Chapitre II : Partie expérimentale.

1. Première série d’expériences : variation de la durée de présentation du stimulus

Les données expérimentales, présentées au cours la partie théorique, ont montré que l’information de contour est une dimension qui est codée précocement par le système visuel. L’organisation centre/pourtour des champs récepteurs des cellules ganglionnaires de la rétine est telle que seule l’information située sur les bords d’une forme visuelle est véhiculée. En effet, la conception classique des champs récepteurs ne permet pas d’intégrer la dimension de surface. Par conséquent, il est admis que l’intégration de la surface nécessite une étape de reconstruction à partir de l’information de contour. Pour de nombreux auteurs (Gerrits & vendrik, 1970 ; Grossberg & Mingolla, 1985 ; Spillman, 1997 ; Walls, 1954), le processus de remplissage permettrait de reconstruire la dimension de surface. Bien que le remplissage d’une forme n’ait pas été démontré de façon explicite dans les études physiologiques, l’existence de ce processus a été démontrée dans de nombreuses études comportementales (Caputo, 1998 ; Dresp & Bonnet, 1991 ; Paradiso & Nakayama, 1991 ; Stoper & Mansfield, 1978). Toutefois, cette contradiction entre les résultats physiologiques et comportementaux, concernant le processus de remplissage dans l’intégration d’une surface, ne remet pas en question l’existence d’un traitement hiérarchique du contour et de la surface. Par conséquent, si les contours sont encodés par le système visuel et que la surface est ensuite traitée, alors nous nous attendons à ce que les contours constituent une dimension prépondérante pour la détection d’une surface uniforme. Ce type de tâche n’a jamais été utilisé pour mettre en évidence un traitement hiérarchique contour/surface, en dehors des études portant sur les contours illusoires. Mais, nous avons vu que les formes illusoires et non illusoires se distinguent par leur niveau de traitement (Mendola, Dale, Fischl, Liu & Tootell, 1999). Par ailleurs, les études comportementales utilisent souvent des tâches de jugement, et il est possible que cela affecte plus des fonctions d’ordre cognitive et non pas un traitement précoce. Ce qui permettrait d’expliquer la contradiction entre les expériences comportementales et physiologiques. En effet, cette distinction ne se retrouvait pas pour le traitement des contours puisque les expériences chez l’observateur humain utilisent souvent la détection. Cette tâche est ici rendue possible grâce au paradigme de l’image de classification. Ce paradigme va nous permettre d’analyser la représentation utilisée par l’observateur pour répondre, ce qui permettra de vérifier dans quelle mesure l’analyse des prototypes est compatibles avec l’importance accordée aux contours.

Nous savons très bien que manipuler le temps de présentation des stimuli influence les dimensions utilisées par l’observateur (Davey, Madess & Srinivan, 1998 ; Dresp & Bonnet, 1991, 1993 ; Paradiso & Hahn, 1996 ; Paradiso & Nakayama, 1991). Si la conception traditionnelle est vraie, nous nous attendons à ce que la répartition l’information de surface varie avec le temps de présentation, mais que l’information de contour soit toujours présente puisqu’il s’agit d’une information primordiale pour le système visuel.