je crois que je vais partir’ ‘%add: ALL’

Plus rarement bon marque que le locuteur fait une concession. Dans ce cas bon valide une information problématique et signale qu'une réponse va y être apportée.

‘Extrait du Corpus F3’ ‘(action) PAM voulait aussi la surprise woiiiiiiiiiin :/’ ‘%add: PAG, PCA,’ ‘(7)’ ‘*PCA: bon PAM je te la laisse :)’ ‘%add: PAM’

Cet emploi se rapproche de ceux où bon est associé à ah ou ben, dans ces cas, il est une sorte de validateur de l'information qui suscite l'énoncé, ah et ben contribuant respectivement les valeurs d'étonnement et de conséquence. À travers tous le corpus, bon n'est employé que deux fois seul, comme simple validateur d'information. D'autre part, un seul exemple présente bon ailleurs qu'en frontière de clause, mais jamais de façon si souple qu'on le trouve dans l'oral spontané :

‘…et elle euh bon faut dire qu'elle est pas maline hein mais bon elle a pas fait l'truc.’

Certains emplois de alors sont aussi à analyser dans cette section 161 . En effet, alors peut marquer l'ouverture ou la clôture d'unités (changements de thématiques, unités parenthétiques, ruptures de thématique…) ; l'invitation à prendre la parole ou à poursuivre une séquence. Cette unité est quelquefois empreinte d'impatience.

‘Extrait du Corpus P4’ ‘*P05: ca va P03?’ ‘%add: P03’ ‘*P03: tres bien merci et toi?’ ‘%add: P05’ ‘*P05: ouais ca va :)’ ‘%add: P03’ ‘*P05: alors koi de bo?’ ‘%add: P03’ ‘*P03: bah rien de special :)’ ‘%add: P05’

ben et bah dans nos corpus sont en intersection. Après une question, ils semblent manifester l'évidence de la réponse ou l'embarras qu'elle cause.

‘Extrait du Corpus F3’ ‘*PCO: tu connais ussi? ;))’ ‘%add: PAE’ ‘*PAE: PAE bah tu m'a donne l'url j'y suis alle ’ ‘%add: PCO’ ‘Extrait du Corpus F4’ ‘*PAB: tain j'arrive pas a copier les chansons *.wav d'un cd sur mon DD Lolol’ ‘%add: ALL’ ‘*PCA: té pas doué PAB :))’ ‘%add: PAB’ ‘*PCO: c ormal PAB c normal’ ‘%add: PAB’ ‘*PCA: tu le fais avec quoi?’ ‘%add: PAB’ ‘*PAB: comment je peux faire?’ ‘%add: ALL’ ‘*PCA: avec windac’ ‘%add: PAB’ ‘*PAB: ben avec rien c'est ça le probleme PCA’ ‘%add: PCA’

ben ou bah peuvent aussi introduire une conséquence 162 (conclusion, déduction), ou une concession.

‘Extrait du Corpus F3’ ‘*PCB: et si je l ai pas ’ ‘%add: PAJ’ ‘(1)’ ‘*PAJ: PCB bah c'est pas bien, t'es un pirate :o))))’ ‘%add: PCB’ ‘Extrait du Corpus F4’ ‘(PEO a été sorti du canal par PAU, avec le message suivant : "you're repeating too much – text flood [I²]¤")’ ‘*PEO: bah j'ai pas fait de repeat... se demande si PAU ets pas un peu fru ;)’ ‘%add: PAU’

Seul bah peut manifester une forme de désintérêt, résignation ou découragement.

‘Extrait du Corpus P4’ ‘*P05: alors koi de bo?’ ‘%add: P03’ ‘*P03: bah rien de special :)’ ‘%add: P05’

tss et pff marquent en général la remise en cause de la pertinence ou du bien fondé du dire de l'allocutaire.

