7.5. Conclusion

La première section de ce chapitre nous a permis, par des mesures quantitatives, de montrer que le type de texte (au point de vue de la densité et de la diversité lexicale) ressort davantage de ce qu’on considère comme de l’oral prototypique que de l’écrit prototypique. Elle a permis également d’établir que la contrainte temporelle des IRC n’a pas le même effet que la contrainte sur le nombre d'unités du télégramme puisque la part des mots grammaticaux est très importante dans nos corpus.

Cependant ces indices ne permettent pas d’étudier le lexique d’un point de vue qualitatif. Nous avons alors entrepris d’observer plus spécifiquement les unités présentes dans le corpus, qui n’appartiennent pas au lexique commun standard. En effet, nos listes de fréquences ne montrent que peu d’unités du lexique standard de faible fréquence (seuls quelques items reconnus comme rares ou vieillis apparaissent – ex. fléau d’armes).

Nous avons pu alors observer que le français utilisé dans les IRC d'une part, est plus anglicisé que la variété standard, précisément à cause des éléments qui concernent l'univers de référence de l'Internet, des réseaux et de l’IRC. On remarque, entre autres, que les termes empruntés ne sont pas complètement intégrés, puisqu'ils ne s'attachent pas systématiquement les morphèmes grammaticaux qu'ils devraient manifester. Il faut aussi noter que la création lexicale spécifique aux IRC en français est de très faible incidence (quelques unités seulement – ex. ptdr, robopub…)

Nous avons également observé qu’il peut se dégager plusieurs catégories d’items parmi ceux qui n’appartiennent pas au lexique commun standard et/ou sont encore absents des dictionnaires. Le vocabulaire de nos corpus comporte en effet des éléments qu'on attribue à la jeunesse, tant au niveau des bases que morphèmes dérivationnels. Nous avons également trouvé dans nos corpus des éléments de la variété québécoise, et de quelques autres variétés tandis qu’aucun terme du français du sud n'a été repéré.

Ainsi, si les contraintes imposées par le dispositif font que code est fortement touché, le niveau lexical l'est beaucoup moins – et l'on s'y attendait. On peut toutefois assurer que le profil du vocabulaire est particulier à plusieurs points de vue : la plus grande part du vocabulaire est constitué d'unités très courantes ; quelques îlots de termes peu fréquents se manifestent (en particulier le champ sémantique des armes) ; un nombre important de termes relatifs à l'informatique et aux IRC peut être dégagé et enfin des unités issues de sociolectes de jeunes générations ainsi que des unités provenant de variétés régionales du français ponctuent les corpus. Cet ensemble permet de faire l'hypothèse que les locuteurs sur les IRC ne renient pas ce qui fait leur identité propre pour constituer une communauté linguistique nouvelle.