2.2.2.3. L’exemple des scotomes : un second argument en faveur de la précocité du remplissage

Pettet et Gilbert (1992) se sont intéressés à la réorganisation des champs récepteurs à la suite d’un scotome induit par un impact au laser sur l’aire V1 du chat. Pettet et Gilbert (1992) ont enregistré la réponse des neurones avant et après l’impact au laser. Leurs résultats ont indiqué une expansion de la taille des champs récepteurs à la suite du scotome. Les auteurs suggéraient que l’augmentation de la taille des champs récepteurs pouvait expliquer le phénomène du remplissage des scotomes. Une réorganisation des champs récepteurs de V1 a également été démontrée à la suite d’une lésion de la rétine (Chino, Kaas, Smith III, Langston & Cheng, 1992). Ces résultats ont néanmoins été controversés par une étude dans laquelle cet effet n’était pas répliqué. Par contre, l’activité des neurones augmentait considérablement autour de la lésion (DeAngelis, Anzai, Ohzawa & Freeman, 1995). Eysel et Schweigart (1999) ont récemment complété ces études. Les auteurs ont induit un scotome par une lésion corticale chez le chat. Les auteurs estimaient ensuite la taille des champs récepteurs corticaux situés au bord de la lésion, 2 jours puis 2 mois après l’opération. Les résultats ont indiqué que la taille des champs récepteurs des cellules, situés au bord de la lésion, ne variait pas immédiatement après la lésion mais augmentait 2 mois après l’opération. Pour les auteurs, ceci permettrait de réduire l’étendue de la taille du scotome, puisque l’augmentation de la taille des champs récepteurs permettrait de diminuer le temps de transmission de l’information pour les connexions horizontales. Murakami, Komatsu et Kinoshita (1997) ont étendu ces recherches chez le singe pour lesquels des résultats similaires ont été montrés. Pour Gilbert (1995), l’expansion des champs récepteurs pourrait expliquer le processus de remplissage dans le cadre des scotomes artificiels (DeWeerd, Gattass, Desimone & Ungerleider, 1995).

Les études, qui ont utilisé un signal positionné autour de la tache aveugle ou des scotomes, étendent à une structure visuelle encore plus précoce les résultats de De Weerd, Gattass, Desimone et Ungerleider (1995) : ces derniers ont montré une activation des neurones dans les aires V2 et V3 (mais pas dans V1) pour le traitement du remplissage lorsqu’un scotome artificiel était utilisé.