‘Extrait du Corpus F7’ ‘*PCK: PDS jaloux.... lol’ ‘%add: PDS’ ‘*PDS: moi? pfffffff’ ‘%add: PCK’

Dans certains cas, ils marquent la réprobation quant à un énoncé, ou un événement. Ils peuvent intervenir seuls, précéder ou succéder un énoncé qui explicite la non pertinence. Ils ne sont combinés à aucune autre unité du type discuté ici.

bof dans nos corpus est utilisé soit en réponse à un énoncé présentant un problème, soit en réponse à une question totale appelant donc une réponse binaire (oui ou non). Dans le premier cas, illustré ci-dessous, bof réfute le statut de problème et est suivi dans tous les cas d'une alternative. Dans le second cas, bof est une réponse alternative intermédiaire.

‘Extrait du Corpus F8’ ‘*PAS: PDT cela dépend du nb de parisiens qui descendent’ ‘%add: PDT’ ‘(2)’ ‘*PDT: bofffffffff PAS... on les trainera pas le fond de culotte s'il faut ;)’ ‘%add: PAS’

Un certain nombre de formes manifestent de l'enthousiasme : ouais, youpi, yep, yo, et yop,.

‘Extrait du Corpus F4’ ‘*PDZ: ils sont tous morts?’ ‘%add: PCA’ ‘*PAG: youpppppiiiiiiiiiiii’ ‘%add: PDZ’

On pourrait aussi ajouter à ce petit inventaire cool, et super, qui servent les mêmes fonctions pragmatico-discurvives, mais qui pourraient être analysées comme des énoncés elliptiques, réalisant une prédication.

ouah est une unité qui connaît de nombreuses variantes formelles. L'ensemble des interventions qui la présentent semble exprimer que le locuteur est surpris agréablement.

‘Extrait du Corpus P6’ ‘*PJ8: mais j'en connaît pas mal des op’ ‘%add: PE2, PJ7’ ‘*PJ8: :)’ ‘%add: PE2, PJ7’ ‘(3)’ ‘*PJ7: ouah PJ8 connait du bo monde’ ‘%add: (PJ8)’ ‘*PJ7: je suis impressionnée’ ‘%add: PJ8’

ouf exprime le soulagement. Il peut éventuellement désambiguïser l'énoncé qui pourrait être considéré comme négatif.

‘Extrait du Corpus F8’ ‘*PDJ: mais si on t'aime’ ‘%add: PBH’ ‘*PDJ: :)’ ‘%add: PBH’ ‘*PAH: PBH, mais si’ ‘%add: PBH’ ‘(3)’ ‘*PBH: ouf chuis un tipeu rassuré’ ‘%add: PAH, PDJ,’

hmm, hum sont employés pour signifier des plaisirs sensuels réels ou imaginaires.

‘Extrait du Corpus F5’ ‘*PAC: hummmmmmmmmmmmmmm j'ai ti hate de voir des marguerites moi’ ‘%add: ALL’

Les mêmes formes et humph, ou humpf sont employées pour marquer le remplissage d'un temps de réflexion, celles-ci sont souvent suivies de l'expression d'un doute.

‘Extrait du Corpus F6’ ‘*PDH: t'as qua ditre XXX au lieu de YYY’ ‘%add: PAW’ ‘(9)’ ‘*PAW: XXX ? humph... s'tu veux...’ ‘%add: PDH’

hum et arf sont utilisés pour manifester une gêne qui est souvent liée au fait que l'énoncé qui suit est un FTA pour celui qui le subit 163 .

‘Extrait du Corpus P2’ ‘*PAY: PAP une question pas simple curiosité féminine arf, t'as quel age?’ ‘%add: PAP’ ‘Extrait du Corpus F8’ ‘*PBO: moi aussi je t aime :D’ ‘%add: PAX’ ‘*PAX: arf’ ‘%add: PBO’ ‘*PAX: po moi ;p’ ‘%add: PBO’ ‘Extrait du Corpus F6’ ‘*PBF: allez PAW arrête de bouder’ ‘%add: PAW’ ‘(2)’ ‘*PAW: y'a pas moyen.... pas avatn d'avoir obtenu ce que je veux.... :)’ ‘%add: PBF’ ‘(10)’ ‘*PBF: arf et tu veux quoi?’ ‘%add: PAW’

