Entretien E26 Luc

Age : 50 ans

Profession : Maître formateur en Centre de Formation (Unité de Formation pour l'Adaptation et l'Intégration Scolaire) pour l'option G

Diplômes : CAP d'instituteur, Doctorat en psychologie clinique

Luc : cursus professionnel (cf. légende profils de carrière A1 pp. 43-44)
Luc : cursus professionnel (cf. légende profils de carrière A1 pp. 43-44)

Lieu : Salle en Centre de formation

Durée : 40 minutes

Quels sont les cinq mots qu'évoque pour vous l'expression "enfants en difficulté" ?

Souffrance, fonctionnement psychique, apprentissages scolaires, rééducation et je dirais aussi psychologie clinique.

Pouvez-vous expliquer le choix de chaque terme ?

Souffrance : l'enfant en difficulté pour moi c'est une manifestation de souffrance, c'est l'expression d'un malaise, la notion de symptôme. C'est une manifestation qui se pose sur le terrain des apprentissages qu'on lui demande. Cette souffrance est à comprendre par rapport au fonctionnement psychique du sujet. C'est une manifestation externe de quelque chose qui vient de l'interne… ça c'est en terme de norme sociale. Tous les enfants sont confrontés à des apprentissages scolaires, à des normes scolaires. L'apprentissage scolaire est un révélateur du dysfonctionnement psychique, quand on parle d'élève en difficulté. Rééducation, je pense que l'aide souhaitable, c'est un travail de rééducation, c'est-à-dire un travail d'apprentissage ou de ré-apprentissage. Le dernier psychologie clinique, un enfant en difficulté, ça me paraît relever du champ de la psychologie clinique.

Pouvez-vous chercher le visage d'un enfant en difficulté scolaire que vous avez eu l'occasion de rencontrer dans votre vie professionnelle ? Pouvez-vous citer une action conduite pour cet enfant et les émotions qui vous animaient face à lui ?

Un seul ? J'en ai eu beaucoup… Ce sont les premiers que j'ai rencontrés qui m'ont peut-être le plus marqué. C'était un enfant de onze douze ans, il lisait bien mais ne comprenait rien. J'étais confronté à ça en tant qu'enseignant et je voulais comprendre pourquoi. Et là j'ai commencé à travailler sur un des thèmes qui me porte depuis vingt ou trente ans, tout ce qui est la symbolisation… essayer de comprendre comment, pour lire, il faut symboliser. C'était une des premières fois où j'étais confronté à ça.

Et émotionnellement qu'est-ce que ça produisait chez vous ?

C'était plus de l'ordre d'un défi que d'un échec. Je ne me sentais pas tant en échec que mis au défi de dépasser ça… enfin dit vingt ans après. J'étais sans doute un peu jeune, un peu naïf et c'était un sentiment de défi par rapport à ça.

Pouvez-vous retrouver cette fois un enseignant face à un enfant en difficulté dans sa classe? Quels sentiments l'animaient ? Comment réagissait-il face à cet enfant-là ?

Un seul ?

Là aussi, je vous demande d'en choisir un… Celui qui vous vient spontanément…

Je n'ai pas… J'ai écouté beaucoup d'enseignants où c'était à la fois "ce n'était pas de mon domaine", "je ne suis pas formé pour ça, ce n'est pas de ma compétence", c'est-à-dire le sentiment d'échec provenant des soi-disant limites de leur compétence professionnelle. C'était souvent aussi de la plainte "je n'y arrive pas, c'est impossible". Combien ils pouvaient être atteints sur le plan narcissique par ça !… C'était souvent aussi "comment faut-il faire ?", comme s'ils attendaient la stratégie ou le programme qui allait résoudre ça… ce qui était en fait une erreur… Je ne savais pas répondre non plus… Il y avait souvent ces termes-là dans le discours des enseignants par rapport à l'échec scolaire.

Quels sont les cinq mots qu'évoque pour vous le sigle RASED en dehors de la stricte signification des lettres ?

