9.2.2. Autres marques de temporalité

Nous avons identifié deux types principaux concernant la temporalité : d'une part le repérage chronologique et d'autre part la temporalité interne, comme catégories de la morphologie verbale. D'autres moyens linguistiques permettent de les manifester.

9.2.2.1. Temporalité

Pour ce qui concerne le repérage chronologique d'un événement, si couramment différents moyens lexicaux et grammaticaux sont identifiés en dehors de la morphologie verbale, il est assez difficile de soutenir cette position. Le repérage d'un événement par rapport au moment de l'énonciation ou par rapport à un événement énoncé ne se fait pas directement par un item lexical mais par la fonction qu'occupe un syntagme dans une unité phrastique.

On peut ainsi déterminer un ensemble de prépositions et de conjonctions, de noms autodéterminés, d'adverbes, de noms et de verbes qui peuvent, suivant leur mode d'intégration à l'unité phrastique, contribuer à la localisation d'un événement dans le temps.

Dans nos corpus, l'inventaire de ces unités se présente comme suit :

Les connecteurs interphrastiques dans notre corpus qui permettent le repérage chronologique d'un événement sont : et, puis, après, ensuite, avant, au préalable, entre-temps.

Les conjonctions de subordination présentes dans le corpus, manifestent un éventail de valeurs sémantiques plus large de possibilités dans notre corpus. L'inventaire est le suivant : quand, lorsque, pendant que, dès que, après que, après +Vinf, avant (même) que, avant de +Vinf, (à) chaque fois que, tant que. Dans notre corpus, elles permettent de spécifier l'ordre des événements, mais également des cooccurrences d'événements, et la simultanéité d'événements.

En ce qui concerne la catégorie des adverbes, nous avons mentionné au chapitre 7 que nous considérerions certains d'entre eux d'après Creissels (1995:139-143) comme des noms autodéterminés. Ainsi, selon Creissels (1995:140) maintenant, jamais, quand ? "peuvent se définir comme substituts de syntagmes construits au moyen du substantif moment" et des "adverbes" tels que "hier, aujourd'hui, demain peuvent se définir comme des substituts de syntagmes construits au moyen du substantif jour".

L'inventaire que nous pouvons dresser pour notre corpus est donc le suivant pour les adverbes et noms autodéterminés.

Certains, dans leur sémantisme contiennent l'idée de repérage chronologique. Il s'agit des unités suivantes : maintenant, là, tout de suite, tout à l'heure, présentement, dernièrement, aujourd'hui, demain, hier, avant-hier, tôt, tard, bientôt, tantôt, soudain, (tout) d'un coup, tout à coup. On notera que ce repérage peut être plus ou moins précis.

D'autres font apparaître la qualification de l'occurrence d'un événement. Il s'agit pour nos corpus des unités déjà, encore, de nouveau et toujours, tout le temps, souvent, généralement, parfois, uniquement, seulement.

Dans nos corpus, le repérage d'un événement peut faire appel à la mesure du temps. La durée peut être dénotée par ce type d'unités et dans nos corpus, l'inventaire se limite à longtemps.

La vitesse, dimension connexe à celle de la durée, connaît dans nos corpus un inventaire plus important d'unités : vite, rapidement, lentement, précipitamment.

Les noms qui contiennent une spécification temporelle peuvent, pour nos corpus, également se répartir selon les dimensions identifiées pour le concept de temps. Les noms en relation avec la mesure du temps (durée) dans nos corpus sont les suivants : temps, laps de temps, bail, an, année, mois, semaine, jour, journée, soirée, matinée heure, plombe, minute, seconde, moment, instant, période.

Certains noms dénotent un repérage relatif à un événement et non pas à l'axe temporel fléché, ils permettent la saisie d'un moment du déroulement d'un événement. Il s'agit pour nos corpus de fin, début, et milieu.

Des noms permettent de référer au temps cyclique et calendaire et autorisent le repérage (temps situé : matin, midi, soir, après-midi, nuit, époque, lundi, mardi, mercredi, vendredi, samedi, dimanche, week-end, février, avril, mai, juin, juillet, août, septembre, octobre, décembre, été, Noël, Pâques). Enfin habitude, fois, et coup sont les seuls noms de nos corpus permettant la qualification de l'occurrence d'un événement sur l'axe temporel fléché.

Un certain nombre d'adjectifs dans nos corpus ont une spécification temporelle. Ils permettent de dénoter la qualité d'une durée : court, long, lent, rapide, bref, ou un ordre : dernier, prochain, premier ; voire un véritable repérage chronologique futur, nouveau, ancien, vieil.

En ce qui concerne les verbes, il est évident que la plupart d'entre eux ont un signifié qui implique de la temporalité 392 , mais quelques-uns, dans nos corpus ont un signifié en rapport étroit à la temporalité. Il s'agit des unités durer, tarder, approcher 393 , arriver.

Enfin, des semi-auxiliaires permettent de spécifier la saisie d'un procès dans son déroulement (commencer à, recommencer à, être en train de, continuer à, terminer de, finir de) ou de spécifier un repérage chronologique (venir de).

Les prépositions qui apparaissent pour introduire des adverbiaux temporels ne sont pas spécifiques. Toutefois, tous les membres de l'inventaire total des prépositions du français ne permettent pas d'introduire des adverbiaux temporels. Dans nos corpus, l'inventaire des unités qui le permettent est limité à la liste suivante : dans, en, pendant, à, il y a, depuis, jusqu'à, après, avant, à partir de, entre.

La négation entretient également des rapports avec la référence temporelle. Les éléments ne…plus, ne…jamais spécifient les occurrences d'un événement sur l'axe temporel fléché.

Des constructions spécifiques, enfin, permettent la référence temporelle. Dans nos corpus, elles permettent de dénoter la durée d'un événement (mettre CN durée à P, ça fait CN durée que P).

Le moyen de la référence temporelle chronologique préférentiel dans nos corpus est l'emploi d'unités lexicales dont le sémantisme est temporel dans des syntagmes prépositionnels en position d'adverbiaux temporels.

Notes
392.

Cf. section suivante.

393.

Dans des contextes spécifiques.