Mais il arrive aussi que arf soit utilisé devant un énoncé impliquant que le locuteur avait un présupposé contraire à ce qui est :

‘Extrait du Corpus F8’ ‘*PAS: coucou PDT :))) xxxxx’ ‘%add: PDT’ ‘*PDT: allo PBL ;)’ ‘%add: PBL’ ‘*PDV: PDT aa mon aaaaaaaaaaaaaammmmmmmmmmmmmmmmmmmoooo
ooooooooooooooooooouuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuurrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrr enfin qq qui va me sortir de cet ennui ’ ‘%add: PDT’ ‘(2)’ ‘*PDW: salut PDT je ne t avais pas vue desolee’ ‘%add: PDT’ ‘*PDT: aaallo PDV ;))))))))))] mon chiriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii’ ‘%add: PDV’ ‘*PDT: allo PDW ;))))))))))’ ‘%add: PDW’ ‘*PBF: coucou PDT :) xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx’ ‘%add: PDT’ ‘*PDV: PDT bon ben j'attends! kes tu me racontes?’ ‘%add: PDT’ ‘(4)’ ‘*PDV: ...’ ‘%add: PDT’ ‘*PDV: bon ben je recommence à lire’ ‘%add: PDT’ ‘*PDT: allo beau PAS ;))))))))’ ‘%add: PAS’ ‘*PAS: arf... je croyais être encore dans ton ignore list :)))’ ‘%add: PDT’ ‘*PDT: mais non beau PAS... jamais ;)))))))))))0’ ‘%add: PAS’

oups revendique une erreur, il est suivi souvent d'une excuse, d'une explication ou d'une réparation (extrait suivant),

‘Extrait du Corpus F3’ ‘*PAE: oops j'ai mal lu’ ‘%add: PDY’

mais il peut être employé par sympathie :

‘Extrait du Corpus P7’ ‘*PAK: merdeeeeeeeee’ ‘%add: ALL’ ‘(1)’ ‘*PBB: quoi PAK?’ ‘%add: PAK’ ‘(1)’ ‘*PAK: mon chum vien de briser ma carte de credit....’ ‘%add: PBB’ ‘*PBB: oops’ ‘%add: PAK’

euh est reconnu comme unité permettant de remplir une pause, à l'oral, permettant de ne pas perdre le tour de parole. Ici le dispositif met à l'abri le locuteur de cette éventualité, puisque le message d'un locuteur n'est accessible aux autres qu'après sa composition. C'est donc la cause de l'utilisation de cette stratégie qui est ici exprimée : hésitation, timidité…

‘Extrait du Corpus F4’ ‘*PCO: bon kelkun connaitrais une façon originale de ce suicidé???’ ‘%add: PCO’ ‘*PDR: heuuuuuuuuuuuuuuuu PCO....je vais y penser........’ ‘%add: PCO’ ‘Extrait du Corpus F2’ ‘*PAD: euh brb je vais faire ma lessive. à la main s'il vous plait!’

Associé à mais, euh est le signe d'une protestation.

‘Extrait du Corpus F1’ ‘*PCJ: aaaaaaaarf Glossolalie . change de nick où je te vire mdr...’ ‘%add: PAD’ ‘*PCJ: vite vite’ ‘%add: PAD’ ‘*PAD: mais heu’ ‘%add: PCJ’ ‘*PAD: je peux pas lol’ ‘%add: PCJ’

L'extrait ci-dessous montre également que mais, employé seul peut assurer cette fonction de protestation.

‘Extrait du Corpus F3’ ‘*PBG: ben moi je pues.. merci’ ‘%add: ALL’ ‘*PCM: lol’ ‘%add: PBG’ ‘(3)’ ‘*(action): PBG a une tite larmichette à l' oeil’ ‘*(action): PCM renifle PBG ah oui ca sent si tinsiste :)PPPPPPPP’ ‘(1)’ ‘*PCM: mdrrrrrrrrrrrr’ ‘%add: PBG’ ‘(3)’ ‘*PBG: zetes messants!’ ‘%add: ALL’ ‘(2)’ ‘*(action): PCM pas mechante du tout lol’ ‘(2)’ ‘*PBG: si euuuuuuuh!’ ‘%add: PCM’ ‘(1)’ ‘*PCM: cets toi qui a dit que tu puais lol’ ‘%add: PBG’ ‘(2)’ ‘*PBG: maiiiiiiiiis’ ‘%add: PCM’