Il y en a un que je déteste c'est RAS, rien à signaler. Je trouve que ce type d'abréviation c'est le déni complet de la fonction alors que le RASED fonctionne sur du signalement. RAS, c'est plus au niveau de la boutade et de la provocation... ça m'évoque aussi la notion d'équipe. J'ai travaillé dans deux GAPP. Dans ces deux structures, il y avait un travail d'équipe en place. J'ai de bons souvenirs d'avoir travaillé en équipe, d'avoir compris ce que c'était que le travail en équipe... Le mot RASED m'évoque aussi toute la difficulté d'aider les enfants, la difficulté de l'aide. Ce n'est pas un travail de réussite, c'est un travail de confrontation à l'échec, à l'angoisse des gens, que ce soit les enfants, les enseignants ou les parents. C'est un travail sur ce qui ne va pas. Le RASED, c'est lié aussi à la notion de conflit, de position conflictuelle. C'est toute la difficulté de se trouver une place dans l'école, entre l'absorption complète par l'école ou le rejet. RASED, ça fait penser aussi quand même à la relation à l'autre.

Vous pouvez préciser ?

Tous les termes ?

Juste le dernier, relation à l'autre", que vous n'avez pas développé...

Pour moi le travail de RASED, c'est un travail de relation à l'autre, soit que l'autre soit l'enseignant, le parent ou l'enfant, c'est tout le travail relationnel, tout le travail de ce qui peut se passer entre les gens... Une rééducation ou un suivi psychologique, c'est sur ce terrain que ça travaille...

Quand je dis maître E, quels sont les cinq mots qui vous viennent à l'esprit ?

Je ne connais pas bien les maîtres E... Je n'ai pas eu la chance de travailler avec des maîtres E, je ne connais pas bien. C'est plutôt des projections par rapport à ça qu'une connaissance réelle.. ça me fait penser à soutien lecture, activités scolaires... à psychologie cognitive, encore faudrait-il le discuter parce que ce n'est pas aussi simple que ça. Maître E, ça me ferait penser plus à stratégies d'apprentissage... à notion de groupe.

Quelles sont les différences que vous repérez entre le travail du maître E et celui du maître généraliste ?

(...) La fonction... c'est le rapport au groupe. Le maître, je ne reprendrais pas votre mot, le maître généraliste, c'est le maître, l'enseignant... face à un groupe classe, dans un lieu classe, avec une structure classe. Le maître E est plus en fonction avec un groupe moins constitué, mobile. Autant la classe est une structure de l'école, autant le maître E me paraît être en relation avec des groupes qui peuvent être variables et qui peuvent changer dans l'année selon les indications... Il y a peut-être un rapport qui serait à voir entre l'enseignant qui fait plus de la pédagogie, c'est-à-dire qu'il propose des choses à apprendre... Peut-être que le maître E travaille plus en terme de stratégie pour ceux qui sont plus en difficulté.

Voyez-vous des ressemblances entre ces deux fonctions ?

Des fonctions d'enseignant... Ce sont des fonctions qui ont rapport avec l'enseignement, avec ce champ-là, cette pratique-là...

Quand je dis maître G, quels sont les cinq mots qui vous viennent à l'esprit ?

... Enfants en souffrance, je dirais travail sur la pensée, rééducation, travail sur le fonctionnement psychique, ce qui est de l'ordre de la relation à l'autre.

Est-ce que vous pouvez préciser un peu ?

Le premier, c'est enfant en souffrance. Je crois que... les manifestations qui sont signalées à propos des enfants quand elles s'adressent au maître E (lapsus), je crois que ce sont plus des manifestations de souffrance de l'enfant que des impossibilités d'apprentissage. C'est ma façon de les comprendre, c'est de cet ordre-là... plus en terme de symptôme parce qu'il ne va pas bien ou à cause qu'il ne va pas bien. C'est pour ça que je parle d'enfant en souffrance plutôt que d'enfant en difficulté. L'enfant en difficulté c'est plus par rapport à une norme, par rapport à un programme, par rapport à une attente. L'enfant en souffrance, il est en souffrance parce qu'il a du mal à fonctionner mais pas forcément par rapport à la norme. Il y a des enfants qui réussissent à peu près bien et qui souffrent quand même.

Vous avez dit aussi "travail sur la pensée"...

