6.1.1.2. Participants

Au sujet des participants, les paramètres à prendre en considération pour caractériser les interactions sont leur nombre, leurs caractéristiques individuelles, et les relations qu'ils entretiennent.

Le nombre de participants engagés dans une conversation joue sur la structure de la conversation, des interactions et des échanges. Selon André-Larochebouvy (1984:47) "la conversation triadique est fondamentalement différente de la conversation dyadique, tandis que les conversations à quatre et plus se réduisent à des structures dyadiques et triadiques". Dans les canaux IRC, le nombre de participants varie en permanence. Comme dans un bar, des gens entrent et sortent à tout instant. Les logs sont l'enregistrement des interactions des participants dans le canal principal. La différence avec ce que serait l'enregistrement des interactions dans un bar réside dans le fait que les interventions de chacun dans le canal principal sont perçues de tous tandis que les interactions privées entre les connectés à un canal sont insoupçonnables sauf mention explicite dans le canal principal. On note également qu'un participant peut alors mener plusieurs interactions en parallèle. C'est le cas dans l'extrait suivant, dans lequel le locuteur PBW est engagé dans trois unités différentes, que nous ne présentons pas entièrement pour ne pas alourdir l'exposé.

‘Extrait du Corpus F1’ ‘*PAS: T'es pas encore couché PBW???????’ ‘%suj: DORM’ ‘%add: PBW’ ‘*PBW: y'a pas d'raison que je sois seule à bosser ;)’ ‘%suj: TPEH’ ‘%add: PAG’ ‘*PAG: rha’ ‘%suj: TPEH’ ‘%add: PBW’ ‘*PBW: mais si PAS ;) ... je suis levée ;)’ ‘%suj: DORM’ ‘%add: PAS’ ‘*PAK: s’ ‘%suj: INDET’ ‘%add: INDET’ ‘*PAS: rhaaaaaaaaaaaaaaaaa PAG :)))))))’ ‘%suj: WAZZZ’ ‘%add: PAG’ ‘*PBU: et toi PBW t'as fini tes impôts???’ ‘%suj: TFTIP’ ‘%add: PBW’ ‘*PAG: rhaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa mdr’ ‘%suj: WAZZZ’ ‘%add: PAS’ ‘*PAS: PBW Tu dors 4 heures par nuit???????????’ ‘%suj: DORM’ ‘%add: PBW’ ‘*PBC: bonjour P97’ ‘%add: P97’ ‘*PBW: j'en ai encore PBU... mais j'arrive à la fin ;)))))))) oufffffffffffff’ ‘%suj: TFTIP’ ‘%add: PBU’ ‘*PBN: hooooooooooooooooooooooooooooo’ ‘%add: ALL’ ‘*PAS: PAG RhaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaAAAAAAAAAAAAaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaAAaaaa’ ‘%suj: WAZZZ’ ‘%add: PAG’ ‘*PBW: des fois oui PAS ;) ....’ ‘%suj: DORM’ ‘%add: PAS’ ‘*PBW: quand je dors longtemps ;)’ ‘%suj: DORM’ ‘%add: PAS’

Quant aux caractéristiques individuelles des locuteurs, nous avons mentionné au cours des chapitres précédents combien il était illusoire d'essayer de les établir. Les locuteurs donnent des indications à propos d'eux-mêmes au cours des conversations, concernant leur âge, leur sexe, leur position géographique, leur activité… et elles ne sont jamais dans nos corpus mises en question par les allocutaires, toutefois, cela semble faire partie du jeu que d'user de l'impossibilité de vérification instantanée. Le dispositif en revanche confère des statuts aux différents participants, susceptibles de générer des phénomènes de relation verticale. D'autre part, en ce qui concerne la relation horizontale, c'est le texte conversationnel qui fournit des indices de la distance qui existe entre les interlocuteurs 203 . Rappelons qu'en théorie, les participants d'un canal peuvent se connaître réellement, se connaître seulement par les interactions qu'ils ont menées dans le canal ou dans d'autres lieux sur le réseau, qu'ils peuvent éventuellement s'être rencontrés réellement a posteriori, ou ne pas se connaître du tout. On considérera deux types de locuteurs : les locuteurs privilégiés, qui sont intéressés à participer au canal principal et semblent pour la plupart y participer régulièrement et les locuteurs occasionnels qui utilisent le canal principal comme un passage vers des canaux privés.

Notes
203.

Les chercheurs en analyse conversationnelle qualifient la relation interpersonnelle à l'aide des concepts de relation horizontale et verticale. relation horizontale désigne le lien qui unit les interlocuteurs au plan de la distance (des facteurs externes – s'ils se connaissent, appartiennent à un groupe social particulier – ou internes – négociés lors d'interactions – peuvent déterminer ou modifier ce lien…). relation verticale désigne les rapports hiérarchiques entre les interlocuteurs (des facteurs externes – biologiques, socioprofessionnels – ou des facteurs internes – quantité de parole, nombre de prises de parole, nombre d'intervention initiatives, indices proxémiques et kinésiques…) – cf. Kerbrat-Orecchioni (1995).