D'autres cas d'associations avec mais existent dans nos corpus : non mais, ah mais, non mais ho, non mais bordel... Ils marquent la clôture d'une unité dans laquelle le locuteur s'est senti défié ou attaqué.

gnak, niarf ou gnark sont produits par un locuteur qui a commis un FTA 164  – un manquement à la netiquette, dans l'exemple ci-dessous– et semblent marquer que le locuteur revendique son acte qu'il sait non conforme aux règles. Il sert en même temps d'adoucisseur, le locuteur ayant commis la faute s'auto-dépréciant.

‘Extrait du Corpus F7’ ‘*PCJ: pei... nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nnantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes nantes antes nantes nantes nantes nantes’ ‘%add: PEI’ ‘*PCJ: gnark’ ‘%add: PJQ’

est utilisé pour attirer l'attention des allocutaires soit dans le but d'ouvrir une unité conversationnelle (variantes : hého, pst), ou de modifier sa thématique, soit dans le but de policer les interventions des allocutaires.

‘Extrait du Corpus P6’ ‘*PD1: salut les gars’ ‘%add: ALL’ ‘*PD1: y aurais pas des gens intelligents parmis vous?’ ‘%add: ALL’ ‘(PD1 se fait sortir du canal avec le message " non que des cons, la preuve")’ ‘(PD1 revient)’ ‘*PD1: khoo c t pour rire’ ‘%add: ALL’ ‘*PD1: hey vous pouvez m'expliquer un truc’ ‘%add: ALL’ ‘*PJ7: PJ7 il a pas trouvé ca drole je crois’ ‘%add: PD1’ ‘(3)’ ‘*PJ7: tu crois qu'on a envie de t'expliquer qq chose maintenant?’ ‘%add: PD1’

Parmi les interjections impératives, se présente chut. Destinée à faire taire le ou les allocutaires, elle ne se révèle pas être ressentie comme une agression de la part de ses destinataires.

‘Extrait du Corpus P2’ ‘*PAY: PAS chut parce que bon, le bb est pas loin’ ‘%add: PAS’

ouh est utilisé pour huer l'allocutaire, à la suite d'un comportement (ou d'une dénotation) évalué comme négatif.

‘Extrait du Corpus F6’ ‘*PBP: sur mon joli COMPAQ p100!!!’ ‘%add: PDH’ ‘*PDH: ouh l'antiquite’ ‘%add: PBP’

hein et quoi formulent des demandes d'approbation ou de reformulation.

‘Extrait du Corpus P9’ ‘*PAH: PAA avoue que taimerais ca avoir le charme de PBG hein :PPPPPPP’ ‘%add: PAA’ ‘Extrait du Corpus P4’ ‘*P33: g mal partt en + avec le sport d'hier’ ‘%add: P13’ ‘*P33: donc c la fete koa’ ‘%add: P13’

zou, hop, toc manifestent la facilité ou la rapidité de l'événement dénoté par l'énoncé suivant.

‘Extrait du Corpus F1’ ‘*PAD: bon tiens je te confie la lourde tache de surveiller le nick XXX lol’ ‘%add: PCJ’ ‘(2)’ ‘*PCJ: PAD ouep’ ‘%add: PAD’ ‘*PAD: des qu'il est dropper ZOU tu le register si je le fais pas lol’ ‘%add: PCJ’

beurk, piouh marquent strictement le dégoût, ils sont employé seuls à l'exception des cas où la cause du dégoût ne peut être directement inférée par l'allocutaire.

‘Extrait du Corpus F8’ ‘*PBL: ici les meringues elles sont racies et rances’ ‘%add: PAH’ ‘*PBL: beurkkk’ ‘%add: PAH’

na est utilisé de façon ludique, le locuteur affirme qu'aucune stratégie conative n'aura de prise sur sa position.