Travail sur la pensée... Le travail du rééducateur, c'est aussi un travail sur la mentalisation, sur la symbolisation, tout ça, un travail sur la pensée... essayer que cette souffrance puisse être symbolisée et représentée pour que l'enfant soit libéré. Ce travail sur la pensée se fait à mon avis au sein d'un fonctionnement psychique qui comprend des instances psychiques différentes ainsi de suite…

Vous avez dit aussi "relation à l'autre"…

Oui, ce travail de mentalisation, de libération se fait par le moyen d'une relation qui est la relation au rééducateur. La rééducation, c'est quand même l'inter-psychique au service de l'intra-psychique. Ce qui se passe entre le rééducateur et l'enfant est au bénéfice du fonctionnement psychique de l'enfant. Ce n'est pas tant l'intra-psychique pour réussir le problème, que je mettrais du côté du maître E – à tort ou à raison parce que je ne connais pas bien -… je crois que le travail de la rééducation, c'est proposer un cadre rééducatif avec un dispositif, avec une personne pour permettre à l'enfant que tout ce qui se passe là soit au bénéfice de son fonctionnement... et en particulier de son fonctionnement intellectuel, donc des apprentissages sans faire de coupure. (…) Je dis quelquefois que la rééducation, elle pense et elle panse. Elle pense au sens de penser et elle panse au sens de pansement, avoir un effet curatif, d'un pansement qui fait du bien… Vous me faites répéter tout mon cours…(rires)…

Est-ce que vous pouvez préciser quelles sont pour vous les références théoriques sous-jacentes à la fonction G ?

Pour moi ? Les références, ce sont la psychologie clinique et la psychanalyse. Par exemple, Winnicott, tout ce qui est travail de pensée, tout ce qu'il décrit par rapport à ça. Je ne citerais pas Freud parce que ça… Je citerais Roger Perron, ce passage de la psychologie à la psychanalyse et ce lien qui peut être fait par rapport à ça. Et je vous citerais Margaret Mahler qui est dans tout le travail de séparation, individuation. Je pourrais en citer d'autres mais c'est quand même des bases, des références théoriques pour comprendre la rééducation.

Comment est née cette fonction ? De qui ou de quoi a-t-elle hérité ?

Vous voulez tout l'historique ?

Non, seulement les points qui vous semblent essentiels…

La rééducation est née au centre de Beaumont par des gens qui essayaient de faire le lien entre psychologie et pédagogie, de faire le lien entre apprentissage et fonctionnement psychique… en particulier avec Jacques Beauvais. Elle naît dans ce mouvement en France, reliée à des gens qui pensent que les déficits scolaires ne sont pas simplement des défauts d'apprentissage. Ce sont des manifestations psychologiques et il est possible de faire ce lien, en particulier d'installer à l'école un cadre qui peut être rééducatif, qui n'est pas thérapeutique puisque l'école n'est pas un lieu thérapeutique.

Quelles sont les différences entre maître E et maître G ?

J'ai du mal à vous répondre parce que je ne connais pas complètement les maîtres E… Il me paraît que le maître E travaille plus sur les stratégies d'apprentissage et le maître G travaille plus sur le fonctionnement psychique global.

Est-ce que cette différenciation vous semble pertinente ?

Oui.

Pour quelles raisons ?

Pour toutes les raisons que je viens de dire. C'est à la fois comprendre que certains enfants sont en difficulté à l'école non par défaut ou par déficit de stratégie mais parce que c'est une manifestation de leur souffrance… un enfant qui est en échec par rapport à la lecture CP, s'il ne s'agit que de reprendre la leçon de lecture dans un cadre aménagé, je ne crois pas que ce soit ce qu'il faille faire...

Est-ce qu'on pourrait imaginer une seule fonction qui pourrait proposer et pratiquer les deux types d'aide, tantôt l'aide E et tantôt l'aide G ?

Pour moi, non.

Pour quelles raisons ?

… Parce que ce n'est pas le même champ de références théoriques et ce n'est pas le même champ de travail. La rééducation, ce n'est pas l'aide E et l'aide E, ce n'est pas la rééducation…

Il me semble que ça je l'ai bien compris, mais pourrait-on imaginer que ces deux types d'aide, restant distincts, soient proposés par un seul et même professionnel selon les besoins de l'élève ?

Je ne crois pas.

Quels en seraient les inconvénients ou les impossibilités majeures ?

Je crois que si la rééducation disparaît comme il est fort probable que ça arrive, la notion de rééducation va disparaître au profit de la notion de soutien aux apprentissages, il y aura toute une partie de la souffrance de l'enfant qui ne sera pas entendue à l'école… ça apparaît dommageable pour les enfants qui ont ce type de manifestations de leur monde interne.

