2.3.4.2. Suppression et substitution : une solution ?

Une question peut alors se poser : est ce que le traitement du remplissage (constaté dans le cadre de la tache aveugle ou encore dans le traitement d’une surface uniforme) et la disparition d’un signal (un exemple est donné par les images stabilisées ou encore les scotomes artificiels) sont un seul et même mécanisme, ou si l’un n’est pas le pré requis de l’autre ? L’asymétrie qui existe entre les temps de remplissage des scotomes naturels et artificiels ne suggère pas un traitement unitaire, mais plutôt la manifestation de différentes étapes de traitement d’un même mécanisme (Spillman & DeWeerd, 2003).

Selon plusieurs auteurs (Spillman & DeWeerd, 2003 ; Stürzel & Spillman, 2001), le processus de remplissage impliqué dans le cadre des scotomes artificiels résulte d’un traitement en deux étapes. Un premier traitement serait mis en place lentement, dont la durée est déterminée en seconde, durant lequel la séparation figure-fond se détériorerait petit à petit, et ce jusqu’à la suppression des contours du signal. Puis, un second traitement, plus rapide (mesuré en milliseconde), serait effectué dans lequel le fond se diffuserait depuis les contours du signal pour remplir la cible (la substitution). Le temps de disparition du signal est important, dans les expériences se reportant à l’étude des scotomes artificiels, puisqu’il reflète la première étape, la seconde étape se faisant instantanément.

L’hypothèse de suppression et de substitution permettrait d’expliquer pourquoi l’étude physiologique de DeWeerd, Gattass, Desimone et Ungerleider (1995) montrait une forte implication du processus de remplissage dans les aires V2 et V3, par rapport aux études physiologiques portant sur la tache aveugle et les scotomes qui démontraient au contraire une implication précoce du remplissage. Toutefois, aucune donnée expérimentale n’a permis de valider cette hypothèse. Il est donc nécessaire de faire la distinction entre le remplissage naturel (tache aveugle, scotome, scotome bleu) et artificiel, car même si ces deux phénomènes semblent similaires dans les effets, les mécanismes qui les sous tendent n’apparaissent pas comme étant identiques. Par conséquent, le paradigme des scotomes artificiels ne permet pas à lui seul d’étudier l’existence d’un processus de remplissage dans le traitement de la surface.