‘Extrait du Corpus F1’ ‘*PAZ: PAD... attends je fais que des stages payés la misère pour prendre 1 tite semaine de vacances... :op alors na’ ‘%add: PAD’

nanana, nananère sont utilisés pour narguer les allocutaires suite à un avantage exprimé ou reçu.

‘Extrait du Corpus F8’ ‘*PBO: moi je suis zentil tout plein et onda le sait bien ;P’ ‘%add: PAS’ ‘(3)’ ‘*PBO: nanananereeeeeeuh’ ‘%add: PAS’

On trouve encore un ensemble de jurons, avec bon sang, bordel, criss (Québec 165 ), merde, putain, ostie de ciboire(Québec), tabernacle (Québec), zut, etc. Le total représente 5%, la forme vedette étant putain.

On peut le plus souvent retrouver la cause de la production de ces unités. Ces unités sont en effet émises soit en lien avec une intervention d'un allocutaire, ou un ensemble d'interventions, soit avec une ligne ou une série de lignes systèmes, soit avec une activité immédiate du locuteur qui peut être liée ou non au dispositif.

‘Extrait du Corpus F8’ ‘*PAY: 'tain y'a du salut dans tous les coins tss’ ‘Extrait du Corpus F4’ ‘*PAB: tain j'arrive pas a copier les chansons *.wav d'un cd sur mon DD Lolol’ ‘%add: ALL’ ‘Extrait du Corpus F5’ ‘*PEE: arf merde c bientot l'heure d'aller garder le mostre’ ‘%add: ALL’ ‘Extrait du Corpus F7’ ‘(une ligne système indique que le bot XXX a quitté le serveur)’ ‘*PJQ: merde mon bot’ ‘%add: ALL’ ‘*PBP: heh PJQ’ ‘%add: PJQ’ ‘*PBP: il fait greve aussi’ ‘%add: PJQ’ ‘*PJQ: on se sent seuls lol’ ‘%add: PBP’ ‘Extrait du Corpus F7’ ‘*PFS: criss vous settes ben impoli les francais’ ‘%add: ALL’

Ces unités peuvent manifester de l'étonnement, ou de l'agacement.

Un certain nombre d'émissions sonores humaines, qui ne sont habituellement pas contrôlées, ni linguistiques sont représentées par des onomatopées.

Ainsi peuvent apparaître des pleurs (snif, bouh, bouhou, ouin), des cris de frayeur (hi).

‘Extrait du Corpus P6’ ‘*PD9: me sent morose en fait’ ‘%add: PJ7’ ‘*PJ7: bon’ ‘%add: PD9’ ‘(1)’ ‘*PJ7: arf’ ‘%add: PD9’ ‘(1)’ ‘*PD9: genre coup de blues, envie de rien’ ‘%add: PJ7’ ‘*PD9: snirf’ ‘%add: PJ7’ ‘Extrait du Corpus P4’ ‘*(action): P03 tel un poulpe geant a ses bras et ses jambes qui repoussent’ ‘%add: P17, P13, P19,’ ‘*P17: hiiiiiiiiiii’ ‘%add: P03, P13, P19,’ ‘*P17: un extraterrestre’ ‘%add: P03, P13, P19,’

Les formes représentant des rires ou des pleurs sont assez variées, mimant l'intensité de ces derniers.

‘Extrait du Corpus F7’ ‘*PBO: bosse un peu fénéant!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!’ ‘%add: PHQ’ ‘*PBD: mouahahhaha PBO.... exclavagiste....’ ‘%add: PBO’

Ces unités interviennent très souvent seules, en réaction à une intervention d'un allocutaire ou du locuteur lui même.