Si un jeune enseignant intéressé par un poste en réseau vous demandait de présenter les métiers de maître E et G, que lui diriez-vous ?

Je lui dirais qu'il va être confronté à des élèves en échec scolaire mais pas simplement en échec scolaire, c'est-à-dire que derrière cet échec scolaire, ce sont des enfants qui sont en souffrance et que son travail ce sera de comprendre cette souffrance et d'essayer de la faire évoluer par la relation qu'il va établir avec eux. Il n'y a pas de conseils à donner, il y a une formation à faire… ce n'est pas donné d'emblée… Je ne sais pas comment il faut faire en général, il faut comprendre pour chaque enfant ce qui se passe dans le cadre de la rééducation.

Quelle est la typologie des tâches effectuées par un réseau tout au long de l'année ?

Il y a plusieurs tâches : il y a une tâche d'écoute de l'école. Le réseau d'aide c'est le lieu ou "ça parle". Il y a des gens qui s'en servent et d'autres qui ne s'en servent pas, aussi bien du côté des enfants que des enseignants que des parents. Pour moi, c'est quand même un lieu où on vient parler, c'est un lieu de parole. C'est une des fonctions essentielles du RASED… ça parle de réussite, rarement, ça parle plutôt de souffrance, d'échec, de culpabilité… et ça on essaie de le mettre en mots. C'est un lieu aussi de travail psychique. La rééducation ou le suivi psychologique ou le travail avec un maître E, c'est aussi proposer des lieux de travail d'élaboration, de mentalisation… un lieu où l'enfant vient travailler… faire un travail psychique… pas un travail d'apprentissage au sens strict, un travail psychique qui a des effets bénéfiques sur les apprentissages. C'est aussi un lieu d'évaluation du fonctionnement des enfants, que ce soit par rapport à une demande, que ce soit au cours de la rééducation, que ce soit après ou que ce soit une demande faisant suite à une procédure d'orientation. Il y a aussi un travail d'équipe, je ne dirais pas pluridisciplinaire mais il y a un travail d'ajustement de pratiques différentes, un travail de confrontation.

Comment concevez-vous l'évaluation de résultats des réseaux ?

Il y a plusieurs niveaux d'évaluation et il faudrait s'entendre sur ces termes-là. Pour moi l'évaluation ce n'est pas la somme de tous les enfants vus pendant l'année. C'est un décompte, le bilan du travail : le nombre d'enfants, dans tel lieu, sous différents types d'actions… Une évaluation - qu'on appelle ici interne – c'est comment évaluer le processus rééducatif ou le processus d'aide E ou les entretiens du psychologue par rapport à l'interne, par rapport là où en est l'enfant… ça fait partie du travail de chacun que de mener une évaluation de son travail… ça, ce sont des évaluations individuelles par rapport à chaque enfant. Il faudrait arriver à une évaluation de type externe, c'est-à-dire quels effets ont ces types de processus sur les objectifs de l'école, sur les apprentissages ? …ça c'est beaucoup plus compliqué à mettre en place… J'ai assez d'expérience pour savoir qu'il y a des enfants qui fonctionnent bien en rééducation ou avec le maître E et qui ne fonctionnent pas en classe.

Quel est votre avis sur la qualité actuelle de la formation G ?

Je ne sais pas bien répondre à ça… Je ne peux pas être juge et partie. Je crois que la formation que l'on dispense avec les collègues, c'est une formation clinique de la rééducation qui doit transparaître dans nos discours. Je sais que cette approche clinique n'est pas acceptée par d'autres gens… Il faudrait peut-être inclure dans cette formation beaucoup d'autres approches, cognitives ou autre chose, peut-être mais au détriment de quoi ? On défend ses thèses… Peut-être qu'elle est insuffisante sur le plan de l'approche cognitive, sur le plan du fonctionnement intellectuel... possible… (…)

Quels sont les cinq mots qu'évoque pour vous la réussite à l'école ?

La réussite de qui ?

