Chapitre 6
Les « bonnes femmes », la vie apostolique et le monachisme traditionnel

Malgré le caractère insolite que les maisons de « bonnes femmes » présentent au premier regard, les analyses développées dans les chapitres précédents ont permis de dégager des caractéristiques qui liaient ces communautés à d’autres phénomènes religieux de la fin du Moyen-Age. La sainteté des « bonnes femmes » parisiennes, comme celle de leurs homologues de la dissidence religieuse du Languedoc, était reconnue par la communauté locale à laquelle elles appartenaient. La sociabilité, dont cette sainteté relevait, était fondée sur des critères moraux et sur le principe d’entraide, éléments qui fournissaient aussi les assises du lien confraternel. Enfin, la fonction religieuse des « bonnes femmes » dérivait de croyances, concernant les rapports entre la femme et le sacré, qui remontaient à l’époque carolingienne.

L’objectif de ce dernier chapitre est d’approfondir notre étude sur la place des communautés de « bonnes femmes » parisiennes dans les tendances sociales et religieuses de leur époque. Ce développement partira de deux observations. D’une part, les « bonnes femmes » ressemblaient aux béguines et aux donnés, deux manifestations de l’éclosion de la piété laïque qui marqua l’Occident aux XIIIe-XVe siècles. Nous nous emploierons dans les pages suivantes à affiner notre compréhension des rapports entre les « bonnes femmes » et les autres mouvements issus de ce renouvellement spirituel. D’autre part, les idées relatives au rôle de la femme dans la famille et dans la société exerçaient une influence déterminante sur les comportements religieux des « bonnes femmes » de Paris. De même, les femmes issues d’autres milieux étaient sans doute soumises à des contraintes résultant de ces mêmes idées. La question se pose donc de savoir à quel point ces idées imposaient des fonctions et des formes de vie communes à toutes les communautés féminines. C’est le deuxième thème que nous proposons de traiter dans ce chapitre.