‘Extrait du Corpus P2’ ‘*PAY: il fait chaud tout d'un coup’ ‘%add: PAC’ ‘(1)’ ‘*PAP: PAY pourtant jvien douvrir la fenetre.. :/’ ‘%add: PAY’ ‘*PAP: hehe’ ‘%add: PAY’

On trouve également des représentations d'émissions sonores naturelles humaines, telles que des éternuements (atchoum, cf. premier extrait ci-dessous), des ronflements…

‘Extrait du Corpus F5’ ‘*(action): PCZ est en trainde crever’ ‘%add: ALL’ ‘(1)’ ‘*PAB: PCZ comment ca?’ ‘%add: PCZ’ ‘*PCF: comment ca?’ ‘%add: PCZ’ ‘(1)’ ‘*PCF: mdrrrrrrr’ ‘%add: PCZ’ ‘*PCZ: avec un p*** de rhumle grippe... qui le fait tousser comme un perdu’ ‘%add: PAB, PCF’ ‘(3)’ ‘*PCF: prend du miel avec de leau chaude et du vicks’ ‘%add: PCZ’ ‘*PCZ: qui veut mes virus?’ ‘%add: PAB, PCF’ ‘*PCF: nope merci’ ‘%add: PCZ’ ‘(3)’ ‘*PCZ: distribution gratuite’ ‘%add: ALL, PAB, PCF’ ‘(2)’ ‘*PCZ: aaaaaaaaaatttttttchoum’ ‘%add: ALL, PAB, PCF’

Les ronflements (ronfl ronfl, zzz) surviennent dans le canal quand l'activité est très réduite. Les bruits de pets (prout, proutos) sont parfois employés ludiquement, à la fin d'un énoncé :

‘Extrait du Corpus F3’ ‘(dans ce corpus, PCO est engagé dans une unité conversationnelle dont la thématique est les flatulences, la séquence de clôture en est empreinte)’ ‘(action): PCO se casse prout’

Il arrive qu'ils soient l'occasion de joutes, lorsque l'un des participants commence à jurer, et seraient en ce cas à ajouter au compte des jurons :

‘Extrait du Corpus P6’ ‘*PD3: bah je te dis qu elle l est’ ‘%add: PI7’ ‘*PA2: je veins + que une fois par mois bordel’ ‘%add: PI7’ ‘*PD3: de dieu!’ ‘%add: PI7’ ‘*PJ7: PA2 elle vient PI7’ ‘%add: PI7’ ‘*PI7: PD3 non je suis po aop’ ‘%add: PD3’ ‘*PJ7: crotte de bique’ ‘%add: PI7’ ‘*PD3: bon bah op moi de dieu!’ ‘%add: PI7’ ‘*PJ7: prout’ ‘%add: PI7’ ‘*PJ7: lol’ ‘%add: PI7’ ‘*PI7: mdr’ ‘%add: PJ7’

Ce genre de joute se produit aussi avec les interjections ah, oh voire avec des mots lexicaux.

‘Extrait du Corpus F1’ ‘*PAS: rhaaaaaaaaaaaaaaaaa PAG :)))))))’ ‘%add: PAG’ ‘(1)’ ‘*PAG: rhaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa mdr’ ‘%add: PAS’ ‘(3)’ ‘*PBN: hooooooooooooooooooooooooooooo’ ‘%add: PAG, PAS,’ ‘*PAS: PAG RhaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaAAAAAAAAAAAAaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaAAaaaa’ ‘%add: PAG’ ‘(2)’ ‘*PAG: PAS arrêtes sinon je vais te faire un waza’ ‘%add: PAS’ ‘(2)’ ‘*PAG: ....’ ‘%add: PAS’ ‘*PAS: PAG Je te mets au défi..... héhé lol’ ‘%add: PAG’ ‘(…)’

Enfin, gloups et gruik (bruit de gorges suscités par une émotion) semblent indiquer des contrariétés.

Des émissions sonores humaines non linguistiques contrôlées sont également représentées. Les représentations de chants et de sifflements (toudoudou, fuit fuit) ne semblent pas véritablement liés à l'activité conversationnelle ; une représentation de chant suit dans nos corpus toujours une ligne de message action produite par le même locuteur. Il arrive en effet que des locuteurs spécifient ce qu'ils sont en train de faire par le biais des lignes d'action – par exemple, écouter de la musique – sans que cela ne puisse se rattacher à aucune unité conversationnelle en cours. L'intervention onomatopéique est alors un prolongement informatif de la ligne d'action.