Vous l'entendez comme vous voulez, c'est ouvert… (rires)

Ça j'ai bien compris… La réussite de qui ? C'est pour ça que je vous renvoie votre question. Vous me laissez le choix alors je prendrais la réussite du rééducateur, du maître E ou du psychologue à l'école… La réussite, c'est quand il est content d'aller travailler. Vous me direz c'est banal, oui ou non… Il y a réussite pour le rééducateur ou le psy quand il a sa place reconnue comme professionnel, ce n'est pas toujours très simple, d'être à la fois différent et d'être avec les autres. Réussite aussi quand ce qu'il fait il arrive à le comprendre : "Voilà où j'en suis, voilà ce que je fais et ainsi de suite"… c'est-à-dire qu'il peut en avoir une lecture – on peut en avoir plusieurs… et troisièmement quand il a quand même du plaisir à faire ça. Voilà, je vous parle de la réussite du rééducateur ou du maître E ou du psy…

Et si on parlait de la réussite d'un enfant, ce serait quels mots qui vous viendraient à l'esprit ?

Réussir les apprentissages, c'est quand même nécessaire… Etre bien dans son corps, être bien dans sa tête, des relations aux autres, provoquer un peu aussi les cadres de l'école… ce serait des signes de santé…

Comment voyez-vous l'avenir des réseaux ?

(rires)… Incertitude, oui incertitude à long terme. Je ne sais pas ce que vont devenir les réseaux. Ce n'est pas nouveau. J'ai débuté dans la profession comme psychologue en 1978. Et déjà les GAPP étaient incertains en 78… ça a été créé en 70 et en 78 c'était déjà incertain… Il y a trente ans que ça dure. On s'est toujours demandé si ça allait continuer aussi bien du côté des psychologues que des rééducateurs… Maintenant, on dit que les réseaux vont disparaître… Et il y a trente ans que ça tient… Je ne sais pas si ça va tenir autant… C'est encore une place incertaine…

Une question un peu plus générale, comment considérez –vous la place et le rôle des aides à l'école ?

La place est liée à… c'est admettre que tous les enfants ne vont pas réaliser le même programme scolaire au même moment. On fonctionne sur un système comme ça qui est par répartition, qui est en opposition avec le développement individuel de chacun. Il y a un aspect normatif de l'école. A six ans les enfants doivent apprendre à lire… Je pense qu'il y a des enfants qui peuvent apprendre avant sans que ce soit prématuré, je ne parle pas d'apprentissage précoce et d'autres enfants qui à six ans ne sont pas prêts pour lire…qui vont se trouver de fait en situation d'échec pour des tas de raisons et que… la place des aides qu'elles soient à dominante rééducative ou pédagogique, c'est de s'intéresser à ces enfants-là et d'avoir un effort d'adaptation envers eux pour qu'ils puissent continuer à se développer. Je vais vous donner une métaphore de cyclisme de tour de France. On met tous les enfants dans la même étape au début et puis on croit qu'ils vont suivre tous pareil jusqu'au bout… et puis il y a ceux qui au premier col sont lâchés parce que… Le rôle des aides, c'est de leur dire "t'es lâché, on va quand même franchir le sommet si on t'aide"… La place est liée, qu'on change de forme, de références, qu'on l'appelle classe d'adaptation, rééducation, aide E, il y a des différences mais la place elle est là… Vous me direz que chacun défend sa boutique et moi je défends la mienne, tout à fait d'accord… Mais on ne peut pas faire fonctionner l'école avec une sorte de rejet de tous ceux qui ne suivent pas, créer des filières différentes "passez sur la voie d'à côté"…

Peut-être avez-vous d'autres remarques à formuler sur les aides spécialisées à l'école?

(incompréhensible)… dire un peu ma conception de la rééducation et en croyant que ça peut être utile pour les enfants et en ayant une attitude un peu défensive par rapport à ça. On sait bien que ce n'est pas la position reconnue, attendue par ce qu'on appelle les autorités administratives ou autres… Personnellement, je suis attaché à cette forme d'aide, la rééducation… Mais ce n'est pas exclusif des autres. Je connais moins l'aide E. Peut être que je fonctionne trop sur la caricature ou l'opposition… Pour moi la rééducation a sa place à l'école, ce n'est pas de la psychothérapie… Il ne faut se tromper de champ. Certains ont confondu ça… ce n'est pas de la thérapie, on n'est pas psychanalyste à l'école, ce n'est pas vrai… C'est se tromper. On a une fonction de psychologue à l'école avec des références mais le cadre institutionnel fait que c'est dans le cadre d'une école… avec ce qui peut en découler ensuite au niveau des pratiques.