Des bruits de mandibules (miam-miam, slurp) apparaissent lorsque des thématiques culinaires ou sensuelles sont en cours :

‘Extrait du Corpus F5’ ‘*PAC: hummmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm qui parle de sirop d'érable là :P j'y vais dans quelques jours miam miam menoummmmmmmmmmmm :P’ ‘%add: ALL’

Des représentations de bruits de bisou (smack) et d'applaudissements (clap clap)remplacent le faire, impossible avec ce moyen de communication.

‘Extrait du Corpus F8’ ‘*PAH: PDE, tu peux, j'adore quand tu fais ca ;o)’ ‘%add: PDE’ ‘(16)’ ‘*PDE: quand je fais quoi PAH ???’ ‘%add: PAH’ ‘(5)’ ‘*PDE: quand je t'embrasse ALBATOR? alors re-belote smack :)’ ‘%add: PAH’

Enfin, quelques émissions sonores non humaines sont représentées. Ainsi, des bruits de chocs (blam, boum, paf, pan, pof, pouf, poum) viennent agrémenter la conversation :

‘Extrait du Corpus P3’ ‘*(action): Trois fois, adjugé vendu ’ ‘%add: PAS, PAK, PAM’ ‘*PAB: mdr’ ‘%add: PAS, PAK, PAM’ ‘*PAS: ;p`’ ‘%add: PAB’ ‘*PAB: pan’ ‘%add: PAS, PAK, PAM’

Dans l'extrait ci-dessus, l'onomatopée vient renforcer la mise en scène construite par le locuteur PAB, en représentant un événement non linguistique.

bzz-bzz, bzz imitent le vol d'insecte, par exemple, le premier est utilisé dans une session pour dire bonjour à un participant dont le surnom est celui d'un insecte, et le second est employé comme verbe

‘Extrait du Corpus F7’ ‘*PFN: ca cause pas les mouches ca bzzzzzzzzz’ ‘%add: PLJ’

Des bruits d'artefacts (bip-bip, pouet-pouet, pouet) et des cris d'animaux (coin-coin, meuh, miaou) surviennent également. Ces derniers, ainsi que le pré-babillage (areuh) sont souvent employés en remplacement des termes d'ouvertures. Quelquefois, ils ont des emplois plus spécifiques, ainsi que le présente l'exemple ci-dessous :

‘Extrait du Corpus P3’ ‘*PAG: PAS ben oui je ronronne’ ‘%add: PAS’ ‘(8)’ ‘*PAG: miaouuuuuuu’ ‘%add: PAS’

Les onomatopées ont la particularité de pouvoir être employées comme des unités lexicales. C'est le cas également de certaines unités que nous avons classées dans le groupe des jurons. Une autre singularité est qu'elles peuvent prendre des affixes -os; re-, par exemple proutos, repouet.

Il reste bien sûr un certain nombre d'unités qui ne sont pas mentionnées ici, c'est que leur petit nombre ou leur fonctionnement particulier les met en question. Ainsi, Bingo, ou rebelote, sont des termes de jeux qui sont utilisés seuls sans référence au jeu. Le premier signalerait que l'allocutaire a deviné une information que le locuteur n'a pas explicitement donnée (mais qu'il ne cachait pas non plus) et rebelote signale que la situation s'est déjà produite. Leur utilisation est très rare.

Les interjections formulent des réactions face à de nouvelles situations et/ou elles permettent de fluidifier les transitions conversationnelles.

La spécificité que ces dernières présentent dans nos corpus est en premier lieu leur faible incidence au cours d'un tour de parole ou d'une clause. Elles sont en règle générale des indices de frontières d'unités.

Nous avons observé, ainsi que le remarque Mosegaard-Hansen (1997) que certaines peuvent se combiner avec d'autres, et qu'il existe toujours un ordre pour cette combinaison.

On peut distinguer différentes natures parmi les unités retenues. Certaines sont par ailleurs des unités lexicales, et il ne semble pas qu'on puisse faire de réelle restriction quant à la catégorie morphologique, puisqu'on trouve des verbes fléchis (tiens, voyons, dites, dis-donc), des noms (merde), des adjectifs ou adverbes (bon, bien, cool, super). Dans cette classe, on notera le cas particulier des jurons, qui se distinguent des injures dans la mesure où ils se produisent en réaction à une situation tandis que l'injure est adressée et répond à une syntaxe 166 . Si l'interjection est un signe linguistique, le signifiant est une forme lexicalisée et expressive ou une forme lexicale privée de son sens original. On argue que l'interjection serait un mot sans valeur conceptuelle (pas de sens dénotatif, référentiel) mais signalant un ensemble de situations émotionnelles.

Dans nos corpus, les unités étudiées ont potentiellement trois fonctions : expressive, impérative, représentative, structurante. Certaines peuvent porter plusieurs de ces fonctions dans une même occurrence.

L'information véhiculée est assez diverse. Elle peut concerner l'attitude émotionnelle initiative ou réactive du locuteur, son attitude épistémique initiative ou réactive, la structuration discursive, l'établissement ou le maintien du contact (on constate en effet des cas où un locuteur réagit immédiatement après une intervention par une interjection seule, puis il formule une intervention plus longue, ce qui semblerait être une stratégie de maintien du contact, étant donné la contrainte temporelle et la contrainte de surcharge).

Dans la communication, ce qui concerne les émotions peut être porté par le lexique, l'intonation, le débit, les mimiques, la gestuelle, les postures... Une interjection peut avoir, nous l'avons vu, des valeurs paradoxales 167 , à l'écrit c'est le système d'inférence des intentions et réactions d'autrui qui se met en jeu, aucun indice linguistique 168 ne permet de départager les cas.

On peut distinguer différents types d'émotions, celles qui transparaissent malgré le locuteur, et celles qu'il souhaite faire paraître. Elles peuvent être plus ou moins contrôlées, plus ou moins volontairement dévoilées. Le dispositif des IRC, comme l'écrit traditionnel, permet au locuteur de contrôler tout ce qu'il communique, les émotions qui paraissent donc sont volontairement représentées, "mimées". Tout ce qui se joue dans les IRC se fait par l'échange, verbal ou pseudo verbal, il semble important pour les participants de se construire une identité affective et émotionnelle.

Notes
156.

Les auteurs empruntent ce terme à Bouchard (2000), on trouve encore dans la littérature "marqueur", "particule"… (voir notes suivantes).

157.

Barbéris (1992); Vassileva (1994).

158.

Mosegard Hansen (1998); Roulet, Auchlin, Moeschler, Schelling et Rubattel (1987) ; Gülich (1999).

159.

Morel et Danon-Boileau (1998).

160.

La notion de frontière est apportée par Culioli, A. (1978, 1988)

161.

Hasen-Moosegard (1997).

162.

Voir sur ce point Bruxelles et al. (2001)

163.

Face Threatening Acts selon la terminologie de Brown et Levinson (1987) à propos de la politesse. La notion de face est liée à celle de territoire, elle se dédouble en face positive et face négative. Un acte menaçant pour la face d'un locuteur est un acte verbal ou non-verbal qui remet en cause un ou plusieurs aspects de la face positive ou négative, du locuteur qui l'accomplit ou de celui qui les subit. Par exemple, les offres, les promesses, sont des FTA pour la face négative de celui qui les accomplit tandis que les ordres, conseils, sont des FTA pour la face négative de celui qui les subit. Les excuses, autodépréciations sont des FTA pour la face positive de celui qui les accomplit, tandis que les critiques, injures sont des FTA pour la face positive de celui qui les subit.

164.

Un acte menaçant pour la face d'un interlocuteur peut-être, comme c'est le cas ici, un énoncé qui, n'étant pas conforme aux règles imposées par l'interlocuteur, remet en cause l'autorité de ce dernier. Les autres cas sont des insultes explicites ou implicites.

165.

Drescher (2000), Roulet et al. (1987),

166.

Ruwet (1982) ; Milner (1978).

167.

Par exemple, ah peut exprimer la surprise agréable ou désagréable.

168.

Le paralinguistique étant de surcroît exclu.